Ils s’inscrivent dans la poursuite des réflexions issues des travaux de l’American Law Institute et d’Unidroit des années 2000 auxquels s’est largement référé Jean-Claude Magendie, auteur de deux rapports au Garde des Sceaux des 15 juin 2004 et 24 mai 2008 censés apporter « célérité et qualité » à la justice.
Nous avons déjà évoqué cette lente destruction de ce qui constitue la caractéristique de la procédure civile française, c’est-à-dire l’existence à la fois de l’effet suspensif de l’appel et d’un appel voie d’achèvement.
(cf. l’article « Quelle réforme pour notre procédure civile ? »)
Si quelques maladresses des décrets du 9 décembre 2000 et du 28 décembre 2010 ont enfin et heureusement été rectifiées, il apparaît malheureusement que les postulats qui ont servi de base aux réflexions de la chancellerie sous tous les gouvernements successifs depuis les années 2000 ont à nouveau servi de support à ces réformes.
Or, nous avons eu l’occasion de souligner que ces postulats – l’existence de trop d’appels dilatoires et l’absence de sérieux des débats de première instance – sont erronés.
Si en effet il n’est pas contestable qu’il puisse exister quelques appels dilatoires, l’arsenal procédural est largement suffisant actuellement pour éviter les manœuvres adverses.
Quant à la préparation des procédures de première instance, affirmer comme cela l’a été par Monsieur Magendie qu’il s’agit de « galops d’essai », les Conseils des justiciables conservant des arguments dans leur manche en vue de l’appel, est proprement insultant à l’égard des avocats et irréaliste.
Ces récentes dispositions, loin de tenir compte de l’échec patent des précédentes, mettent à la charge des auxiliaires de justice de nouvelles contraintes très sévèrement sanctionnées faisant des avocats les responsables des errements passés et actuels de la justice.
En réalité, tout cela n’est que prétexte destiné à aboutir à l’instauration d’une procédure d’appel voie de réformation, c’est-à-dire au cours de laquelle il ne sera plus possible de présenter la moindre prétention nouvelle ni même le moindre argument nouveau, la Cour se contentant d’apprécier si le jugement a été correctement rendu sur la base des éléments de première instance.
Or, ce qui fait notamment la nécessité d’un appel voie d’achèvement c’est justement l’intervention, entre la première instance et l’appel, d’un jugement qu’il convient de critiquer et qui conduit nécessairement à la modification de l’argumentation de l’appelant puis, par voie de conséquence, de l’intimé.
Ce que d’ailleurs rappelle le décret n°2017-891 relatif aux exceptions d’incompétence et à l’appel en matière civile du 6 mai dernier lorsqu’il croit utile de préciser que « l’appel tend, par la critique du jugement rendu...à sa réformation ou à son annulation... ».
Mais il est vrai que l’appel voie de réformation permettrait de faire de substantielles économies en termes de magistrats et de greffe ce qui, au regard du contexte actuel, semble être la principale préoccupation de nos gouvernants, très éloignée de la satisfaction du justiciable...