Cet article est proposé par le nouveau Magazine "Liberalis"...
Avec ce nouveau numéro du magazine LIBERALIS, nous vous invitons à poser un autre regard sur vos professions libérales.
Nous vous invitons à découvrir nos rubriques à travers le prisme des sentiments et de l’action comme « Se passionner », « S’étonner » pour découvrir les savoir-faire ou encore « S’enflammer » pour les témoignages de collectionneurs.
(Art / Exposition) : Découverte au Musverre, musée dédié à l’art du verre, de l’exposition « Trop plein ».
Par Jean-Louis Roux-Fouillet
Le MusVerre est un temple muséal de la création verrière inauguré en 1967 (anciennement Musée du Verre), puis en 2004 dans son bâtiment actuel, situé à Sars-Poteries, dans l’Avesnois, au sud-est du département du Nord. Il nous propose une exposition gargantuesque pour dénoncer les affres de la surconsommation soulignant nos excès en matière de déchets et de gaspillage alimentaire.
Pour cela plusieurs thématiques sont mises en évidence : le rapport à l’argent, qui conditionne tous les excès ; le gaspillage alimentaire et l’obsolescence programmée, qui engendrent chaque année des tonnes de déchets mettant en péril l’équilibre écologique planétaire ; enfin, les nouvelles perceptions et les codes inédits d’une société qui définit des normes difficilement atteignables.
Cette surabondance de biens de consommation, le « Trop Plein », débute dès le seuil franchi, où une table de banquet croule sous le poids des mets, révélant l’avidité humaine et la décadence de nos temps modernes. Cette mise en bouche dénomé « El Dorado », est un projet monumental kitsch signé des frères Einar et Jamex De la Torre.
Photo 6 (en logo) : « El Dorado » de Einar et Jamex De la Torre © Musverre JLRF
Le plat principal réserve une surprise insolente et provocante : une interprétation iconoclaste de la Pietà de Michel-Ange, signée du sculpteur sur verre et illusionniste, politiquement et socialement engagé, John Moran, en résidence à l’Atelier du musée. La Madone laisse place à la monstrueuse figure du clown Ronald McDonald, tenant dans ses bras un consommateur de fast-food à l’agonie.
- « La Madone » de John Moran ©Musverre JLRF
À l’instar de celle de John Moran, l’œuvre de John Miller intitulée « Box-O-Fries », cliché nostalgique des repas de fast-foods et de drive-ins, est aussi une satire de la société de consommation américaine, caractérisée par une propension à la consommation opulente.
- « Box-O-Fries » de John Miller © Musverre JLRF
L’œuvre étonnante de l’artiste japonais Shige Fujishiro, résolument politique, se compose de perles de verre enfilées sur des tiges métalliques souples. Elle aborde les préoccupations environnementales liées à la pollution maritime : les déchets capturés dans le filet de pêche rappellent la croissance alarmante de la pollution océanique et la formation d’un septième continent fait de résidus plastiques. Les sacs ornés des logos d’enseignes de grande distribution bien connues ajoutent une dimension de familiarité, mais aussi un malaise palpable.
- L’oeuvre « Unter dem Meer - Schleppnetz » de Shige Fujishiro et l’artiste © Musverre JLRF
Comme conclusion sucrée, l’œuvre de Krista Israel dénonce sans détours l’impact des réseaux sociaux sur la condition humaine. Mettant en lumière la dépendance instaurée par le média de Jeff Zuckerberg, l’artiste marie les techniques du verre moulé pour la sculpture d’un bras massif, au poing contracté, avec celle du verre soufflé pour créer de petites fioles emplies d’un liquide bleu, véritable opium pour de nouveaux adeptes.
- L’oeuvre de Krista Israel © Musverre JLRF
Les gnomes créés par l’artiste verrier Wilhelm Vernim incarnent notre digestif, où chaque gnome représente une catégorie sociale reconnaissable par un attribut distinctif, qu’il soit religieux, idéologique ou matériel. Vernim met en lumière la pression sociale qui pousse souvent à se conformer à une seule identité prédéfinie, remettant ainsi en question cette norme. Il suggère que chacun devrait avoir la liberté d’exprimer sa véritable individualité, sans être limité par les étiquettes imposées par la société.
- Wilhelm Vernim et ses « gnomes » © Musverre JLRF
Devons-nous craindre l’indigestion devant une telle virtuosité ? Par chance, non. Le Musverre a réussi à harmoniser avec finesse des pièces spectaculaires, des œuvres accusatrices et engagées et un discours percutant, évitant ainsi l’écueil de l’excès qui parfois nous submerge.
Un quart des œuvres ont été réalisées spécifiquement pour l’exposition. Saluons le dynamisme d’Eléonore Perreti, brillante directrice du musée et commissaire de l’exposition.
Petit bonus, jusqu’au 20 mai 2024, vous pourrez découvrir l’artiste plasticienne Lucie Linder et ses « Fossiles du désir, exister c’est coexister », une petite exposition pleine de poésie !
« Trop Plein »
Du 22 février 2024 au 5 janvier 2025
Musverre, 76 rue du Général de Gaulle, 59216 Sars-Poteries
Informations Musverre : https://musverre.fr
Informations Lucie Linder : http://lucielinder.com