Forum : Questions techniques et entraide entre juristes
Echanges sur des points de droit.
Dépression et achats compulsifs
de
chriss09
le Ven 18 Fév 2005 11:00
- "Membre actif"
-
- 160 messages
- Localisation: 30
-
Profession: Universitaire, Professeur...
-
Bonjour
Une dame dépressive depuis 5 ans est tombée dans le piège de l'achat compulsif. Elle a donc contracté une série de prêts sans en informer son époux et a, de ce fait, placé le ménage en grande difficulté financière puisque dans l'impossibilité manifeste de payer. Les créanciers ont mandaté des huissiers et le ménage se retrouve en situation de surendettement.
Mes questions sont les suivantes:
Existe-t-il un moyen de protéger le ménage des actions irréfléchies (dues à la maladie) de la dame? Le mari peut-il se retourner contre les organismes de crédits qui ont accordé un peu "légèrement" ces prêts et en obtenir la nullité?
Merci d'avance...
de
Hervé
le Ven 18 Fév 2005 11:11
- "Vétéran"
-
- 3913 messages
- Localisation: Etranger
-
Profession: Juriste
Bonjour,
Sur la possibilité d'interdire à Madame de souscrire de nouveaux crédits, ça risque d'être dur, il faudrait la faire placer en curatelle au moins. Je ne sais pas si cela serait possible... Ou alors, il faudrait la faire hospitaliser, de là, elle ne devrait pas pouvoir prendre de nouveaux engagements, mais en sera-t-elle d'accord? L'hospitalisation d'office ou à la demande d'un tiers ne devrait pas être acceptée dans le contexte que vous nous citez.
Sur la nullité des prêts en questions plusieurs éléments. tout d'abord, attention, nullité d'un crédit veut dire remboursement immédiat de tout le capital emprunté. Visiblement, votre couplen'en aura pas les moyens. Est-ce donc une vraie solution? Au sujet de la légèreté, je pense qu'il faudrait envisager les conditions dans lesquelles les crédits ont été accordés et notamment les vérofocations faites par les établissements de crédit avant l'octroi dufinancement. Cependant, je ne chercherai pas à faire annuler l'emprunt mais à en réduire le poids (notamment par la suppression du droit aux intérêts, rétroactivement à titre de dommages et intérêts). Cependant, l'objectif me paraît difficile à atteindre et il vous faudra le concours d'un avocat spécialiste en droit de la consommation et plus précisément encore de droit du crédit pour parvenir à cela...
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...
de
Nemo auditur
le Ven 18 Fév 2005 11:46
- "Vétéran"
-
- 2519 messages
- Localisation: Etranger
-
Profession: Juriste
Ne peut-on songer à la nullité des contrats de prêts pour vice du consentement dû à une absence de lucidité au moment de la conclusion du contrat?
Ce sera cependant assez difficile à démontrer, expertise psychiatrique, preuve de l'absence de luciditié au moment de la conclusion du contrat...
Autre piste : vous pourriez invoquer la violence, soit l'état de nécessité de la personne contractante (elle avait besoin de faire ses achats compulsifs pour calmer son mal), à vous de considérer les éléments tendant à prouver l'effectivité de cette violence.
D'un point de vue pénal, vous pourriez songer à l'abus de faiblesse.mais l'élément intentionnel sera peut être difficile à apporter.
Pour ce qui est de la restitution, si vous prouvez la faute des prêteurs, il me semble (mais à confirmer) qu'en vertu de l'adage " in pari causa turpitudinis cessat repetitio!", les prêteurs ne pourraient prétendre à restitution des sommes.
A défaut, le capital a-t-il déjà été consommé en partie?
Sont-ils capables pour autant de rembourser la capital emprunté même à long terme car en tout état de cause, si répétition de l'indû il y a, le juge devrait considérer (espérons le) la situation financière des époux et leur accorder des délais de paiement important?
En tout état de cause, il semblerait qu'il faille assez rapidement vous rapprochez de la Commission de Surendettement afin de mettre en jeu si nécessaire, une procédure de rétablissement personnel et songer par la suite à prendre conseil auprès d'un avocat.
de
Hervé
le Ven 18 Fév 2005 11:58
- "Vétéran"
-
- 3913 messages
- Localisation: Etranger
-
Profession: Juriste
L'absence d elucidité me semble difficle à plaider et à justifier. Le fait d'être dépressif et de tomber dans l'achat compulsif n'est pas à mon avis constituf d'un trouble de la lucidité suffisant pour avoir une réelle influence.
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...
de
Laurent binet
le Sam 19 Fév 2005 16:28
- "Vétéran"
-
- 853 messages
- Localisation: Pontoise (Val d'oise)
-
Profession: Avocat
-
le plus simple est de saisir le juge des tutelles qui après avis médical pourra décider d'une mesure de protection (tutelle, curatelle). Pour les contrats passés, le tuteur ou curateur désigné pourrait entamer des actions visant à faire annuler les contrats le préalable étant une expertise médicale de l'interressé pour déterminer si au moment de le signature du contrat elle n'était pas saine d'esprit (en gros).
<b>Me blogagogo</b>
de
chriss09
le Sam 19 Fév 2005 16:38
- "Membre actif"
-
- 160 messages
- Localisation: 30
-
Profession: Universitaire, Professeur...
-
Merci à vous tous pour toutes ces précisions.
Je plains sincèrement le mari qui va avoir ce choix diffiicle à effectuer...
Chriss
emprunts
de
michel
le Sam 19 Fév 2005 19:38
- "Vétéran"
-
- 1098 messages
- Localisation: 17
-
Profession: Avocat
-
Bonjour,
Toutefois, n'oublions pas que le mari, qui n'a pas donné son consentement, est quand même protégé par le code civil : comme les emprunts sont compulsifs et non destinés à couvrir les frais d'entretien normaux du ménage et des enfants, il ne peut pas être poursuivi sur ses gains personnels, biens propres, ou sur les biens de la communauté, qui ne peuvent donc pas faire l'objet de saisies.
Restent les économie faites sur les gains personnels, ainsi que les biens propres de l'épouse qui peuvent être saisis.
Cordialement.
Michel.
Bonjour Michel
de
chriss09
le Sam 19 Fév 2005 19:50
- "Membre actif"
-
- 160 messages
- Localisation: 30
-
Profession: Universitaire, Professeur...
-
Vous êtes tout à fait dans le vrai quant à la situation de ce ménage.
Mais comment l'époux peut-il se protéger des saisies qui menacent le ménage? Comment faire valoir que ces emprunts sont compulsifs sans envisager de curatelle ou tutelle si toutefois cela est possible?
Ce qui me pose problème , c'est que le mari n'est ni co-emprunteur ni caution, mais Madame n'a pourtant pas besoin de son consentement pour contracter des emprunts.
Monsieur est-il quand même responsable des actes de Madame? Ou bien cela dépend de leur régime matrimonial?
Cordialement
Chriss
de
Hervé
le Sam 19 Fév 2005 21:40
- "Vétéran"
-
- 3913 messages
- Localisation: Etranger
-
Profession: Juriste
A mon avis, cela dépendra du régime matrimonial... A préciser quant au contenu de celui-ci même si les probabilités sont d'environ 80% dans le sens du régime légal qui permet de faire saisir les biens communs...
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...
emprunt
de
michel
le Dim 20 Fév 2005 12:40
- "Vétéran"
-
- 1098 messages
- Localisation: 17
-
Profession: Avocat
-
Bonjour,
Hervé, ne soyons pas aussi pessimiste, il faut résister aux huissiers qui veulent saisir les biens communs, aller devant le juge d'instance (avant le premier acte d'exécution) ou devant le JEX (après le premier commandement ou la première saisie) et faire valoir que les emprunts n'ont pas servi à des dépenses modestes pour l'entretien du ménage ou des enfants (= le seul cas prévu par le code civil où les biens communs peuvent être saisis si un seul des époux a contracté le prêt).
Les articles du code civil à faire respecter sont ceux qu'on trouve après l'article 214 et aussi à l'article 1415 (désolé, je suis en week-end, je n'ai pas mes codes avec moi).
C'est même un cas d'école : l'an dernier, c'était le sujet d'un devoir de cassation civile proposé par l'institut de formation des avocats aux conseils (1ère année d'études, chez eux), basé sur un arrêt de cassation de 2003 (qu'on peut retrouver sur légifrance...). D'ailleurs, le juge d'instance n'avait même pas vérifié si le couple était marié ou s'il s'agit de concubins. Son jugement a été cassé.
Là dessus, il y a de la jurisprudence de la cour de cassation, il faut être ferme.
Cordialement.
Michel.
Au total il y a 63 utilisateurs en ligne :: 0 enregistré, 1 invisible et 62 invités (basées sur les utilisateurs actifs des 5 dernières minutes).
Le record du nombre d’utilisateurs en ligne est de 1718, le Jeu 26 Sep 2024 12:13