1. Le nécessaire respect de la déontologie attachée à la qualité d’OPJ.
Pour mémoire, la police judiciaire est chargée "de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs" [1].
Pour ce faire, elle comprend entre autres les OPJ, les agents de police judiciaire (APJ) et les agents de police judiciaire adjoints (APJA) [2].
Les policiers et gendarmes exercent leurs attributions judiciaires sous la direction du procureur de la Réplique [3]. L’ensemble est sous la surveillance du procureur général du ressort de la cour d’appel dans laquelle ils exercent leurs fonctions [4]. En règle générale, cette mission est dévolue à un avocat général placé à la tête d’un "service OPJ" [5].
Cette appréciation déontologique est tout d’abord réalisée à l’occasion de la réception de la demande d’habilitation adressée par l’autorité administrative au procureur général près la cour d’appel dans le ressort de laquelle intervient la première affectation de l’OPJ.
La demande doit préciser si le fonctionnaire de police ou le militaire de la gendarmerie a été définitivement sanctionné pour des fautes disciplinaires constituant des manquements à l’honneur, à la probité ou des insuffisances professionnelles graves. Le procureur général est également informé des sanctions qui pourraient être prononcées pour les mêmes motifs [6]. Le cas échéant, il peut refuser l’habilitation de l’intéressé.
Il en est de même pour le réserviste de la gendarmerie ou de la police qui remplit les conditions pour conserver sa qualité d’OPJ. Outre les vérifications quant à son expérience, son aptitude et l’actualisation de ses connaissances, le procureur général s’assure qu’il n’a pas manqué aux exigences déontologiques [7].
Cette surveillance est également effectuée au cours de l’exercice effectif des attributions attachées à la qualité d’OPJ. Cette fois-ci, le procureur général du lieu d’exercice habituel des fonctions peut prononcer le retrait de l’habilitation ou sa suspension pour une durée ne pouvant pas excédée deux ans [8].
2. La procédure et l’audition par le procureur général ou son délégué.
C’est par arrêté que le procureur général accorde ou refuse l’habilitation. Ainsi, lorsqu’il envisage de la refuser, il en informe l’intéressé, "en lui précisant qu’il peut, dans un délai de quinze jours, prendre connaissance de son dossier et être entendu, le cas échéant, avec l’assistance d’un conseil de son choix" [9].
En pratique, lorsqu’il envisage de refuser d’habiliter l’intéressé, il procède à son audition. D’une durée moyenne de trente minutes, cette dernière a lieu dans une salle prévue à cet effet et se concrétise par un échange sur les éléments du dossier qui motivent le refus de la demande.
L’intéressé peut produire des pièces au soutien de ses intérêts. Il ne doit surtout pas manquer de préparer son audition, de préférence avec son conseil, après avoir pris connaissance de son dossier.
L’objectif n’est pas seulement de convaincre l’autorité judiciaire que les faits reprochés à l’intéressé ne sont pas, ou plus, de nature à caractériser une incompatibilité avec la qualité d’OPJ. L’objectif peut être de répondre à l’attente du procureur général souhaitant connaître ce nouvel OPJ et, selon l’expression consacrée, "mettre les points sur les i" ou s’assurer de la non réitération d’une éventuelle faute déontologique...
Cette procédure est à distinguer de celle intervenant lorsque l’OPJ en exercice a commis une faute de nature à justifier le retrait ou la suspension de son habilitation. Cette procédure disciplinaire spécifique peut être ouverte d’office ou sur la proposition de l’autorité administrative compétente [10].
Dans cette procédure spécifique, le procureur général doit entendre l’officier de police judiciaire. Ce dernier peut prendre connaissance du dossier relatif aux faits qui lui sont reprochés et se faire assister d’un conseil de son choix.
La Cour de cassation a eu l’occasion de juger que cette procédure offre à l’intéressé des garanties suffisances de nature à préserver ses droits, conformément à l’article 6§1 de la Convention européenne des droits de l’Homme [11].
On précisera que l’OPJ, dont l’habilitation a été suspendue reprendra de plein droit, à l’expiration de la suspension, l’exercice des attributions attachées à sa qualité. Par ailleurs, le procureur général peut abréger la durée de la suspension. Une demande en ce sens peut donc être présentée si des faits nouveaux le justifient.
Toutefois, après un retrait, il est prévu que "l’habilitation ne peut être rendue que dans les mêmes formes que celles prévues pour son attribution initiale".
En cas de refus, de suspension ou de retrait d’habilitation, l’intéressé dispose de la possibilité de demander au procureur général de rapporter cette décision. Ce dernier dispose alors d’un délai d’un mois pour statuer. À défaut, son silence vaut rejet de la demande [12].
Le Code de procédure pénale reste silencieux concernant la procédure à suivre dans le cadre de ce recours préalable obligatoire. Il n’est donc pas interdit de solliciter à cette occasion l’audition de l’intéressé en justifiant du caractère légitime d’une pareille demande alors que, normalement, il a déjà été entendu par le procureur général.
En cas de rejet implicite ou explicite de ce recours, l’intéressé peut former un recours devant une commission composée de trois magistrats de la Cour de cassation qui ne manquera pas de prononcer une décision motivée suivant une procédure permettant un débat oral en chambre du conseil [13].