L’arrêt de ce jour apporte des précisions importantes sur cet élément clé que représente la négociation pré-électorale (http://courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/1855_26_24180.html).
Il emboite ainsi le pas à un arrêt du Conseil d’Etat du 31 mai 2012 (http://arianeinternet.conseil-etat.fr/arianeinternet/getdoc.asp?id=194588&fonds=DCE&item=1). Celui-ci avait déjà rappelé que le juge administratif est compétent pour la contestation du protocole préélectoral alors que le juge judiciaire l’est concernant les questions touchant à la régularité des opérations électorales. De plus il ajoutait que la tenue des élections ne pouvait nécessairement avoir lieu qu’après l’intervention du juge administratif.
Les apports pratiques de la décision
La Chambre sociale vient préciser dans cet arrêt plusieurs choses importantes qui étaient jusqu’ici méconnues, en dehors du partage de compétences entre juge judiciaire et juge administratif en matière de processus électoral.
Suspension du processus électoral
Tout d’abord, lorsque le protocole préélectoral n’a pas été conclu dans les conditions de double-majorité requises par le Code du travail (articles L2314-3-1 et L2324-4-1), la saisine de l’administration (la DIRECCTE) entraîne la suspension du processus électoral. Cette conséquence implique la nullité de toute amorce d’élection avant que le juge administratif ait statué sur la question. La Chambre sociale s’aligne ici sur la position du Conseil d’Etat, alors qu’un arrêt antérieur laissait penser qu’un tel recours n’était pas suspensif (CE 29 décembre 1995, 104504).
Prorogation des mandats en cours
Ensuite, la saisine de la DIRECCTE entraîne la prorogation de plein droit des mandats en cours des élus jusqu’à l’organisation régulière du scrutin et les résultats du premier tour de celui-ci. En l’espèce, l’employeur avait organisé les élections malgré la saisine du DIRECCTE.
La participation aux négociations se limite à la présentation
Et enfin, pour la prise en compte de la majorité nécessaire à la validation du protocole préélectoral, la cour de cassation décide que pour être considérée comme "ayant participé" à la négociation, l’organisation syndicale invitée doit s’être présentée à la négociation, bien qu’elle ait décidé de se retirer par la suite. En l’espèce, deux des quatre organisations invitées avaient décidé de se retirer de la négociation.
Cette position de la Cour de cassation peut à première vue sembler sévère. C’est toutefois oublier qu’avant la loi du 20 août 2008 était exigée une condition d’unanimité pour la signature du protocole préélectoral, et non une simple majorité fusse-t-elle double.
De plus, on aurait pu prévoir un tel type de posture par un raisonnement analogique avec le droit des conventions collectives. En la matière, un accord collectif d’entreprise est valable à la majorité, du moment que tous les syndicats représentatifs ont été invités, même s’ils ne sont pas tous présents à la négociation de celui-ci. Majorité des syndicats de l’entreprise, et non des syndicats présents aux négociations.