En effet, dans un arrêt du 31 janvier 2012 (n°10-24412), la Cour de cassation a restreint la notion de cadres dirigeants aux seuls salariés cadres dirigeants qui « participent à la Direction de l’Entreprise ». La Haute Cour ajoute donc une nouvelle condition à la notion de cadre dirigeant définie par l’article L. 3111-2 du code du travail.
Cela signifie que les cadres dirigeants qui n’appartiennent pas à la Direction de l’Entreprise ne sont pas des cadres dirigeants au sens du Code du travail ; ils peuvent donc obtenir un rappel de leurs heures supplémentaires.
1) Le cadre dirigeant selon le code du travail
L’article L.3111-2 du Code du travail définit la notion de cadre dirigeant.
Le Code exclut les cadres dirigeants du champ d’application des Titres II (durée du travail, répartition et aménagement des horaires) et III (repos et jours fériés) de la troisième partie livre premier du Code du travail.
Dans un arrêt du 31 janvier 2009 (n°06-46.208 P+B+R),la Chambre sociale de la Cour de cassation, dans un attendu de principe, a rappelé que : « sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps (1er critère), qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome (2ème critère) et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement (3ème critère) ».
Le salarié est cadre dirigeant si et seulement s’il cumule les 3 critères :
Le cadre dirigeant doit se voir confier des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de son emploi du temps ; et
Il doit être habilité à prendre des décisions de façon largement autonome ; et
Il doit percevoir une rémunération se situant parmi les plus élevées des systèmes de rémunération pratiqués dans l’entreprise ou l’établissement.
2) La Cour de cassation vient d’ajouter une 4ème condition qui restreint la notion de cadre dirigeant aux salariés qui participent à la Direction de l’Entreprise
Dans l’arrêt du 31 janvier 2012, la Cour de cassation ajoute une 4ème condition pour relever de la catégorie des cadres dirigeants : le cadre dirigeant doit participer à la Direction de l’Entreprise.
Cela signifie qu’un cadre supérieur, qui ne participe pas à la Direction de l’entreprise n’est pas cadre dirigeant.
La Cour de cassation considère que le cadre dirigeant doit nécessairement participer à la Direction de l’Entreprise ; il doit diriger !
La notion de cadre dirigeant est donc limitée aux plus hauts dirigeants de l’entreprise.
A défaut, les intéressés peuvent obtenir le paiement des heures supplémentaires travaillées au-delà de 35 heures !
Ceci est d’autant plus risqué pour les entreprises. En effet, les cadres dirigeants travaillent souvent bien au-delà de 35 heures par semaine (et donc font très souvent de nombreuses heures supplémentaires), et leur rémunération est très souvent élevée.
Dès lors, une condamnation à un rappel d’heures supplémentaires pourra être une charge très élevée pour l’entreprise.
3) La preuve des heures supplémentaires par un cadre dirigeant
S’il ne remplit pas les 4 conditions susvisées, le cadre dirigeant devra être considéré comme soumis à la durée légale du travail, soit 35 heures hebdomadaires.
Il pourra donc obtenir le paiement des heures supplémentaires s’il en a effectué bien évidemment (ce qui est très souvent le cas).
A cet égard, aux termes de l’article L. 3171-4 du code du travail : « En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable. »
Au visa de l’article L. 3171-4 du code du travail, la Cour de cassation rappelle qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.
Dans un arrêt du 24 novembre 2010 (09-40928), la Cour de cassation a considéré qu’un décompte d’heure manuscrit établi au crayon peut permettre d’établir la preuve d’heures supplémentaires.
Le salarié peut établir la preuve des ses heures supplémentaires par tout autre moyen : email, ticket de taxis, etc.
En conclusion,
. Conclusion 1 : les salariés cadres dirigeants doivent s’assurer qu’ils participent bien à la Direction de l’Entreprise ; à défaut, ils peuvent obtenir le paiement des heures travaillées au-delà de 35 heures (donc des heures supplémentaires). La prescription est de 5 ans à compter de la saisine des prud’hommes.
. Conclusion 2 : les entreprises doivent s’assurer qu’ils ont accordé ce statut de cadre dirigeant à de « vrais » cadres dirigeants qui participent à la Direction de l’Entreprise.
Les entreprises ont intérêt à conclure un forfait jours avec les cadres qui ne participent pas à la Direction de l’Entreprise, faute de quoi ils s’exposent à des demandes de paiement d’heures supplémentaires.