1. Absence de cadre légal pour les fonctionnaires mais un principe dégagé par le juge administratif.
Aucun texte législatif ou réglementaire commun aux trois fonctions publiques ne prévoit expressément l’indemnisation des congés annuels non pris pour les fonctionnaires titulaires. Néanmoins, plusieurs décrets encadrent ce droit pour les agents contractuels dans chaque versant :
- Fonction publique de l’État : décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, art. 10 ;
- Fonction publique territoriale : décret n° 88-145 du 15 février 1988, art. 5 ;
- Fonction publique hospitalière : décret n° 91-155 du 6 février 1991, art. 8.
Ces textes permettent, sous conditions, l’indemnisation des congés annuels non pris à la fin du contrat.
Pour les fonctionnaires, c’est essentiellement la jurisprudence administrative, influencée par le droit européen [1], qui fonde ce droit à indemnisation. En effet, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé que les congés non pris pour des raisons de santé doivent être indemnisés lors de la cessation de la relation de travail [2].
2. Situations ouvrant droit à une indemnité compensatrice de congés annuels.
Le Conseil d’État, les juridictions administratives et la CJUE ont reconnu ce droit dans les situations suivantes :
- Départ à la retraite (y compris pour invalidité) [3] ;
- Licenciement pour inaptitude physique [4] ;
- Fin de contrat ou démission [5] ;
- Mutation ou changement d’employeur public [6] ;
- Décès de l’agent, au bénéfice des ayants droit [7].
En revanche, l’indemnisation est exclue en cas de cessation pour des motifs disciplinaires tels que la révocation, la radiation des cadres pour abandon de poste, ou la mise à la retraite d’office.
3. Conditions d’ouverture du droit à indemnisation.
Deux conditions doivent être réunies :
- La fin de la relation de travail.
- L’impossibilité de prendre les congés annuels, pour raison de santé.
Il n’est pas exigé que l’agent ait formulé une demande de congés : il suffit qu’il ait été empêché de les prendre. L’administration doit démontrer qu’elle a mis l’agent en mesure de le faire et l’a informé du risque de perte.
4. Limites de l’indemnisation.
Conformément à la jurisprudence européenne et nationale [8], l’indemnisation est limitée à :
- 20 jours de congés par année civile (correspondant au droit minimum européen de quatre semaines),
- Sur une période de report de 15 mois à compter de la fin de l’année de référence [9].
Attention, la démarche peut être engagée dans un délai supérieur à 15 mois après la fin de la relation de travail (application de la prescription quadriennale). Le Conseil d’Etat a en effet très récemment jugé que le délai dans lequel l’action peut être engagé ne doit pas être confondu avec la période de droit au report (15 mois) et que le droit à l’indemnité est apprécié à la date de la fin de la relation de travail [10].
5. Modalités de calcul de l’indemnité.
Aucun barème réglementaire spécifique n’existe pour les fonctionnaires.
Toutefois, l’indemnité ne peut être inférieure à la rémunération journalière nette que l’agent aurait perçue s’il avait pris son congé [11].
Conclusion.
L’indemnisation des congés annuels non pris pour des raisons de santé, lors de la cessation de la relation de travail, est désormais reconnue pour tous les agents publics. Si les textes réglementaires restent incomplets pour les fonctionnaires titulaires, le droit européen et la jurisprudence garantissent l’effectivité de ce droit, sous conditions strictes.
En pratique il appartient à l’agent qui n’aurait pas u prendre ses congés pour raison de santé avant d’être radié des cadres de formuler une demande d’indemnisation à son administration. A ce jour, le droit à indemnisation n’est en effet pas encore proposé spontanément par les administrations employeurs.