La rétention du permis de conduire.

Par Didier Reins, Avocat.

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Explorer : # infractions routières # rétention de permis # procédure légale # sanctions

La rétention du permis de conduire est une décision prise par les forces de l’ordre, police ou gendarmerie, qui vous prive provisoirement du droit de conduire. Elle fait suite à la commission d’une infraction au Code de la route ou d’un accident de la circulation. Cette mesure sera applicable pendant 72 ou 120 heures, selon les circonstances. Explications.

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1. Les infractions au Code la route pour lesquelles votre permis de conduire peut faire l’objet d’une mesure de rétention.

Certaines infractions au Code de la route entraineront la rétention de votre permis de conduire.

Les hypothèses sont les suivantes :

  • Conduite avec 0,8 g ou plus d’alcool par litre de sang
  • Conduite en état d’ivresse manifeste
  • Refus de se soumettre aux vérifications concernant l’état d’alcoolémie
  • Conduite sous l’emprise de stupéfiants
  • Refus de se soumettre aux vérifications concernant l’usage de stupéfiants
  • Dépassement de 40 km/h ou plus de la vitesse maximale autorisée, établi au moyen d’un appareil homologué avec interception du véhicule
  • En cas d’accident de la circulation ayant entraîné la mort d’une personne ou ayant causé un dommage corporel, si vous êtes soupçonné d’avoir enfreint les règles d’usage du téléphone tenu en main, de vitesse, de croisement, de dépassement, d’intersection ou de priorité de passage
  • Conduite en tenant un téléphone en main lorsque le conducteur commet en même temps certaines infractions au Code de la route. Il s’agit des infractions suivantes : règles de conduite, distance de sécurité entre les véhicules, franchissement et chevauchement des lignes continues, feux de signalisation, vitesse, dépassement, signalisations imposants l’arrêt ou le cédez le passage à une intersection, et priorités de passage à l’égard des piétons
  • Refus d’obtempérer.

Si vous avez commis l’une des infractions précitées, ou que de forts soupçons pèsent sur vous, les forces de l’ordre procèderont à la rétention de votre permis de conduire.

2. Les hypothèses dans lesquelles l’infraction au Code de la route est constatée.

Votre permis de conduire fera donc l’objet d’une mesure de rétention si l’on peut vous reprocher d’avoir commis une infraction au Code de la route.

Cette infraction sera constatée dans les cas suivants :

  • Le contrôle routier aléatoire.

Les forces de l’ordre, police ou gendarmerie sont autorisées à effectuer des contrôles routiers aléatoires, c’est-à-dire à se placer à un endroit précis de la voie publique (intersection, feu rouge, rond point etc.) et à arrêter tous les véhicules qui passent pour faire, par exemple, un contrôle d’alcoolémie ou de stupéfiants.

  • À l’occasion d’un accident de la route.

Si vous êtes impliqué(e) dans un accident, les forces de l’ordre appelées à cette occasion peuvent décider d’une mesure de rétention de votre permis de conduire (si bien sûr vous avez commis l’une des infractions au Code de la route précitées)

Il importe peu que l’accident ait causé des blessés ou non.

Il importe peu que vous soyez le responsable de cet accident ou simplement la victime.

Exemple : vous commettez un accident. Les forces de l’ordre arrivent sur place et soumettent toutes les personnes impliquées à un contrôle d’alcoolémie.

Si ce contrôle est positif, c’est-à-dire si votre taux d’alcoolémie dépasse la limite légale, une mesure de rétention de votre permis de conduire sera automatiquement prise à votre encontre.

  • À l’occasion d’un excès de vitesse supérieur à 40 km/h.

Cette hypothèse suppose que les forces de l’ordre, placées au bord de la route lors d’un contrôle aléatoire, constatent à l’aide de jumelles, la commission d’une telle infraction et vous arrêtent sur place.

3. La procédure.

Concrètement, les choses se dérouleront ainsi :

  • tout d’abord, les forces de l’ordre constatent la commission d’une infraction au Code de la route
  • celles-ci prendront alors votre permis de conduire (si vous n’avez pas votre permis avec vous, vous aurez 24 heures pour le remettre)
  • il vous sera remis un avis de rétention.

Précision importante : Il sera inutile d’essayer de discuter, parlementer ou négocier quoi que ce soit.

4. L’avis de rétention.

L’avis de rétention est constitué de 8 parties distinctes, précédées d’un en-tête, figurant au recto.

En tête de l’avis de rétention : l’adresse du service de police ou de gendarmerie.

Celle-ci se situe en haut à gauche de l’avis de rétention et indique les coordonnées de la gendarmerie ou du poste de police dont les représentants viennent de vous retirer votre permis de conduire.

1ère partie : l’autorité qui a décidé de procéder à la rétention du permis de conduire.

Vous y trouverez le nom et le grade ou la fonction du gendarme ou du policier qui a pris votre permis.

2nde partie : la date et l’heure de l’infraction qui vous est reprochée.

Conseil : soyez attentif et vérifiez bien que toutes les mentions soient exactes.

La moindre erreur peut être utile dans le cadre d’une défense devant le tribunal.

3ème partie : le motif de la décision de rétention.

Ici figurera le motif de la rétention de votre permis de conduire que le policier ou le gendarme indiquera parmi les possibilités suivantes :

  • alcool au volant
  • conduite sous produits stupéfiants
  • accident de la circulation
  • grand excès de vitesse.

4ème partie : les renseignements vous concernant.

Ici figureront les éléments de votre identité : nom, prénom, date de naissance, adresse, profession et numéro de téléphone.

5ème partie : les éléments relatifs à votre permis de conduire.

Votre permis de conduire contient différentes mentions qui seront retranscrites ici : numéro du permis, date d’obtention, catégorie de véhicule visée et l’indication de la préfecture qui a délivré ce titre.

6ème partie : les infractions connexes.

Les forces de l’ordre indiqueront ici si vous avez commis des infractions supplémentaires, c’est-à-dire venant s’ajouter à celle justifiant la mesure de rétention.

Cette mention est importante, car elle pourra jouer une certaine influence sur la décision de suspension que pourra prendre le préfet par la suite, et notamment sur sa durée.

7ème partie : indication du service détenteur de votre permis de conduire.

Le service détenteur indiqué est celui qui conservera votre permis de conduire pendant toute la durée de la détention.

Il s’agit souvent de la même adresse figurant sur l’en-tête.

8ème partie : la clôture.

C’est ici que l’on vous demandera de signer.

Attention : il ne sert à rien de refuser de signer.

Cela n’empêchera pas la mesure de rétention et cela n’affectera nullement la procédure.

Enfin, il faut savoir qu’au verso de l’avis de rétention figurent des informations sur la mesure qui vient d’être prise contre vous.

Il s’agit en quelque sorte d’un mode d’emploi de la rétention.

4. Les suites données à la rétention de votre permis de conduire.

La durée de la rétention du permis de conduire est de 72 ou 120 heures selon les cas :

  • 72 heures dans la plupart des infractions prévues
  • 120 heures dans les cas de conduite sous alcool ou stupéfiants.

Ce délai servira à effectuer certaines mesures de contrôle (notamment en cas d’alcool au volant).

Le préfet profitera également de ce délai pour prendre une éventuelle mesure de suspension de votre permis de conduire à votre encontre.

Ensuite, tout dépendra...

Si aucune infraction n’est finalement retenue contre vous, votre permis vous sera rendu.

Il vous suffira de vous rendre auprès du service détenteur tel qu’indiqué sur la partie numéro 7 de l’avis de rétention.

Attention : vous avez un délai de 12 heures à compter de l’expiration de la période de rétention pour aller chercher votre permis de conduire.

Si vous ne vous déplacez pas pour récupérer votre permis, celui-ci vous sera envoyé par courrier en recommandé avec accusé de réception.

Par contre, si l’infraction est confirmée, le préfet prendra contre vous une mesure de suspension de votre permis de conduire qui peut aller jusqu’à 1 an.

Votre dossier sera ensuite transmis au parquet qui décidera des suites judiciaires à donner.

5. La violation de la mesure de rétention du permis de conduire.

Attention : durant toute la durée de la rétention, il vous est interdit de conduire.

L’article L224-16 du Code de la route est sans ambiguïté et dispose :

« I.- Le fait pour toute personne, malgré la notification qui lui aura été faite d’une décision prononçant à son encontre la suspension, la rétention, l’annulation ou l’interdiction d’obtenir la délivrance du permis de conduire, de conduire un véhicule à moteur pour la conduite duquel une telle pièce est nécessaire est puni de deux ans d’emprisonnement et de 4 500 euros d’amende.
II.- Toute personne coupable du délit prévu au présent article encourt également les peines complémentaires suivantes :
1° La confiscation obligatoire du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire. La juridiction peut toutefois ne pas prononcer cette peine, par une décision spécialement motivée. La confiscation n’est pas obligatoire lorsque le délit a été commis à la suite d’une des mesures administratives prévues aux articles L224-1, L224-2 et L224-7.
2° La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension ne pouvant pas être limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle
3° La peine de travail d’intérêt général selon des modalités prévues à l’article 131-8 du Code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code et à l’article L122-1 du Code de la justice pénale des mineurs
4° La peine de jours-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du Code pénal
5° L’interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n’est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus
6° L’obligation d’accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière.
III.-Toute personne coupable du délit prévu au présent article, dans les cas où il a été commis à la suite d’une décision de suspension ou de rétention du permis de conduire, encourt également la peine complémentaire d’annulation de ce permis, avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant trois ans au plus.
IV.-L’immobilisation peut être prescrite dans les conditions prévues aux articles L325-1 à L325-3.
V.-Le délit prévu au présent article, dans le cas où il a été commis à la suite d’une décision de suspension ou de rétention du permis de conduire, donne lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre maximal de points du permis de conduire
 ».

Les conséquences sont donc lourdes.

Si vous conduisez malgré tout, il s’agit là d’un délit dont les peines principales encourues seront un emprisonnement de 2 ans et d’une amende de 4 500 euros.

Des peines complémentaires sont aussi prévues, parmi lesquelles :

  • la confiscation du véhicule
  • la suspension judiciaire de votre permis pour 3 ans
  • un travail d’intérêt général
  • une interdiction de conduire un véhicule pour une durée de 5 ans
  • l’obligation d’accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière
  • l’annulation du permis de conduire avec interdiction de repasser le permis pendant 3 ans.

La peine principale et les peines complémentaires se décideront devant le tribunal correctionnel.

A cela se rajoutera la perte sèche de 6 points sur votre permis de conduire.

Ce retrait de points s’ajoutera en outre au retrait de points opéré à la suite de l’infraction pour laquelle votre permis de conduire a fait l’objet d’une mesure de rétention, ce qui signifiera pour de nombreux conducteurs l’invalidation pure et simple de leur permis.

Il ne faut donc pas prendre une telle mesure à la légère, même si elle est de courte durée.

Didier Reins, Avocat au barreau de Strasbourg
reins.avocat chez gmail.com
https://reinsdidier-avocat.com

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