Le Ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer (MEEDM) semble enfin avoir pris la mesure des doutes et incertitudes juridiques soulevés par l’entrée en vigueur de l’arrêté du 12 janvier 2010 qui fixe les nouvelles conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil.
Plus que l’arrêté en lui-même, c’est le communiqué de presse en date du 13 janvier 2010, introduisant un caractère rétroactif à l’application du nouveau tarif d’achat d’électricité, qui a plongé la filière photovoltaïque dans son ensemble dans l’expectative et le doute. Ce communiqué avait pour but de mettre en exergue la volonté du MEEDM de lutter contre l’éclosion d’une bulle spéculative.
Par un communiqué du 17 février 2010, le MEEDM lève donc le doute et fixe clairement sa position relativement aux projets pouvant bénéficier des anciens tarifs (2006) d’achat d’électricité pour la période comprise entre le 1er novembre 2009 et le 14 janvier 2010.
Cependant, le MEEDM a pris le parti de faire clairement une distinction entre les projets, en fonction de leur puissance crête, dans le but avoué de garantir l’application des anciens tarifs d’achat d’électricité pour les projets photovoltaïques de faible et moyenne puissance, et ceci notamment afin de satisfaire les revendications des agriculteurs.
Afin de justifier cette distinction, il met l’accent sur la bonne foi des agriculteurs.
Cela signifie-t-il que les agriculteurs sont présumés être plus de bonne foi que quiconque, ou bien est-ce simplement une volonté politique à l’approche des élections régionales ?
Il n’en demeure pas moins vrai que tous les investisseurs ou producteurs ayant conduit un maximum de projets en fin d’année 2009, afin d’obtenir l’application des conditions d’achat d’électricité de l’arrêté du 10 juillet 2006, sont aussi légitimes que les agriculteurs.
Le MEEDM ne peut légitimement reporter ses erreurs de communication, et son retard dans l’élaboration du nouvel arrêté, sur les producteurs.
En effet, c’est lui qui a publié le 9 septembre 2009 un projet d’arrêté annonçant la baisse des tarifs d’achat, c’est également lui qui a tardé à publier ledit arrêté. Dès lors, il ne peut aujourd’hui chercher à sanctionner des projets construits de bonne foi en application de la législation applicable à l’époque, pour corriger les dégâts de l’effet d’aubaine qu’il a lui-même favorisé à créer.
Après le temps des doutes et des incertitudes pour les producteurs, le MEEDM risque fort de se trouver rapidement confronté à une hausse des recours contentieux ; ces derniers seront proportionnels à la hausse des demandes de raccordement et des contrats d’achat sur la période comprise entre le 1er novembre 2009 et le 14 janvier 2010, qui seront rendus infructueux de par la nouvelle ligne directrice fixée par le communiqué de presse du 17 février 2010.
Le MEEDM et l’ensemble des services impliqués dans le circuit des demandes de raccordement devront vraisemblablement surmonter trois types de recours contentieux :
Recours contre l’arrêté du 12 janvier 2010, et éventuellement contre les futurs arrêtés ;
Recours contre les décisions de refus de raccordement, ou refus d’octroi d’un contrat d’achat ;
Refus contre les décisions des services instructeurs relativement aux demandes d’urbanisme.
En outre, tous les projets d’installation de centrales photovoltaïques ont nécessité des dépenses et investissements relatifs à la recherche et développement, ainsi qu’à la mise en œuvre technique et financière ; ils représentent un coût important pour les producteurs, lesquels pourront, à l’appui de leurs recours, demander une indemnisation de leur préjudice au titre de la perte de chance.
Pour le futur, il appartient aux producteurs d’installations photovoltaïques de réfléchir aux modalités à mettre en œuvre afin d’adapter leur stratégie et leur développement économique aux nouvelles règles établies par le MEEDM.
En effet, le but n’est pas d’attendre la fin des recours contentieux, qui n’ont pas d’effet suspensif, mais de rebondir : les producteurs doivent adapter leur stratégie et leurs offres afin de garantir le développement de la filière photovoltaïque au regard des objectifs ambitieux fixés par la France dans le cadre de la lutte contre les gaz à effet de serre.
William AZAN
Avocat Associé
Ludovic FONTAINE
Avocat
AZAN Avocats Associés
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