Dans ce sens, la loi française du 23 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires (n° 2013-672) a musclé l’Autorité des Marchés Financiers (« AMF ») quant à ses pouvoirs de sanction. Ce texte pose comme objectif de séparer les activités purement spéculatives de celles qui sont utiles à l’économie ou utiles à l’investissement et à l’emploi dans une sorte de Glass Steagall Act à la française.
Le texte de la loi française semble indiquer que les marchés financiers n’ont plus pour fonction exclusive de financer les entreprises et que leurs dysfonctionnements exige de légiférer en séparant les activités « utiles à l’économie » de celles qui ne le sont pas, qualifiées de « spéculatives ». La mort de la convergence d’intérêt entre l’investissement en bourse et le financement des entreprises apparaît consacré par une loi pour ces dernières.
De manière moins visible, le champ d’intervention de l’AMF a été également élargi aux sociétés non cotées et aux collectivités publiques notamment car elle peut dorénavant sanctionner tout acteur économique qui conclut des opérations sur dérivés au-delà de certains seuils.
Ainsi l’AMF voit ses pouvoirs élargis sur un double front dont on pourrait se satisfaire à une réserve près.
L’AMF est, en droit français, une autorité administrative indépendante au même titre que le CSA, l’ARCEP ou le Conseil de la Concurrence par exemple. Or le statut complexe de ces autorités qui sont des quasi juridictions leur impose de trouver le juste équilibre entre leur rôle de régulateur, leurs pouvoirs de sanctions notamment répressifs et leurs pouvoirs juridictionnels. Ce fragile équilibre a conduit à des recours fondés sur l’article 6.1 de le Convention Européenne des Droits de l’Homme qui ont donné lieu à des arrêts de la Cour de cassation et du Conseil d’Etat imposant des modifications substantielles pour leurs attributions répressives et juridictionnelles [1].
Récemment, le 5 juillet 2013, l’ARCEP (Autorité de Régulation des Communications Electroniques et de la Poste) a vu ses pouvoirs de sanction (inscrits à l’article 36-11 du code des postes et des communications électroniques) annulés par la Cour de Cassation compte tenu du caractère anticonstitutionnel du texte sur les mêmes fondements.
Reste donc à voir comment l’AMF va utiliser au mieux ces nouveaux pouvoirs notamment vis-à-vis d’acteurs, les sociétés non cotées ou les collectivités publiques, dont elle n’avait jamais eu vocation à traiter les comportements jusqu’ici.
La question se pose donc de savoir si la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme ou des juridictions suprêmes françaises relative à l’encadrement des pouvoirs répressifs des autorités administratives indépendantes peut éventuellement changer à l’aune de l’utilisation de ses nouveaux pouvoirs par l’AMF.
La même question risque de se poser vraisemblablement à chaque fois que les pouvoirs des autorités administratives indépendantes seront étendus hors de leur périmètre naturel d’origine.