A. Dans un arrêt du 5 décembre 2018 [1], la Cour de cassation a jugé que : "l’arrêt de la Cour d’appel retient que la salariée, qui n’était pas affectée à 100% de son temps de travail sur le lot n°1 ne remplit pas les conditions de l’article 7-2 de la convention collective nationale et que son contrat de travail n’a pas été transmis à la société entrante, la société sortante restant son employeur ; qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que la salariée était affectée à 100% par la société sortante sur le marché repris divisé en plusieurs lots, dont la société entrante était le nouvel adjudicataire, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé".
L’une des conditions du maintien de l’emploi pour les agents de maîtrise (MP1 et MP2) est d’être affecté "exclusivement sur le marché concerné" (article 7.2, I, A CCN entreprises de propreté).
Dans l’hypothèse où le marché initial est redistribué en plusieurs lots, la Cour de cassation réaffirme que la condition d’être affecté "exclusivement sur le marché concerné" s’apprécie par rapport au marché initial et non par rapport aux lots pris isolément composant ledit marché.
Cette décision est en parfaite conformité avec l’article 7.2, I, C de la convention collective nationale des entreprises de propreté qui précise que "lorsque le marché initial est redistribué en plusieurs lots, la (ou les) entreprise(s) entrante(s) a (ont) l’obligation d’assurer la continuité des contrats de travail des personnes affectées sur le (ou les) lot(s) qu’elle(s) reprend (reprennent) dès lors que les conditions définies ci-dessus, appréciées alors à l’égard du marché initial détenu par l’entreprise sortante, sont remplies".
La jurisprudence est constante sur ce point [2]. La Cour de cassation vient donc sanctionner une mauvaise application de l’article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté (ancienne annexe 7).
B. Dans un arrêt du 12 septembre 2018 (n°16-28.407), la Cour de cassation a rappelé que "sauf application de l’article L.1244-1 du Code du travail, le changement d’employeur prévu et organisé par voie conventionnelle suppose l’accord exprès du salarié, qui ne peut résulter de la seule poursuite de son contrat de travail sous une autre direction".
Il s’agit d’une position désormais bien établie de la haute juridiction.
La perte de marché dans le secteur de la propreté ne cadre pas avec les dispositions légales de l’article L.1244-1 du Code du travail. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les partenaires sociaux ont négocié une garantie conventionnelle d’emploi connue sous le nom d’annexe 7 qui est devenue l’article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté.
La Cour de cassation rappelle que le transfert du contrat de travail du salarié de l’entreprise sortante, celle qui perd le marché, à l’entreprise entrante, celle qui remporte le marché, nécessite l’accord exprès dudit salarié.
Cette décision va légitimement à l’encontre de ce qui a été prévu par les partenaires sociaux pour stabiliser le marché de la propreté :
L’article 7.2, II de la convention collective nationale des entreprises de propreté stipule que "Le transfert des contrats de travail s’effectue de plein droit par l’effet du présent dispositif et s’impose donc au salarié dans les conditions prévues ci-dessous".
L’article 7.4 de la convention collective nationale des entreprises de propreté stipule que "A l’exception d’une modification substantielle de celui-ci par l’entreprise entrante, le salarié qui refuse son transfert dans les conditions stipulées par le présent accord sera considéré comme ayant rompu de son fait son contrat de travail. Cette rupture ne sera pas imputable à l’employeur et n’entraînera donc pour lui aucune obligation de verser des indemnités de préavis et de licenciement".
Un salarié peut donc refuser de signer l’avenant rédigé par l’entreprise entrante. Dans cette hypothèse, il reste dans les effectifs de l’entreprise sortante ce qui impliquera inévitablement une nouvelle affectation et éventuellement la mise en œuvre de la clause de mobilité.
Dans un arrêt du 12 juillet 2017 (n°16-10.994), la Cour de cassation a rappelé qu’est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de salariés par l’entreprise sortante, qui a perdu le marché, dès lors que les conditions de la garantie conventionnelle d’emploi ne peuvent trouver à s’appliquer.
C. Dans un arrêt du 30 mai 2018 [3], la Cour de cassation a jugé que "les arrêts relèvent que la prime d’insalubrité et la prime de transport étaient servies à des salariés dont le contrat de travail avait été transféré, en application de l’article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté, à la société entrante et qu’elles correspondaient à des avantages dont ils bénéficiant chez leur précédent employeur ; qu’il en résulte que la société [entrante] était fondée à les maintenir au seul bénéfice des salariés transférés sans que cela constitue une atteinte prohibée au principe d’égalité".
L’intérêt majeur de cet arrêt est qu’il a été rendu dans le cadre de transferts de contrats de travail qui sont antérieurs à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 et à l’Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 qui a réécrit l’article L.1224-3-2 du Code du travail.
La Cour de cassation confirme le revirement opéré dans son arrêt du 30 novembre 2017 (n°16-20.532) aux termes duquel : "la différence de traitement entre les salariés dont le contrat de travail a été transféré en application d’une garantie d’emploi instituée par voie conventionnelle par les organisations syndicales représentatives investies de la défense des droits et intérêts des salariés et à l’habilitation desquelles ces derniers participent directement par leur vote et les salariés de l’employeur entrant, qui résulte de l’obligation à laquelle est tenu ce dernier de maintenir au bénéfice des salariés transférés les droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, n’est pas étrangère à toute considération de nature professionnelle et se trouve dès lors justifiée au regard du principe d’égalité de traitement."
Il convient de rappeler que dans un arrêt du 15 janvier 2014 [4], la Cour de cassation avait jugé l’inverse à savoir que le maintien des contrats de travail en application de la garantie conventionnelle d’emploi prévue par la convention collective nationale des entreprises de propreté ne justifie pas une inégalité de traitement entre des salariés qui effectuent le même travail, pour le même employeur et sur le même site. A travail égal, salaire égal !
La haute juridiction revient donc sur sa position initiale avec la motivation suivante : "mais attendu, d’abord, que l’évolution générale de la législation du travail en matière de négociation collective et de la jurisprudence en ce qui concerne le principe d’égalité de traitement à l’égard des accords collectifs conduit à apprécier différemment la portée de ce principe à propos du transfert des contrats de travail organisé par voie conventionnelle".
En conséquence, sur un même marché, des salariés peuvent avoir, par le jeu du maintien d’emploi, pour un même travail des rémunérations différentes.
Discussions en cours :
Monsieur,
Nous avons fais une proposition de contrat pour le nettoyage d’une copropriété qui a été accepté par le Syndic il y 1 mois environ.
Je recois un mail de l’entreprise sortante m’indiquant qu’il y a un salarié à reprendre avec son contrat de travail et ses bulletins de salaire.
Cependant son contrat est de 73h mensuelles alors que le site que nous avons récupéré est prevu pour 5h mensuelle tout au plus. Devons nous récupérer le salarié avec un contrat de 73h ou seulement avec 5h de travail et si oui comment déterminer les heures par rapport à son ancien employeur ?
merci de votre réponse
Cher Monsieur,
Vous êtes soumis à la CCN des entreprises de propreté ? A quelle date reprenez-vous le marché ?
Le principe est que vous ne reprenez que les heures pour lesquelles le salarié est affecté sur le site.
Je n’ai pas tous les éléments mais avez-vous vérifié que le salarié passait sur le marché concerné 30 % de son temps de travail total effectué pour le compte de l’entreprise sortante ?
Bien à vous,
Employ
Bonjour,
Tout dépend depuis quand votre employeur a cessé toute activité. Avez-vous arrêté les prestations de nettoyage sur le site ? Si oui depuis combien de temps ?
Cordialement,
Bonjour,
Dans le cas où l’entreprise utilisatrice souhaite résilier le contrat pour effectuer le nettoyage par son propre personnel, peut-elle le faire ou doit-elle reprendre le personnel de l’entreprise de nettoyage ?
Merci d’avance pour votre retour,
Fabien
Cher Monsieur,
Si la société utilisatrice qui n’est pas soumise à la CCN des entreprises de propreté décide d’internaliser les prestations de nettoyage, elle n’a pas l’obligation de reprendre les salariés de l’entreprise sortante au visa de l’article 7.
A votre disposition,
Bonjour,
Auriez-vous l’amabilité de m’éclairer sur un point de travail ?
Ma mère est agent d’entretien pour une société depuis quelques années et le
site où elle travaille a été perdu au profit d’un nouveau prestataire.
Cependant, bientôt à la retraite (demande a effectué en juillet pour un
départ fin décembre) , elle souhaite rester avec la société sortante.
Elle a reçu son courrier précisant que le nouveau prestataire assure la
continuité mais par commodité, elle souhaite rester avec son employeur.
Peut-elle revendiquer ce droit sans risquer un licenciement ?
Je vous remercie.
Bonjour,
Le salarié a toujours la possibilité de refuser le transfert de son contrat de travail de l’entreprise sortante à l’entreprise entrante. Ce refus ne constitue pas une faute.
Ceci étant, lorsque le salarié reste dans l’entreprise sortante, compte tenu de la perte du marché, cette dernière doit affecté le salarié sur un autre site. Très souvent, la clause de mobilité qui est prévue dans le contrat de travail est mise en oeuvre.
Bien à vous,
Bonjour,
Je vous remercie.
Elle a bien exercé son droit à suivre la société sortante mais celle-ci, dans son courrier explicatif, lui a indiqué que, suite à de nombreuses pertes de marchés, n’avait pas de place pour son contrat sur d’autres chantiers. Elle a du réintégrer de nombreux salariés suite également à des licenciements économiques !
Chère Madame,
L’employeur doit affecter le salarié sur un autre chantier.
La perte d’un marché n’est pas, en soi, un motif de licenciement pour motif économique.
Bien à vous
Bonjours , suite à une appel d’offre mon employeurs actuel a perdus le contrat dans la structure ou je travail , de ce fait nous devons partir avec l’autre entreprise sauf qu’à ce jours l’autre entreprise ne veut pas nous reprendre avec nos meme heures et lieux de travail... ont t’il le droit ? ( entreprise de nettoyage )
merci
Chère Madame,
Tout d’abord, vous avez toujours la possibilité de refuser le transfert de votre contrat de travail. Votre employeur doit alors vous affecter sur un autre chantier.
Ensuite, l’entreprise sortante doit vous proposer un avenant qui reprend les mêmes clauses que votre contrat de travail initial. En ce qui concerne vos horaires de travail et votre lieu de travail, l’entreprise sortante ne peut pas vous imposer une modification mais attention cela dépend aussi des clauses de votre contrat de travail initial.
Bien cordialement,
Bonjour,
Ayant le code APE 8121Z, en statut d’auto-entrepreneur suis-je dans l’obligation de reprendre la salariée de la société sortante ?
Sachant que vu mon statut, je ne dispose pas de la qualité d’employeur puisque je n’emploi aucun salarié ?