Le mécanisme des livraisons intracommunautaires institue pour l’entreprise qui livre une autre entreprise de la Communauté une exonération de sa TVA sur ventes.
Une autre disposition permet également, dans certains cas, une exonération de la TVA sur les importations qui sont suivies d’une exportation dans un autre État membre.
Outre leur rôle simplificateur, ces dispositifs permettent à l’entreprise de ne pas se trouver confrontée à des problèmes de trésorerie, lorsque sa demande de remboursement de TVA tarde, ou pire encore, lorsque l’exonération de la TVA sur ses exportations est écartée par l’administration.
Pour que cette exonération de TVA intracommunautaire ne soit pas remise en cause, encore faut-il que l’entreprise ait démontré la réalité de l’opération.
En la matière, l’administration fiscale énumère, de manière non exhaustive, les modes de preuve de l’expédition ou du transport hors de France et précise que la valeur de ces justificatifs sera appréciée au cas par cas.
Selon ses termes, une telle preuve peut être apportée par tout moyen : document de transport, facture du transporteur, correspondances commerciales, confirmation écrite par l’acquéreur de la réception des biens dans un autre État membre, etc.
Cette liste ne concourt malheureusement pas à la sécurité à laquelle les entreprises aspirent dans la réalisation de leur activité économique et à la confiance légitime qu’elles revendiquent dans leurs relations avec l’administration.
C’est dans ce contexte qu’est intervenue la décision de la Cour de Cassation du 10 février 2015 [1].
La Cour rappelle que l’assujetti est présumé avoir effectué une livraison intracommunautaire exonérée lorsqu’il dispose de justificatifs de l’expédition de biens à destination d’un autre État membre ainsi que du numéro d’identification à la TVA de son acquéreur.
La Cour rappelle à cette occasion l’importance de l’étude par le juge des justificatifs lorsque ce dernier est amené à se prononcer sur la réalité des livraisons intracommunautaires en litige.
Point d’importance, la Cour confirme qu’il n’est pas nécessaire que les lettres de voiture comportent la signature de celui qui reçoit les marchandises dans un autre État membre, considérant que les visas de l’expéditeur et du transporteur sont suffisants pour apporter la preuve que les marchandises ont bien été expédiées hors de France.
Cela étant, il ne s’agit que d’une présomption qui peut donc éventuellement être renversée par l’administration, à charge pour cette dernière d’établir que « la livraison n’a pas eu lieu ».
Il convient, à ce stade, de rappeler que dans les procédures dites contradictoires, la charge de la preuve du bien fondé de ses rectifications incombe toujours à l’Administration.
Néanmoins, en présence d’une mesure particulière telle une exonération, le contribuable doit de son côté prouver qu’il était bien fondé à se prévaloir de cette mesure.
L’intérêt de cette décision est de déplacer clairement la charge de la preuve : à partir du moment où le contribuable remplit les deux conditions rappelées ci-dessus, il est présumé avoir effectué la livraison lui permettant de bénéficier de l’exonération de TVA et l’Administration ne pourra remettre en cause cette exonération qu’à la condition de démontrer que la livraison n’a pas eu lieu.