Forum : Questions techniques et entraide entre juristes
Echanges sur des points de droit.
Recouvrement de créances
de
Hervé
le Mer 04 Juin 2008 13:13
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Profession: Juriste
Bonjour,
J'ai une petite question à laquelle je pense avoir une idée de la réponse, mais j'aimerais juste une confirmation.
Une société X, française, dispose d'une créance au titre d'un contrat conclu en France avec un débiteur consommateur français domicilié en France au jour de la signature du contrat, qui a trouvé sa réalisation en France. Le débiteur part vivre à l'étranger sans avoir soldé sa dette (je précise que ce n'est pas moi hein).
Quel est le droit applicable et quel tribunal est compétent ? A mon avis, le tribunal compétent serait celui du domicile du débiteur (défendeur en l'occurrence) donc le tribunal étranger. Le droit applicable serait le droit français. Quelqu'un pour confirmer ? C'est plutôt important pour des questions de forclusion par exemple
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...
de
plyx
le Mer 04 Juin 2008 13:41
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Profession: Juriste
Hervé,
Je suis d'accord sur le principe de la compétence du tribunal situé dans le ressort du domicile du débiteur et défendeur, mais pour ce qui est de l'étranger, je ne suis pas aussi certaine que vous.
Ne doit-on pas se référer à l'éventuelle élection de domicile au moment de la signature du contrat?
Ainis je serai tentée de vous répondre que le tribunal compétent est celui dans le ressort du domicile du débiteur au moment de la signature du contrat.
Par bonheur, la convention mentionne peut être une clause attributive de compétence, dans ce cas, pas de pb.
Bien à vous.
de
Hervé
le Mer 04 Juin 2008 14:11
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Profession: Juriste
Certes, PLyx, mais nous sommes en l'occurrence dans une relation professionnel - consommateur. Donc les clauses attributives de compétence ne sont pas valides. De plus, l'élection de domicile au moment de la signature du contrat figerait définitivement la compétences ? J'aurais dit que cette compétence se juge au moment d'agir pas au moment de contracter... Si ?
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...
de
Kleinaster
le Mer 04 Juin 2008 14:27
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Profession: Avocat
Pour répondre correctement à votre question, deux éléments doivent être précisés :
- Quel est l'Etat dans lequel réside le débiteur ?
- Quel est l'objet du contrat ?
S'agissant de l'objet, veillez à être précis car les cas spéciaux faisant exception à la règle de principe sont nombreux et variés.
de
Hervé
le Mer 04 Juin 2008 14:59
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Profession: Juriste
Le débiteur réside hors UE, au Maroc (et je reprécise que c'est pas moi, mais un français que j'ai rencontré ici...). L'objet du contrat est un prêt (revolving ou prêt à la conso, ce qui au regard du droit français est similaire pour ce qui est du recouvrement et de la prescription).
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...
de
Kleinaster
le Mer 04 Juin 2008 16:29
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Profession: Avocat
Sur le conflit de lois, il n'y en a pas selon moi dans la mesure où l'élément d'extranéité est apparu postérieurement à la conclusion et l'exécution du contrat. Quand bien même la question de la détermination de la loi applicable se poserait, il y aurait lieu de la résoudre par application de la règle selon laquelle la loi applicable au contrat est celle choisie par les parties ou, à défaut, celle avec laquelle il présente les liens les plus étroits, en raison essentiellement soit du lieu de sa conclusion, soit du lieu de son exécution. Or, s'agissant d'un contrat de crédit à la consommation conçu par un établissement de crédit et régi par des dispositions spéciales du Code de la consommation, le contrat doit certainement mentionner la loi française voire se référer aux articles dudit Code auxquels il se rattache. En tous les cas, à défaut de telles mentions, le contrat ayant été conclu et exécuté en France, la loi française devrait avoir vocation à s'appliquer.
Sur le conflit de juridictions, il est avéré dans la mesure où se présente un élément d'extranéité caractérisé par la différence d'Etats dans lesquels résident les parties. L'un de ces Etats n'étant pas membre de l'UE, il n'est pas possible de se référer au droit communautaire, en particulier le règlement de Bruxelles. Il n'y a pas, à ma connaissance, de Convention franco-marocaine sur la compétence judiciaire. Les règles de droit commun du droit international privé ont donc vocation à s'appliquer. La compétence internationale des juridictions françaises est ainsi déterminée par extension des règles de compétence interne : il faut étendre à l'international les dispositions des articles 42 et suivants du Code de procédure civile.
C'est ainsi que l'ordre juridictionnel national compétent est par principe celui de l'Etat dans lequel demeure le défendeur. Toutefois, en matière contractuelle, l'article 46 du Code permet au demandeur de saisir l'ordre juridictionnel national de l'Etat dans lequel la chose a été effectivement livrée ou la prestation de service exécutée. Or, il apparaît que le crédit à la consommation a été utilisé en France, avant l'expatriation du défendeur. Dès lors, la Justice française serait compétente.
Enfin, au sein de l'ordre juridictionnel français, il faut déterminer la juridiction matériellement et territorialement compétente. Elle est déterminée par la loi du for, en l'espèce la loi française. L'article L. 321-2-3 du Code de l'organisation judiciaire donne ainsi compétence au tribunal d'instance en matière de crédit à la consommation. L'article 42 du Code donne, quant à lui, liberté au demandeur de saisir la juridiction du lieu de son choix en cas de défendeur résidant à l'étranger. En définitive, vous devriez pouvoir saisir n'importe quel tribunal d'instance français de votre choix.
de
Hervé
le Mer 04 Juin 2008 17:10
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Profession: Juriste
Je vous remercie Kleinaster pour votre analyse et votre réponse très structuré et précise.
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...
de
Nicolas Gioan
le Lun 16 Juin 2008 18:20
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Profession: Juriste
Ma contribution s'avère être une intérrogation.
Un beau jugement ne sert à rien si l'on n'a pas anticipé les voies d'execution qui vont devoir être mises en oeuvre.
Dès lors, votre débiteur possède-t-il toujours des actifs en france ?
Car l'exequatur et une exécution forcée au maroc peut relever du safari ( j'ai payé pour savoir dans un pays proche... la tunisie... sans l'assistance du corp diplomatique j'y serais toujours dessus)
de
Nemo auditur
le Lun 16 Juin 2008 19:56
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Profession: Juriste
Impliquez la DREE, ils sont là pour ça !
de
Hervé
le Mar 17 Juin 2008 8:44
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Profession: Juriste
En fait, pour ce qui est de l'exécution j'ai des contact tout à fait pertinents sur la question. Il faut savoir que le droit marocain envoie en prison les mauvais payeurs (chèques sans provision, impayé sur des crédits). La différence de traitement avec le droit français est loin d'être négligeable pour le coup
Nemo: la DREE peut effectivement jouer ce rôle là, mais le rapport entre le coût et le montant de la créance peut être rédhibitoire (petit conseil à tous: renseignez-vous sur les prix avant de lancer la DREE !!).
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