En cas de licenciement économique, par application du Code du Travail et notamment de l’article L1233-4 (ancien article L321-1), l’employeur doit fournir tous les efforts possibles pour tenter de reclasser son salarié avant de pouvoir le licencier.
Le périmètre de cette obligation de reclassement avait été défini par la jurisprudence et étendu à toutes les sociétés appartenant au groupe dans lequel intervient le licenciement (arrêt de la Cour de Cassation du 5 avril 1995) et ce, même pour des propositions de postes à l’étranger (arrêt de la Cour de Cassation du 7 octobre 1998).
Par la suite, cette règle a été inscrite dans le Code du Travail par la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 aux termes de laquelle le reclassement du salarié doit « être réalisé dans le cadre de l’entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient ».
Cette extension du reclassement au groupe a conduit nombre d’employeurs à proposer des postes à l’étranger quelles que soient les aspirations au dépaysement des salariés dont le licenciement économique est envisagé.
S’ensuivit une large médiatisation décriant les propositions de postes de reclassement dans des pays étrangers pour une rémunération parfois égale au SMIC local.
Mais, ce qui a pu être été perçu comme des propositions quelquefois scandaleuses et honteuses, n’était en fait que l’application stricte de la loi par les employeurs qui étaient tenus légalement de proposer l’ensemble des emplois équivalents disponibles dans le groupe.
La médiatisation et l’indignation de l’opinion publique face à ces propositions de postes, plus ou moins exotiques et assorties de revenus modiques, ont incité des députés à présenter, le 13 mai 2009, une proposition de loi à l’Assemblée nationale pour éviter que de telles absurdités ne se reproduisent.
Cette proposition de loi a abouti au vote de la loi du 18 mai 2010 publiée le 19 mai au Journal Officiel.
Celle-ci a complété l’article L1233-4 du Code du travail en précisant que le reclassement du salarié doit se faire sur un emploi de même catégorie ou équivalent « assorti d’une rémunération équivalente ».
Par ailleurs, cette même loi ajoute un article L1233-4-1 du Code du Travail qui permet de recourir à un questionnaire préalable auprès du salarié sur les offres de postes à l’étranger.
Cette disposition remet ainsi en cause la position de la Cour de Cassation (arrêt de la chambre sociale en date du 4 mars 2009), qui avait jugé que l’employeur « ne peut limiter ses recherches de reclassement et ses offres en fonction de la volonté de ses salariés, exprimée à sa demande et par avance, en dehors de toute proposition concrète ».
Cependant, la possibilité d’un questionnaire préalable ne concerne que les offres à l’étranger.
Par ailleurs, l’employeur doit toujours rechercher et offrir les postes disponibles en France.
Une certitude concernant cette loi : l’employeur est dispensé de rechercher les postes à l’étranger en l’absence de réponse du salarié au questionnaire dans le délai légal de 6 jours.
Pour le reste et, compte tenu de l’imprécision de la nouvelle loi quant au contenu du questionnaire pour les postes à l’étranger, et quant à la notion de rémunération équivalente, il faudra surveiller l’arrivée annoncée lors des débats au Sénat de la circulaire du Ministère du Travail ainsi que les premières décisions judiciaires interprétatives.
Dans l’attente, il est fortement conseillé aux groupes de sociétés de redoubler de vigilance concernant le reclassement de salariés dont le licenciement est envisagé pour motifs économiques.
Paul BUISSON, Avocat associé
Et Hélène TEIL, Avocat collaborateur
Cabinet BUISSON & ASSOCIES
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