CE 4 mai 2016, ADILE de Vendée req.n° 396590
Cet arrêt est intéressant à plusieurs titres dès lors que le Conseil d’État profite de l’occasion pour confirmer, clarifier et compléter sa jurisprudence sur un certain nombre de points en matière de référé précontractuel.
Règle n°1 : le contrôle du juge du référé précontractuel sur la capacité juridique d’une personne morale de droit privé à exécuter les prestations d’un marché public
Il n’appartient pas au juge du référé précontractuel, lorsqu’une personne morale de droit privé se porte candidate à l’attribution d’un contrat de commande publique, de vérifier que l’exécution de ce contrat entre dans le champ de son objet social. Il en va toutefois différemment dans le cas où un texte législatif ou réglementaire a précisément défini son objet social et ses missions.
En l’espèce, le Conseil d’État procède à ce contrôle et considère qu’il résulte des articles L. 366-1 et R. 366-5 du Code de la construction et de l’habitation ainsi que des articles L. 232-1 et L. 232-2 du Code de l’énergie que les associations départementales d’information sur le logement (ADILE) sont compétentes pour proposer des prestations de conseil aux particuliers en matière de performance et de rénovation énergétiques de leurs logements et peuvent dès lors candidater à un marché public portant sur de telles prestations.
Règle n°2 : rappel sur les modalités de contrôle et la qualification d’offre anormalement basse
Quelle que soit la procédure de passation mise en œuvre, il incombe à un acheteur public qui constate qu’une offre paraît anormalement basse de solliciter auprès de son auteur toutes précisions et justifications de nature à expliquer le prix proposé. Si les précisions et les justifications apportées ne sont pas suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature, ainsi, à compromettre la bonne exécution du marché, il lui appartient alors de rejeter l’offre par décision motivée, sauf à porter atteinte à l’égalité entre les candidats à l’attribution du marché.
En l’espèce, le Conseil d’État considère tout d’abord que l’acheteur public a sollicité le candidat suspecté d’avoir proposé une offre anormalement basse afin qu’il fournisse toutes les précisions utiles concernant le prix des prestations proposé de sorte qu’il ne saurait qu’il ne saurait lui être reproché d’avoir méconnu l’obligation prévue à l’article 55 du Code des marchés publics de demander par écrit les précisions qui s’impose dans un tel cas.
Ensuite, le Conseil d’État considère qu’une différence de prix de 52 % ne saurait établir, à elle seule, que l’offre est anormalement basse notamment au regard des éléments communiqués par l’auteur de l’offre. A ce rythme, on en arrivera bientôt au cas où une différence de prix de 100 % ne traduira plus une offre anormalement basse si l’attributaire est relativement habile et malin dans ses justifications données : la jurisprudence du Conseil d’État devient quelque peu risible et il faudrait mieux pour la Haute Juridiction de considérer que ce moyen est désormais inopérant sauf à se ridiculiser plus encore.
Règle n°3 : rappel sur l’étendue du contrôle du juge du référé précontractuel sur les offres des candidats
Le Conseil d’État rappelle également la règle de principe selon laquelle il n’appartient pas au juge du référé précontractuel de se prononcer sur l’appréciation portée sur la valeur d’une offre ou les mérites respectifs des différentes offres. En revanche, il lui appartient lorsqu’il est saisi d’un moyen en ce sens, de vérifier que le pouvoir adjudicateur n’a pas dénaturé le contenu d’une offre en en méconnaissant ou en en altérant manifestement les termes et procédé ainsi à la sélection de l’attributaire du contrat en méconnaissance du principe fondamental d’égalité de traitement des candidats.
Règle n°4 : rappel sur la motivation des courriers de rejet
Aux termes de l’article 83 du Code des marchés publics alors en vigueur, le pouvoir adjudicateur doit communiquer à tout candidat écarté les motifs du rejet de sa candidature ou de son offre dans les quinze jours de la réception d’une demande écrite à cette fin ainsi que les caractéristiques et les avantages relatifs de l’offre retenue et le nom du l’attributaire du marché.
En l’espèce, le Conseil d’État considère s’agissant d’une procédure adaptée, que l’acheteur a respecté ces dispositions en indiquant dans le courrier de rejet le nom de l’attributaire, le prix total proposé par celui-ci ainsi que les notes obtenues par ce dernier au regard des critères fixés par le règlement de consultation.