Village de la Justice : Pourquoi, comment en êtes-vous venu à exercer votre métier en milieu transfrontalier ?
Alexandre Brumpter : « Je suis moi-même originaire d’Alsace, où j’ai suivi mon parcours universitaire et ma formation au métier de notaire. J’exerce depuis 2019 au sein de l’étude de Lingolsheim, qui est une ville adjacente à Strasbourg, donc proche de la frontière allemande.
La proximité géographique de l’Allemagne favorise tout naturellement le traitement de dossiers impliquant une clientèle allemande ».
Quelles sont les particularités d’un tel exercice (formation au droit du pays voisin, relations avec vos confrères/juridictions étrangers, méthode de travail, outils de travail...) ?
« Le cursus de formation au métier de notaire n’intègre pas de formation spécifique au droit allemand. J’ai pour ma part suivi la formation du magistère de juriste d’affaire franco-allemand en parallèle de mon Master, puis j’ai régulièrement suivi des formations continues.
Dans les dossiers franco-allemands où j’interviens, je travaille en relation régulière avec divers autres professionnels du droit et du chiffre tant en Allemagne qu’en France. Je travaille notamment avec des avocats et des notaires allemands, ainsi qu’avec les experts-comptables et les conseillers fiscaux (Steuerberater) de nos clients.
Il est à noter que le notaire français a un domaine d’intervention qui diffère de celui de ses homologues allemands. En Allemagne, les questions fiscales sont traitées par les notaires en partenariat avec les “Steuerberater”. En France, le notaire intervient lui-même dans la déclaration et la collecte de divers impôts (droits de succession et de donation, plus-values immobilières par exemple) ».
Pourriez-vous nous indiquer les procédures, dossiers les plus fréquents, les plus demandés ?
« J’interviens essentiellement en matière de vente immobilière (lorsque par ex. des clients allemands vendent ou achètent des biens immobiliers situés en France), mais également en matière de succession, lorsqu’il y a un aspect transfrontalier (défunt domicilié en Allemagne et possédant des biens en France par ex.).
Il existe une convention fiscale franco-allemande, qui est parfois méconnue et mal appliquée, notamment en matière de droits de donation. Il m’est ainsi arrivé d’assister des clients pour régulariser leur situation fiscale, en suite de donations passées en Allemagne et jamais déclarées en France ».
Quels sont les points forts d’une telle situation dans la pratique de votre métier ?
« La maîtrise de la langue allemande et du droit international privé est un plus pour notre activité, surtout dans notre région frontalière. Nous pouvons accompagner nos clients allemands et les conseiller dans leur langue maternelle, ce qui répond à une vraie demande de leur part lorsqu’ils ne maîtrisent pas le français. Cela est d’autant plus vrai dans des dossiers qui peuvent être compliqués où les enjeux financiers sont importants ».
La langue est-elle une barrière ? Faites-vous appel à des traducteurs ou avez-vous au sein de votre étude un service de traduction ?
« J’ai moi-même étudié 3 ans en Allemagne dans ma jeunesse, je n’ai donc aucun problème à m’exprimer en allemand à l’écrit ou à l’oral.
Notre étude comprend par ailleurs au total 4 personnes (notaires et notaires assistants) maîtrisant suffisamment bien l’allemand pour pouvoir interagir directement avec les clients, sans passer par les services d’un traducteur.
Les outils modernes à notre disposition (notamment les logiciels de traduction) nous permettent par ailleurs de gagner du temps lorsqu’il s’agit de communiquer par e-mail ».
Le parcours professionnel d’Alexandre Brumpter :
J’ai suivi un cursus universitaire orienté vers le droit privé à l’université de Strasbourg.
Après avoir obtenu un Master 2 de droit notarial, j’ai suivi la filière du diplôme supérieur du notariat (sur 2 ans), d’où je suis sorti diplômé en 2011 avant de réussir le concours d’aptitude aux fonctions de notaire en Alsace-Moselle en 2013. (Une particularité du statut des notaires alsaciens-mosellans est qu’il est nécessaire d’être admis à un concours spécifique pour être titulaire d’une étude en Alsace-Moselle).
J’ai été formé et j’ai travaillé pendant une dizaine d’années dans une étude située dans le vignoble Bas-Rhinois avant d’intégrer l’étude de Lingolsheim, où je suis aujourd’hui notaire associé.