Le cautionnement est une sûreté personnelle par laquelle une personne, nommée la caution, s’engage à l’égard d’une troisième dite le bénéficiaire du cautionnement, à payer la dette du débiteur principal dite la personne cautionnée, pour le cas où cette dernière faillirait à ses engagements.
Les suretés personnelles dont le cautionnement sont un mécanisme relativement classique du droit bancaire et de manière plus générale du droit civil.
Le législateur mais aussi la jurisprudence, sont venu précisés au fil du temps les contours exacts de l’acte de cautionnement, en imposant notamment un formalisme très particulier qui doit être respecté à peine de nullité de l’acte. De plus, la caution s’engageant au même titre que le débiteur principal doit être en mesure d’avoir l’ensemble des informations utiles à son consentement avant qu’elle ne s’engage. Elle doit également être en mesure de se substituer au débiteur en cas de défaillance de ce dernier dans le respect de ses obligations et notamment celle de rembourser la somme due au créancier.
Dans l’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 17 mai 2017, les juges du droit sont venus préciser que pour apprécier si la caution était en mesure de faire face à son obligation de rembourser en cas de défaillance du débiteur principal, il fallait s’interroger si l’acte de cautionnement au moment où celui-ci avait été consenti par la caution n’était pas disproportionné par rapport à ses capacités financières.
Dans cette affaire, le dirigeant d’une société s’était porté caution à l’égard d’une banque à hauteur de 115 000 € en juin 2012.
Suite à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire de la société débitrice, la banque avait appelé en garantie le dirigeant en sa qualité de caution. Ce denier avait contesté en arguant du fait que l’acte de caution était manifestement disproportionné par rapport à son patrimoine. A l’appui de ses arguments, il avait fourni les documents qui avaient été adressés à la banque en 2012 afin d’établir l’acte de caution.
Par son arrêt, la chambre commerciale apporte quatre précisions cruciales qui permettent de lever une part de zone d’ombre sur les conditions encadrant l’acte de cautionnement et notamment lorsque celui-ci est remis en cause :
D’une part, et cela n’est pas anodin, le caractère disproportionné du cautionnement s’apprécie au jour où celui-ci a été consenti nous dit la cour. Ce point est important, car peu importe qu’entre le jour de la signature et l’appel en garantie de la caution, celle-ci ait vu son patrimoine croitre, l’appréciation de la disproportion sera rétroactive à la date de signature. Si ce point est important, il est tout à fait logique dans la mesure où l’erreur commise par la banque doit s’apprécier au moment des faits. Cette logique rejoint la logique du droit pénal ou seules les circonstances au jour de la commission de l’infraction sont prises en compte.
La grande nouveauté réside dans le fait que la cour admet qu’au moment de la conclusion de l’acte de cautionnement, la caution ait fourni des documents relatifs à son patrimoine qui étaient antérieurs à sa situation réelle. Effectivement, il est expressivement précisé que c’est au créancier de s’enquérir du fait de savoir si ces documents sont fidèles et de demander des compléments d’informations. Nous pouvons souligner que ce point est critiquable car si la banque est seule responsable de l’analyse des documents, il n’en demeure pas moins qu’au regard d’un devoir moral et de bonne foi, la caution fournisse des documents récents et représentatifs de sa situation patrimoniale.
D’autre part, la charge de la preuve est ici quelque peu disproportionnée. En effet la caution qui conteste l’acte de cautionnement doit apporter la preuve de la disproportion. Néanmoins, elle pourra le faire sans trop de difficultés dans la mesure où les documents fournis à la banque au moment de la conclusion de l’acte suffiront. A l’inverse, la banque devra prouver qu’au jour où la caution a été appelée en garantie, elle disposait d’un patrimoine suffisant afin de faire face à ses obligations. Il peut être difficile pour une banque d’apporter ces éléments à titre de preuve notamment si elle n’est pas la banque référence de la caution. Et quand bien même, elle serait sa banque référente, il semble difficile qu’elle puisse utiliser des informations dont elle a connaissance pour sa propre défense, alors que ces informations sont protégées par le secret bancaire et que cette administration de la preuve ne respecte pas le principe d’équité.
Enfin, la cour précise que la banque aurait dû prendre en considération le fait que le dirigeant s’était déjà porté caution dans d’autres dossiers, avant de considérer que sa situation lui permettait de conclure ce nouvel acte de cautionnement.
Ainsi, les banques mais les créanciers de manière globale ont tout intérêt à faire preuve d’une vigilance extrême au moment où ils recueillent les informations et les documents qui leur permettront d’analyser la situation patrimoniale et financière de la personne se portant caution.
Discussions en cours :
Bonjour,
Je vous remercie pour cet article, par contre, il me semble que la caution dont l’engagement était disproportionné au moment de la signature du cautionnement, peut tout de même être appelée en garantie si son patrimoine lui permet de faire face à son engagement le jour où celle-ci est appelée.
C’est ce qui ressort des articles L343-4 et L332-1 du code de la consommation.
Bonjour
En effet, vous avez raison. Mais le point crucial qui est rappelé ici par la cour de cassation est l’appréciation de la proportionnalité du cautionnement par rapport au patrimoine. Celui ci s’effectue donc au jour où le cautionnement a été donné.
Le fait que le patrimoine permette au jour de l appel en garantie de faire face à la somme à rembourser, ne remet pas en cause le fait que le cautionnement était disproportionné au jour de sa conclusion. Ainsi Et c’est Bien la le probleme, l’action de la caution ayant changé positivement de situation financière se verra le plus souvent soumise à un contentieux avant d’aboutir
Alexandre
La disproportion est évalué de manière fantaisiste ceci dès qu’il s’agit d’une addition et d’une soustraction.
Il s’en suit en suite un acharnement bancaire envers la caution sans égale mesure.
En fait comment comprendre que certaines cautions soient encore poursuivies 15ans voir 20ans après avoir signé le cautionnement demandé par le banquier.
Alors qu’au moment du cautionnement le solde disponible des actifs de la caution étaient de 10% du montant cautionné.
Exemple réel : caution pour 120000€ en 1999 actifs disponibles n 1999 incluant les biens mobiliers et immobiliers moins de 20000€
Au jour d’aujourd’hui en 2017 donc 18ans après le banquier poursuit encore pour 235000€ (les 120000 capitalisés) que la caution ne peut pas plus rembourser qu’en 1999.
Il est évident que dans ce cas précis y a forcément un problème d’évaluation.
Ce cas n’est malheureusement pas isolé
Bien cordialement