Forum : Questions pratiques des avocats

Sujet : Besoin d'aide pour ma première plaidorie!!!

Toutes les questions simples ou non que l'on se pose en débutant... ou plus tard !

Besoin d'aide pour ma première plaidorie!!!

de lilou1983   le Dim 08 Mar 2009 18:05

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Bonjour,

Je suis élève avocate. Mercredi, je passe ma première plaidoirie devant le TGI, devant des vrais magistrats, et en robe.

Je suis publiciste, et même si lors de mes stages, j'ai assisté à de telles audiences, je dois avouer que je suis un peu perdue.

L'école m'a donnée un dossier composé de PV, d'interrogatoires, et de pièces diverses.

Je suis avocate de la partie civile.

Une dame s'est faite agressée en rentrant de son travail par 2 individus. C'est un vol de sac à l'arrachée. Elle est tombée et s'est fracturée le genou. Elle n'a plus son sac, est en état de choc et a une ITT de plus 6 semaines.

Déjà, je commence par "Monsieur le Président, mesdames et messieurs de la Cour".

Je dis que l'infraction est constituée.

Puis, je développe les préjudices:
- préjudice matériel: valeur de sac et de son contenu (600 euros)
- préjudice du manque à gagner: elle n'a pas pu travailler pendant 6 semaines (c'est une commerçante) (5000 euros)
- préjudice moral: le traumatisme de l'agression (1000 euros)
- préjudice physique: blessure au genou (2000 euros)

Ensuite, je demande la condamnation aux dépens, et également, l'article 475-5 du Code de procédure pénale (1500 euros)

Soit un total de 10100 euros.

Cela semble-t-il acceptable?

Enfin, je voudrais savoir dans quelle mesure je peux aborder l'infraction en tant que telle? Dois je m'en tenir uniquement au préjudice? Ou est ce que je peux parler de l'attitude des prévenus (récidives, refus d'admettre leur implication)???

Comment dois je conclure la plaidoirie??

J'ai assez peur car j'ai peur de faire une grosse erreur au niveau du droit (avant de parler à une amie, j'allais demander une peine de prison :oops: )

Merci beaucoup de votre aide :D [/b]

   

de Kleinaster   le Lun 09 Mar 2009 17:38

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Vous avez fort bien fait d'en parler à votre amie !

Pour reprendre votre plaidoirie :

1) Vous ne devriez pas dire "Mesdames et Messieurs de la Cour" puisque ce n'est pas une cour mais un tribunal, en l'occurrence le tribunal de grande instance et, je suppose, le tribunal correctionnel, s'agissant d'un vol. Dîtes en ce cas : "Monsieur/Madame le Président, Mesdames/Messieurs les juges". A la place de juges, vous pouvez peut-être entendre parfois "assesseurs".

2) Ne plaidez pas en effet sur le droit pénal et la constitution de l'infraction. Vous risqueriez de vous faire interrompre par le Président. Cela revient au ministère public qui s'exprimera après vous. Vous n'intervenez pas pour requérir une condamnation pénale du prévenu mais sa condamnation civile, c'est-à-dire sa condamnation à dommages-intérêts.

De parole de Vice-Procureure, l'avocat de la partie civile peut introduire sa plaidoirie par quelque chose comme : "L'infraction reprochée au prévenu, et effectivement caractérisée en tous ses élements comme vous l'exposera dans un instant Monsieur le Procureur de la République, a causé au détriment de ma cliente un certain nombre de préjudices".

3) Plaidez alors sur les intérêts civils en justifiant vos demandes de dommages-intérêts. Fournissez tous éléments en ce sens : certificats médicaux, témoignages, comptabilité, factures etc. Vous êtes libre du chiffrage de votre demande mais bien entendu, il convient de rester sensé et raisonnable.

Si les éléments de l'infraction vous sont nécessaires pour justifier vos demandes, vous pouvez les exploiter. Par exemple : la violence particulière, la brutalité, les propos tenus envers la victime. Pour le reste, le fait qu'il soit primodélinquant ou récidiviste n'intéresse que le parquet, pas la partie civile.

Toujours de parole de Vice-Procureure, la partie civile peut éventuellement se permettre de revenir sur les éléments de l'infraction lorsque, par exemple, lors de l'interrogatoire d'audience, le prévenu a donné des éléments ou une version avec laquelle la victime n'est pas en accord ou lorsqu'un point intéressant n'a pas été abordé préalablement à l'audience. L'avocat peut alors se permettre une digression : "Monsieur/Madame le Président, sans empiéter sur les attributions de Monsieur le Procureur, je souhaiterais souligner brièvement un point : (...). Il était important pour ma cliente que cela soit souligné."

4) Autant vous pouvez faire état dans votre plaidoirie de votre demande d'article 475-5, autant il n'y a pas lieu de faire état d'une demande de condamnation aux dépens. C'est bon pour le procès civil mais pas franchement pour le procès pénal.

5) Vous pouvez conclure par un simple : "Je vous remercie."

   

de lilou1983   le Lun 09 Mar 2009 19:06

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Je vous remercie énormément, cela m'aide beaucoup!!!

J'ai juste deux dernières questions.

La première est relative à la constitution de partie civile.

Dans mon dossier, j'ai un document de l'"aide aux victimes et à la médiation" dans lequel ma cliente se constitue partie civile, pour une CI à une certaine date.

Cependant, le procès est repoussé.

- le document est-il valable, même si l'audience est reportée?
- dois-je rappeler que nous nous sommes constitués partie civile au début de la plaidorie??

La seconde question est relative à la CPAM. Je sais que je dois mettre en cause la CPAM. En temps normal, cela se fait pas lettre recommandé, et cela apparait dans les conclusions écrites.

Dans mon cas (juste une plaidoirie), puis-je dire, lorsque je demande de déclarer recevable ma constitution de partie civile, que la CPAM a été mise en cause, par lettre recommandée?

Après reflexion, je vais présenter les chose ainsi:
- rappeler des faits
- demander de condamnation
- demander de déclarer recevable la constitution de partie civile
- demander renvoi sur intérêt (car je n'ai pas assez d'éléments)
- à titre subsidiaire (si refus du renvoi), j'évalue le préjudice
- article 475-5

Cela semble-t-il suffisant?

Merci encore :D

   

de Kleinaster   le Mar 10 Mar 2009 12:37

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La constitution de partie civile peut intervenir à tout moment, même à l'audience. C'est ce que prévoit l'article 418 du Code de procédure pénale. Par conséquent, qu'un papier de l'aide aux victimes et à la médiation mentionne une constitution de partie civile pour une date passée ne me semble pas avoir beaucoup de conséquences.

Partant, vous auriez mieux intérêt à annoncer la constitution de partie civile de votre cliente dès le début de votre plaidoirie. Ca n'est pas cohérent de l'annoncer après avoir demandé les condamnations.

Concernant la CPAM, c'est la CPAM qui se constitue partie civile pour obtenir du prévenu le remboursement des prestations qu'elle a versées à votre cliente. Votre cliente les ayant déjà perçues au titre de l'ITT, elle n'est plus recevable en effet à demander la condamnation du prévenu à ce titre. En revanche, la CPAM peut exercer son recours subrogatoire pour en obtenir le remboursement auprès du prévenu. Vos demandes de dommages-intérêts sont donc limitées aux préjudices dont la CPAM n'a pas déjà indemnisé votre cliente. Dès lors, la mise en cause de la CPAM par vos soins apparaît curieuse.

Attention à votre demande de renvoi. Ca ne me semble pas cohérent de demander un renvoi pour cause d'insuffisance d'éléments permettant de chiffrer le préjudice tout en le chiffrant ensuite, à titre subsidiaire. Soit vous êtes capable de le chiffrer, soit vous ne l'êtes pas du tout. Si vous demandez le renvoi, n'attendez pas la fin de votre plaidoirie : demandez-le immédiatement. Mais ne le demandez que si vraiment vous manquez d'éléments.

Quant au rappel des faits, ce n'est peut-être pas utile car le Président l'aura déjà fait avant vous et l'interrogatoire d'audience aura permis de les préciser. Si vous le souhaitez, faîtes une phrase de rappel général mais pas plus.

D'une manière générale, sachez une chose : la plaidoirie n'a jamais été un discours-type avec une introduction, deux parties, quatre sous-parties. La plaidoirie reste quelque chose de vivant qui se vit en cours d'audience et qui doit être adapté au gré des circonstances propres à chaque espèce, à chaque juridiction. Or, au tribunal correctionnel, à plus forte raison en comparution immédiate, n'oubliez pas : on juge à la chaîne.

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