Il existe des conséquences sur le financement de la dépollution des sites et sur la constitution de garanties financières : les installations concernées par les obligations de la directive IED et celles par la production des garanties financières sont identiques pour de nombreuses rubriques de la nomenclature.
La question de l’articulation entre l’établissement du rapport de base et la constitution des garanties financières va donc se poser aux exploitants, car la directive prévoit que si des écarts existent entre le rapport de base et la situation environnementale du site lors de la cessation d’activité, alors l’exploitant doit prendre les mesures nécessaires pour remettre son site dans le même état que celui existant au moment de l’établissement du rapport de base afin de remédier à cette pollution.
1. Introduction
La directive du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles (directive IED) vise à réduire la pollution de l’air, de l’eau et du sol provenant des installations industrielles. Cette directive modifie et intègre la directive dite IPPC [1] et six autres directives sectorielles. Elle réglemente les émissions de plusieurs polluants, dont les composés soufrés et azotés, les particules de poussière, l’amiante et les métaux lourds. Ses spécificités par rapport à la législation existante touchent à la fois le recours aux meilleures techniques disponibles (MTD), le réexamen périodique des autorisations, la réalisation d’un rapport de base, la remise en état du site en fin d’activité, et la participation du public.
L’ordonnance du 5 janvier 2012 est venue transposer le chapitre II de la directive IED et a été suivie par la publication de plusieurs textes d’application dont l’arrêté du 2 mai 2013 relatif aux définitions, liste et critères de la directive IED. Il fixe la liste des substances polluantes concernées et établit les critères nécessaires à la détermination des MTD. Le MEDDE a par ailleurs publié au mois de mai 2014 une guide méthodologique pour l’élaboration du rapport de base prévu par la directive IED. Ce premier guide, à destination des exploitants, propose une procédure et des modalités d’élaboration du rapport de base assurant la mise en adéquation des bonnes pratiques en vigueur avec l’objectif de la Directive IED. Pour les secteurs dont les activités sont très spécifiques (traitement des déchets, installations d’élevage…), des dispositions spécifiques seront annexées au guide pour répondre à la spécificité du secteur.
Ce guide pourra être revu en fonction des remarques et recommandations émises par la Commission Européenne dans ses orientations concernant les rapports de base prévus à l’article 22, paragraphe 2, de la directive 2010/75/UE relative aux émissions industrielles [2].
Alors que le 21 mai 2014, une Communication de la Commission européenne n°2014/C 153/03 annonce le retrait de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil définissant un cadre pour la protection des sols et modifiant la directive 2004/35/CE, avec ces nouvelles dispositions françaises, le droit de l’environnement et notamment le droit des sols pollués, de la remise en état connaissent une évolution notable :
• Il est imposé à l’exploitant de certaines Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) d’établir un rapport de base relatif aux conditions de remise en état du site après cessation d’activité (2).
• Le dispositif de garanties financières est étendu à certaines installations susceptibles d’être à l’origine de pollutions des sols et des eaux et dont l’activité induit un risque de contamination du sol et des eaux souterraines (3).
• Si l’installation est à l’origine d’une pollution significative du sol et des eaux souterraines, l’exploitant doit prendre les mesures nécessaires pour remettre le site dans un état au moins similaire à celui décrit dans le rapport de base, en tenant compte de la faisabilité technique des mesures (4).
2. Le rapport de base et les installations concernées
La directive IED impose à certains exploitants d’ICPE d’établir un rapport de base relatif aux conditions de remise en état du site après cessation de l’exploitation. L’exploitant a donc tout intérêt à produire un rapport de base de qualité compte tenu des obligations de réhabilitation qui pourront être requises à la cessation d’activité. Le rapport de base doit être suffisamment étayé, complet et pertinent sur ses modalités de réalisation.
La Commission européenne indique que le processus d’établissement du rapport de base implique qu’un certain nombre de tâches essentielles doivent être effectuées à la fois pour déterminer s’il est nécessaire d’établir un rapport de base dans une situation donnée et pour produire le rapport de base proprement dit. Huit étapes ont été dénombrées dans ce processus, correspondant aux principaux éléments suivants :
• Étapes 1 à 3 : déterminer si un rapport de base doit être établi ;
• Étapes 4 à 7 : déterminer comment un rapport de base doit être établi ;
• Étape 8 : déterminer le contenu du rapport.
La directive introduit un chapitre concernant l’état de pollution des sols et des eaux souterraines à prendre en compte lors de la cessation d’activité d’un site industriel et qui instaure soit de rendre le site dans un état comparable à l’état décrit dans le rapport de base, soit de rendre le site dans un état permettant l’exercice des usages actuels et futurs, que le site soit soumis ou non à l’élaboration de ce rapport de base. Le 3° du paragraphe I de l’article R. 515-59 du code de l’environnement définit les deux conditions qui, lorsqu’elles sont réunies, conduisent à l’obligation pour l’exploitant de soumettre un rapport de base. Un rapport de base est dû lorsque l’activité implique :
• L’utilisation, la production ou le rejet de substances dangereuses pertinentes ;
• Un risque de contamination du sol et des eaux souterraines sur le site de l’exploitation.
Ces deux conditions cumulées impliquent l’élaboration d’un rapport de base. A partir de l’étude de ces critères, l’exploitant doit :
• Soit élaborer le rapport de base selon la méthodologie proposée ;
On l’a vu, deux critères sont retenus pour exiger la production d’un rapport de base (2.1). Par ailleurs, le contenu du rapport est la référence pour les mesures de remise en état en fin d’exploitation (2.2).
• Soit justifier du fait que l’installation IED n’est pas redevable d’un rapport de base, en démontrant la non éligibilité aux critères donnés supra. L’exploitant expose alors son analyse dans un mémoire justificatif qu’il transmet à l’inspection des installations classées (2.3).
2.1 Les critères imposant la production du rapport de base
Le premier critère est l’expression « substances dangereuses pertinentes » qui désigne les substances ou les mélanges définis à l’article 3 du règlement relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges (règlement CLP) qui, en raison de leur dangerosité, de leur mobilité, de leur persistance et de leur biodégradabilité (ainsi que d’autres caractéristiques), sont susceptibles de contaminer le sol ou les eaux souterraines, et qui sont utilisés, produits et/ou rejetés par l’installation.
Les substances et mélanges dangereux pertinents sont à prendre en compte dans l’élaboration du rapport de base s’ils sont actuellement utilisés, produits ou rejetés dans l’exploitation i.e. pris en charge à l’intérieur de l’installation (que ce soit sous la forme de matières premières, de produits, de produits intermédiaires, de sous-produits, d’émissions ou de déchets) ou si la demande d’autorisation d’exploiter déposée prévoit leurs utilisations, productions ou rejets futurs par l’installation.
Il est donc fortement conseillé à l’exploitant de comparer la liste exhaustive des substances dangereuses utilisées, produites ou rejetées lors de l’exploitation avec les critères relatifs aux dangers physiques, pour la santé ou pour l’environnement, tel qu’énoncés dans l’annexe I, partie 2 à 5 du règlement CLP.
Le deuxième critère est applicable si l’activité induit un risque de contamination du sol et des eaux souterraines. Ce risque dépend de deux règles :
• Une règle d’exclusion : toute substance gazeuse à température ambiante et ne se transformant pas en solide ou liquide lors d’un « relargage » accidentel ainsi que les substances solides non solubles dans l’eau et non pulvérulentes ne sont pas considérées comme susceptibles de générer un risque de contamination du sol et des eaux souterraines, et n’impliquent donc pas à elles seules la rédaction d’un rapport de base.
• Une règle d’inclusion : toute substance définie comme prioritaire dans le domaine de l’eau et/ou faisant l’objet d’une norme de qualité environnementale au titre de la loi sur l’eau est considérée comme susceptible de représenter un risque de contamination du sol et des eaux souterraines et impose à ce titre la réalisation d’un rapport de base.
Pour les autres substances, il faut prendre en compte plusieurs aspects importants. Premièrement, il convient d’examiner les propriétés chimiques et physiques telles que la composition, l’état physique (solide, liquide, gazeux), la solubilité, la toxicité, la mobilité, la persistance, etc. autant d’informations pour déterminer si une substance est susceptible d’entraîner une pollution du sol et des eaux souterraines.
Deuxièmement, il doit aussi être tenu compte de la quantité de substances dangereuses concernées. Si la quantité utilisée, produite ou rejetée sur le site de l’installation est très faible, le risque de contamination sera vraisemblablement négligeable aux fins de l’établissement d’un rapport de base. Mais, toutes les circonstances dans lesquelles des émissions peuvent se produire doivent être analysées : les accidents/incidents, les opérations de routine [3], les émissions prévues dans l’air, dans l’eau, etc.
En troisième lieu, il convient de réaliser un historique. Cette étape a pour but de déterminer quelles sont, parmi les substances dangereuses pertinentes recensées, celles qui sont susceptibles d’être déjà présentes sur le site, dans le sol et les eaux souterraines, du fait des activités menées jusque-là, et de déterminer si elles coïncident avec de futurs points d’émission potentiels. L’historique du site doit porter à la fois sur l’histoire du site avant le développement de l’installation actuelle/projetée, et sur les antécédents d’exploitation de l’installation.
En quatrième lieu, le rapport de base doit tenir compte des caractéristiques du sol et des eaux souterraines au droit du site, ainsi que de l’influence de ces caractéristiques sur le risque de contamination du sol et des eaux souterraines. Ainsi, les données suivantes seront recueillies lors de l’étude des caractéristiques du site : topographie, géologie et hydrogéologie bien entendu, hydrologie, mais aussi les voies de migration anthropiques (corridors de services, conduites d’évacuation, mines, etc.) ou encore l’utilisation des terrains environnants et les interdépendances.
Enfin, dans le cas d’installations existantes, il y a lieu de tenir compte des caractéristiques de ces installations lorsqu’elles rendent possible une contamination du sol et des eaux souterraines sur le périmètre IED. Des modèles conceptuels détaillés pour chaque zone de l’installation à prendre en considération sont à créer, par exemple, un modèle conceptuel de la zone autour d’un réservoir.
Concernant ce périmètre IED, on rappelle qu’il correspond à l’ensemble des zones géographiques du site accueillant les installations relevant des rubriques 3000 à 3999 de la nomenclature ICPE, ainsi que leur périmètre d’influence en matière de pollution des sols et des eaux souterraines et les installations ou équipements s’y rapportant directement, exploités sur le même site, liés techniquement à ces installations et susceptibles d’avoir des incidences sur les émissions et la pollution.
Si les informations obtenues aux étapes précédentes paraissent insuffisantes pour caractériser le site tant horizontalement que verticalement et pour déterminer la situation de référence en termes de niveaux quantifiés de pollution du sol et des eaux souterraines par les substances dangereuses pertinentes à définir, la meilleure chose à faire est une inspection du site avec une stratégie d’échantillonnage des sols et des eaux souterraines – échantillonnage cible et/ou échantillonnage non ciblé – et un panel d’analyses adaptées en se rappelant qu’il est essentiel de veiller à ce que les méthodes d’analyse utilisées soient décrites de manière adéquate afin que ces informations puissent servir dans les futures analyses, conformément aux exigences de la directive IED.
In fine, Lorsqu’il est évident que les substances dangereuses utilisées, produites ou rejetées dans l’installation ne peuvent en aucun cas contaminer le sol et les eaux souterraines, il n’est pas nécessaire d’établir un rapport de base, mais il faudra faire un mémoire justificatif pour montrer qu’il n’est pas nécessaire de faire un rapport de base (cf. chapitre 2.3). Dans le cas contraire, il convient de faire le rapport de base.
2.2 Le contenu du rapport de base
L’exploitant établit et soumet un rapport de base avant la mise en service de l’installation ou avant la première actualisation de l’autorisation délivrée à l’installation. Ce rapport de base doit contenir des informations permettant de comparer le niveau de pollution du site au moment de la cessation d’activité avec l’état initial. Il comprend les chapitres suivants :
• Chapitre 1 : description du site et de son environnement et évaluation des enjeux ;
• Chapitre 2 : recherche, compilation et évaluation des données disponibles ;
Il doit également comprendre, lorsque les données disponibles ne permettent pas de disposer d’une connaissance suffisante de l’état de pollution des sols et des eaux souterraines, les chapitres suivants :
• Chapitre 3 : définition du programme et des modalités d’investigations ;
• Chapitre 4 : réalisation du programme d’investigations et d’analyses au laboratoire ;
• Chapitre 5 : interprétation des résultats et discussion des incertitudes.
Lors de la cessation définitive des activités, l’exploitant évalue le niveau de contamination du sol et des eaux souterraines. Si l’installation est responsable d’une pollution significative [4] du sol ou des eaux souterraines par rapport à l’état constaté dans le rapport de base, l’exploitant prend les mesures nécessaires afin de remédier à cette pollution de manière à remettre le site dans son état initial. Si l’exploitation n’est pas soumise à rapport de base, et que, lors de la cessation définitive des activités, la contamination du sol ou des eaux souterraines sur le site présente un risque important pour la santé humaine ou pour l’environnement, l’exploitant prend aussi les mesures nécessaires visant à éliminer, maîtriser, confiner ou réduire les pollutions, de sorte que le site, compte tenu de son utilisation actuelle ou de l’utilisation qu’il a été convenu de lui donner à l’avenir, cesse de représenter un risque.
On constate donc que l’exploitant doit anticiper les conditions de remise en état du site à la fin de l’exploitation dans des proportions qui vont maintenant bien au-delà des dispositions qui étaient jusqu’alors en vigueur en droit des sols pollués. Le rapport de base est une photographie de l’état de pollution des sols et des eaux souterraines du site d’exploitation avant son implantation et le démarrage des activités. Pour les sites existants, il s’agit d’une photographie à un moment « t ». Dans les deux cas, cet état des lieux servira de référentiel qualitatif sur les sols et les eaux souterraines lors de la cessation d’activité définitive pour évaluer l’impact du site sur son environnement et les modalités de remise en état si nécessaire. Le contenu du rapport de base n’est donc pas destiné à être réactualisé, si aucune nouvelle substance dangereuse pertinente n’est utilisée ou s’il n’y a pas de modification du périmètre IED.
Par ailleurs, il est prévu que les pollutions par des substances dangereuses avérées et identifiées à la fin de l’exploitation, même si elles sont liées à une activité autorisée, devront faire l’objet de mesure de remise en état afin de permettre l’usage futur du site. Toutefois, la mesure de remise en état en cas de changement d’usage n’incombe pas à l’exploitant. Si l’usage futur du site est orienté en dehors d’une activité industrielle, l’exploitant devra supporter les frais de remise en état pour un usage industriel maintenu. On peut donc penser que, lors des demandes d’autorisation nouvelles ou lors des renouvellements ou changements notables, si des écarts sont identifiés entre le rapport de base initial et la situation environnementale du site, l’administration pourra, en se fondant sur les dispositions de la directive IED et du Code de l’Environnement, exiger la production de garanties financières comme mode de financement des mesures nécessaires visant à limiter, réduire ou supprimer les risques de pollution identifiés.
2.3 Le contenu du mémoire justificatif
Lorsqu’un exploitant d’une installation IED estime qu’il n’est pas soumis au rapport de base, il doit transmettre à l’administration un mémoire justificatif qui démontre que son installation n’est pas soumise à rapport de base. Le mémoire justificatif doit comprendre les éléments suivants :
• Une description de la ou des installations relevant des rubriques 3000 à 3999 de la nomenclature ICPE ;
• La liste des substances dangereuses pertinentes avec leurs flux massiques (ou volumiques) annuels, et leurs caractéristiques de dangerosité ;
• Une cartographie des sources de pollution potentielles : zones de stockage, utilisation, circulation, transfert des substances dangereuses potentiellement polluantes.
Ces éléments sont alors comparés aux deux critères énoncés supra. Les raisons qui conduisent l’exploitant à ne pas proposer un rapport de base doivent être explicitées et transmises selon les mêmes modalités qu’un rapport de base.
3. Le financement du coût de la remise en état : les garanties financières
Le financement de la dépollution des sites après cessation d’activité et hors cas de pollution historique a vu son dispositif législatif et réglementaire renforcé. La loi du 16 juillet 1976 modifiée relative aux ICPE avait introduit l’obligation de garanties financières pour la mise en activité de certaines installations classées. Le décret du 3 mai 2012 relatif à l’obligation de constituer des garanties financières en vue de la mise en sécurité de certaines ICPE est venu compléter le dispositif réglementaire en étendant l’obligation de produire des garanties financières, à certaines installations soumises à autorisation et aux installations de transit, regroupement, tri ou traitement des déchets soumises à autorisation simplifiée susceptibles d’être à l’origine de pollutions importantes des sols et des eaux souterraines. Trois arrêtés d’application fixent :
• Les modalités de détermination et d’actualisation du montant des garanties financières (Arrêté du 31 mai 2012) ;
• La liste des installations classées soumises à l’obligation de constitution de garanties financières (Arrêté du 31 mai 2012) ;
• Les modalités de constitution de garanties financières (Arrêté du 31 juillet 2012).
S’agissant du droit transitoire, la mise en œuvre des nouvelles mesures dépend des catégories d’installations et de la qualification d’installations nouvelles ou existantes. La date d’entrée en vigueur de l’obligation de constitution des garanties financières est fixée au 1ier juillet 2012 pour un certain nombre d’entre elles, pour d’autres installations, cette date est reportée au 1er juillet 2017. Les installations existantes doivent constituer 20 % du montant initial des garanties financières dans un délai de deux ans, puis 20 % supplémentaires par an pendant quatre ans. En cas de consignation auprès de la Caisse des dépôts, la constitution supplémentaire est étalée sur huit ans, à raison de 10 % par an. Il faut toutefois noter qu’aucune garantie ne sera exigée si son montant est inférieur à 75 000 euros.
Par ailleurs, le décret du 3 mai 2012 mentionné supra a modifié l’article R 516-2 du Code de l’Environnement en insérant un paragraphe VI qui dispose que « le préfet peut demander, pour les installations visées au 5° de l’article R. 516-1, la constitution d’une garantie additionnelle en cas de survenance d’une pollution accidentelle significative des sols ou des eaux souterraines causée par l’exploitant postérieurement au 1ier juillet 2012 et ne pouvant faire l’objet de façon immédiate, pour cause de contraintes techniques ou financières liées à l’exploitation du site, de toutes les mesures de gestion de la pollution des sols ou des eaux souterraines ».
Cet article donne tout son sens à la question de l’articulation du régime des garanties financières et des mesures de remise en état des sols avec l’élaboration du rapport de base.
4. L’articulation des garanties financières avec le rapport de base
On constate que les exploitants soumis à la production d’un rapport de base sont couverts par les garanties financières. Dès lors, la question de l’articulation entre l’établissement du rapport de base et la constitution des garanties financières va tout d’abord se poser aux exploitants car la directive IED et le Code de l’Environnement prévoient que si des écarts existent entre le rapport de base et la situation environnementale du site lors de la cessation d’activité, l’exploitant doit prendre des mesures nécessaires afin de remédier à cette pollution de manière à remettre le site en état pour un usage industriel maintenu, sauf spécifications contraires dans l’arrêté d’exploitation.
Par ailleurs, le décret du 2 janvier 2013 a complété le Code de l’Environnement selon lequel il est prévu, dans le cas du dépôt de la demande d’autorisation à la suite de modification substantielle de l’installation, la réalisation d’un état de pollution des sols. Et lorsque cet état de pollution des sols met en évidence une pollution présentant des dangers ou inconvénients pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques ou de nature à porter atteinte aux autres intérêts mentionnés à l’article L. 511-1, alors l’exploitant propose soit les mesures de nature à éviter, réduire ou compenser cette pollution et le calendrier correspondant qu’il entend mettre en œuvre pour appliquer celles-ci, soit le programme des études nécessaires à la définition de telles mesures.
Enfin l’article R 512-33 du Code de l’Environnement dispose en son paragraphe II que « toute modification apportée par l’exploitant à l’installation, à son mode d’utilisation ou à son voisinage entraînant un changement notable des éléments du dossier de demande d’autorisation doit être portée, avant sa réalisation, à la connaissance du préfet avec tous les éléments d’appréciation. S’il estime, après avis de l’inspection des installations classées, que la modification est substantielle, le préfet invite l’exploitant à déposer une nouvelle demande d’autorisation. »
On doit donc anticiper sur le plan juridique l’articulation pratique de ces différents textes les uns avec les autres qui risque d’entrainer pour l’exploitant des contraintes financières et techniques importantes. L’identification de pollutions ou risques lors de la préparation du rapport de base ou en cas de modification notable de l’exploitation doit être traitée et analysée précisément par l’exploitant.
L’élaboration du rapport de base pourra être à l’origine de l’identification d’une pollution potentielle non encore avérée. Nonobstant les règles applicables en matière de sols pollués, l’exploitant sera dans l’obligation de présenter les mesures de remise en état nécessaires dans le cadre des règles fixées pour l’élaboration du rapport de base. Dans ce cas, le préfet pourra demander la mise en place de garanties financières additionnelles pour couvrir les frais et coûts de remis en état des sols sur la base de l’article R 516-2 du Code de l’Environnement. Les conditions de mise en place de ces garanties financières additionnelles doivent faire l’objet d’un arrêté ministériel qui est en cours de préparation. Ce projet de texte devrait prévoir les mesures de gestion à mettre en œuvre en cas de survenance d’une pollution accidentelle significative des sols ou des eaux souterraines pour permettre le retour à l’état initial ou à un état s’en rapprochant. Il devrait avoir pour but d’identifier les mesures de gestion des sols et des eaux souterraines dont la mise en œuvre ne sera possible qu’à la mise à l’arrêt définitif des installations et qui doivent faire l’objet d’une évaluation financière pour la constitution d’une garantie financière additionnelle.
En cas de modification substantielle de l’installation dans les conditions prévues à l’article R 512-33 du Code de l’Environnement l’exploitant aura à déposer une demande d’autorisation complémentaire auprès du préfet. Ce dossier comprendra des éléments d’études de sols qui pourront mettre en lumière des risques ou pollutions avérées qui généreront alors une obligation de remise en état du site afin de répondre aux intérêts mentionnés par l’article L 511-1 du Code de l’Environnement. Par ailleurs, le préfet pourra considérer que les évènements identifiés justifient la mise en place de garanties financières notamment sur la base de l’article R 516-2 du Code de l’Environnement.
On comprend que l’exploitant pourra en raison du même évènement (l’identification d’une pollution lors de l’établissement d’un rapport de base et à l’occasion d’un changement notable), être confronté à la mise en place simultanée du rapport de base, d’un dossier d’autorisation et de garanties financières additionnelles.
5. Conclusion
Il y a lieu de recommander aux exploitants d’anticiper les conditions de remise en état de leur site à la fin de l’exploitation dans des proportions qui vont maintenant bien au-delà des dispositions qui étaient jusqu’alors en vigueur en droit des sols pollués. L’exploitant doit proposer des mesures de remise en état en tenant compte de l’impact de son activité sur l’état environnemental du site et ce, en comparant la situation en fin d’exploitation avec le rapport de base. Par ailleurs, il est prévu que les pollutions par des substances dangereuses avérées et identifiées à la fin de l’exploitation, même si elles sont liées à une activité autorisée, devront faire l’objet de mesures de remise en état afin de permettre l’usage futur du site.
Il y a lieu de s’interroger sur l’impact que peut avoir la rédaction de ce rapport de base sur le financement et la responsabilité des remises en état. En effet, les garanties financières visent à couvrir les cas de pollutions accidentelles et de défaillances de certains exploitants. L’identification de pollutions à risque ou avérées lors de la réalisation du rapport de base pourrait « justifier » de la part de l’administration la production par l’exploitant de garanties financières couvrant non plus les risques accidentels ou de défaillances mais également la pollution « certaine » et « autorisée » à tout le moins sur le plan juridique et réglementaire.
L’on peut penser que, lors des demandes d’autorisation nouvelles ou lors des renouvellements ou changements notables, si des écarts sont identifiés entre le rapport de base initial et la situation environnementale du site, l’administration pourra, en se fondant sur les dispositions de la directive IED et du Code de l’Environnement, exiger la production de garanties financières comme mode de financement des mesures nécessaires visant à limiter, réduire ou supprimer les risques de pollution identifiés.