Extradition entre la France et le Canada : quelles sont les règles applicables ?

Par Avi Bitton et Lois Pamela Lesot, Avocats.

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Explorer : # extradition # conditions d'extradition # motifs de refus # procédure d'extradition

Le Canada et la France ont signé un traité d’extradition [1], qui fixe les règles applicables sur :

  • les conditions d’extradition : faits donnant lieu à extradition, personnes pouvant être extradées,
  • les motifs de refus d’extradition,
  • la procédure d’extradition.
-

Le traité d’extradition entre la France et le Canada du 17 novembre 1988 encadre et simplifie les procédures d’extradition entre ces deux pays.

Ce traité prime sur le Code de procédure pénale relatives à l’extradition [2], lequel s’applique de façon supplétive, lorsque les conventions internationales signées par la France ne règlementent pas certains points.

I. Les conditions d’extradition.

L’extradition entre la France et le Canada est possible pour toute personne poursuivie pour une infraction ou recherchée aux fins d’imposition ou d’exécution d’une peine.

a. Les faits donnant lieu à l’extradition.

L’extradition peut être accordée lorsque :

  • les faits pour lesquels la personne est réclamée sont punis d’une peine privative de liberté d’au moins 2 ans (selon les lois des deux Etats) ;
  • la peine prononcée et restant à exécuter est d’au moins 6 mois.

b. Les personnes pouvant être extradées : le cas des nationaux.

La France et le Canada ne sont pas tenus d’extrader leurs nationaux.

La nationalité s’apprécie au jour de l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée.

Dans le cas où l’extradition est refusée sur le seul fondement que la personne réclamée a la nationalité de l’Etat requis, cet Etat doit, sur demande de l’Etat requérant, soumettre l’affaire à ses autorités judiciaires.

II. Les motifs de refus d’extradition.

a. Les motifs obligatoires de refus d’extradition.

L’extradition ne peut pas être accordée lorsque :

  • L’infraction pour laquelle elle est demandée est considérée comme une infraction politique (ou comme un fait connexe à une telle infraction) ;
  • L’Etat requis a des raisons sérieuses de croire que la demande d’extradition a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir une personne pour des considérations de race, de religion, de nationalité, d’opinions politiques ou que sa situation risque d’être aggravée pour l’une de ces raisons ;
  • L’infraction consiste uniquement dans la violation d’obligations militaires ;
  • La personne réclamée a fait l’objet d’un jugement définitif de condamnation ou d’acquittement dans l’Etat requis pour l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée ;
  • La prescription de l’action ou de la peine est acquise.

b. Les motifs facultatifs de refus d’extradition.

L’extradition peut être refusée lorsque :

  • L’Etat requis poursuit la personne réclamée pour l’infraction en cause ou l’Etat requis a décidé de ne pas exercer de poursuites ou de mettre fin à celles qu’elles ont engagées ;
  • La personne a fait l’objet d’un jugement définitif de condamnation ou d’acquittement dans un Etat tiers pour l’infraction pour laquelle l’extradition est demandée ;
  • L’infraction est une infraction fiscale (en matière d’impôts, de taxes, de douane ou de change).

L’extradition peut également être refusée si l’infraction pour laquelle la personne est réclamée a été commise dans un lieu soumis à la compétence juridictionnelle de l’Etat requis (notamment, sur son territoire).

Enfin, l’extradition peut être refusée pour des considérations humanitaires, si la remise est susceptible d’avoir pour la personne des conséquences d’une gravité exceptionnelle, notamment en raison de son âge ou de son état de santé.

III. La procédure d’extradition.

La demande d’extradition doit être formulée par écrit, par la voie diplomatique. Une liste des pièces à produire à l’appui de la demande d’extradition est spécifiée dans le Traité et ces documents doivent être authentifiés.

Lorsque l’Etat requis considère qu’il n’a pas suffisamment d’éléments pour prendre sa décision, il peut demander un complément d’information, dans un délai imparti.

L’arrestation provisoire de la personne est possible en cas d’urgence, selon des conditions précises.

Lorsque l’extradition d’une même personne est demandée par plusieurs Etats, l’Etat requis détermine vers lequel de ces Etats l’extradition doit être effectuée, en prenant compte de toutes circonstances, comme la gravité des infractions, leurs date et lieu, la nationalité de la personne réclamée et son lieu de résidence habituel.

Une fois la décision sur l’extradition prise, l’Etat requis doit informer l’Etat requérant :

  • En cas de rejet, la décision doit être motivée ;
  • En cas d’acceptation, l’Etat requérant doit être informé de la date et du lieu de la remise, ainsi que de la durée de la détention subie par la personne jusqu’alors.

En vertu de la règle de la spécialité, la personne qui aura été remise ne sera ni poursuivie, ni jugée, ni détenue en vue de l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté, ni soumise à toute restriction de sa liberté individuelle, pour un fait quelconque antérieur à la remise, autre que celui ayant motivé l’extradition, sauf dans les cas suivants :

  • Lorsque l’État qui l’a remise y consent ;
  • Lorsqu’ayant eu la possibilité de le faire, la personne extradée n’a pas quitté dans les 60 jours qui suivent son élargissement définitif le territoire de l’État auquel elle a été remise ou si elle y est retournée après l’avoir quitté.

Avi Bitton, Avocat au Barreau de Paris
Ancien Membre du Conseil de l’Ordre
Site : https://www.avibitton.com

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Notes de l'article:

[2Articles 696 et suiv. du Code de procédure pénale.

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