La réception doit néanmoins être contradictoire, comme prévu par l’article 1792-6 du code civil. La réception émane du maître d’ouvrage. Le maître d’ouvrage est celui pour le compte duquel les travaux sont réalisés. La notion d’ouvrage n’est pas définie par la loi. Schématiquement, il s’agit du résultat des travaux confiés à un tiers.
Toujours selon l’article 1792-6 du Code civil, la réception intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement.
La réception peut en effet revêtir 3 formes :
- La réception expresse :
La réception est prononcée de manière explicite. Il peut être établi à cette occasion un procès-verbal dans lequel est exprimée la volonté du maître d’ouvrage, et où sont mentionnées les éventuelles réserves formulées par celui-ci.
- La réception tacite :
A l’inverse, la réception ne sera pas formalisée. Ceci peut poser des difficultés en matière de preuve. Les juridictions font application d’un faisceau d’indices pour considérer qu’une réception tacite est intervenue.
Ainsi, le paiement intégral du marché et la prise de possession de l’ouvrage réalisé pourra être considéré comme valant réception tacite (En ce sens notamment : Civ . 3ème, 19 octobre 2010, n° 09-70715). Le constat d’une réception tacite ne dispense pas le juge de vérifier que les éléments de cette réception sont réunis.Il sera ainsi nécessaire de déterminer la date à laquelle est intervenue la réception tacite (Civ. 3ème, 30 mars 2011, n° 10-30116).
- La réception judiciaire :
Cette dernière est expressément envisagée par l’article 1792-6 du Code civil. Elle intervient à défaut de réception amiable. On conçoit mal qu’une réception judiciaire soit demandée par le maître d’ouvrage. En effet, la réception étant un acte du maître de l’ouvrage, il suffit à celui-ci de prononcer amiablement la réception en déclarant accepter l’ouvrage. La réception judiciaire paraît davantage être destinée à la situation de l’entreprise confrontée à un maître d’ouvrage qui refuse d’accepter ses travaux. En l’absence de réception amiable, il sera possible de saisir le juge pour lui demander la réception judiciaire des travaux.
Selon la jurisprudence, il n’est pas nécessaire que les travaux soient achevés pour être réceptionnés (cf. notamment : Civ. 12 juillet 1989, n° 88-10037, Civ. 3ème, 9 octobre 1991 n° 90-14739, dans lequel la Cour de cassation statue ainsi : « l’achèvement de l’ouvrage n’étant pas une des conditions nécessaires de la réception », Civ. 3ème, 17 novembre 2004, n° 03-10202).
Néanmoins, selon un arrêt récent de la Cour de cassation du 11 janvier 2012 des travaux inachevés ne peuvent faire l’objet d’une réception judiciaire car portant sur un immeuble ne pouvant être mis en service en raison des désordres l’affectant (Civ. 3ème, 11 janvier 2012, n° 10-26898). Il avait précédemment été jugé qu’un ouvrage peut faire l’objet d’une réception judiciaire, dès lors qu’il est habitable (Civ.3ème, 29 mars 2011, n°10-15824). Aussi, il semble ressortir de la jurisprudence qu’un ouvrage ne peut faire l’objet d’une réception judiciaire que si sa réalisation est dans un état d’avancement suffisant.
La réception, qu’elle soit expresse, tacite ou judiciaire, peut être prononcée purement et simplement ou être assortie de réserves. Ces réserves sont nécessaires pour les vices apparents. A défaut, le maître d’ouvrage perdra toute possibilité d’action pour ces désordres (en ce sens notamment : Civ. 3 ème, 16 décembre 1987, n° 86-15444, Civ. 3ème, 8 novembre 2005, n° 04-16932, Civ. 3éme, 26 septembre 2007, n° 06-16207). On dit que la réception sans réserve a un effet de purge pour les désordres apparents.
Ceci concerne également les défauts de conformité aux prestations contractuellement convenues. C’est ce qui ressort notamment d’un arrêt rendu par la Cour de cassation le 3 juillet 2007 (Civ. 3éme, 26 septembre 2007, n° 06-16207).
Par ailleurs, pour les désordres apparents, qu’ils aient ou non fait l’objet de réserves, la responsabilité décennale des constructeurs ne pourra être recherchée. Selon un arrêt rendu par la Cour de cassation le 7 juillet 2004, il appartient au maître d’ouvrage de rapporter la preuve du contenu des réserves et du caractère caché des désordres dont il se prévaut (Civ. 3ème , 7 juillet 2004, n° 03-14166). Toutefois, il a été jugé que la réception n’a d’effet libératoire pour les constructeurs que pour les défauts connus par le maître d’ouvrage dans toute leur ampleur et leurs conséquences (En ce sens notamment : Civ . 3ème, 18 décembre 2001, n° 00-18211).
La réception marque le point de départ des garanties prévues par les articles 1792 et suivants du Code civil. Ces garanties sont les suivantes :
- La garantie de parfait achèvement.
Cette garantie est d’une durée d’un an à compter de la réception (article 1792-6 du Code civil). - La garantie biennale des éléments d’équipement.
Cette garantie est d’une durée de deux ans à compter de la réception (article 1792-3 du Code civil). - La garantie décennale.
Cette garantie concerne les désordres de construction les plus graves (article 1792 du Code civil).
Elle est d’une durée de 10 ans à compter de la réception des travaux (article 1792-4-1 du Code civil).
Toute action engagée à l’encontre des constructeurs liés au maître d’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage au-delà de ce délai de dix ans, sauf cas résiduels, se heurterait à la prescription. Ainsi, la date et les modalités de la réception sont des données fondamentales dans le domaine de la responsabilité des constructeurs. Ceci déterminera le fondement de l’action formée à l’encontre des constructeurs, la possibilité d’une telle action, comme la date jusqu’à laquelle une demande sera susceptible d’être accueillie.