Forum : Questions techniques et entraide entre juristes

Sujet : Rupture "brutale" des relations commerciales

Echanges sur des points de droit.

de Erick   le Mer 13 Juin 2007 12:19

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ConsoConcurrDistriM2pro a écrit :une mine d'or pour mon mémoire :lol:

Merciii :)

Petit commentaire quand meme sur la décision de Cour d'Appel dans l'affaire MEGAMIX /OPERA... je la trouve ahurissante, elle laisse totalement de côté la puissance des centrales d'achat en avançant qu'OPERA n'a fait que rechercher des fournisseurs, qu'elle n'a pas commercialisé, en gros qu'elle n'a pas d'agissement commercial et que les groupes Casino et Cora gardent une totale indépendance... ça me semble un petit peu loin de la réalité..

Y a pas eu de pourvoi?


Bonjour,

Non, il n'y a pas eu de pourvoi, et pour cause... OPERA n'était pas une centrale d'achat (qui achète les produits pour les revendre) mais une centrale de référencement...

En cette qualité, OPERA n'achetait pas les produits des fournisseurs pour les revendre, elle se contentait de les sélectionner pour les présenter à ses adhérents (CASINO et CORA) et offrait des services de centralisation des négociations.

Elle était en toute hypothèse tiers aux contrats de vente conclus directement entre les fournisseurs et les distributeurs adhérents.

Il est donc tout a fait cohérent que sa responsabilité ne puisse être retenue sur le terrain de la rupture brutale des relations commerciales dans la mesure où elle ne prend pas la décision d'interrompre ou de diminuer les commandes.

Cdt.

   

de Hervé   le Mer 13 Juin 2007 22:27

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IL s'agit d'une approche purement juridique et pas vraiment économique dans la mesure où déréférencer un fournisseur potentiel, ça revient à lui couper toutes les commandes existantes avant, même si référencer un fournisseur ne veut pas dire lui garantir des commandes. C'est sur cette nuance que s'appuie le droit, alors qu'économiquement, quand on parle de grande distribution, la nuance est plus sibylline...
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...

   

de Erick   le Jeu 14 Juin 2007 9:45

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Hervé a écrit :IL s'agit d'une approche purement juridique et pas vraiment économique dans la mesure où déréférencer un fournisseur potentiel, ça revient à lui couper toutes les commandes existantes avant, même si référencer un fournisseur ne veut pas dire lui garantir des commandes. C'est sur cette nuance que s'appuie le droit, alors qu'économiquement, quand on parle de grande distribution, la nuance est plus sibylline...


Bonjour Hervé,

Cette approche n'est pas purement juridique, elle correspond à une réalité économique. Ce ne sont pas les centrales de référencement qui prennent la décision d'acheter ou de ne pas acheter, ni qui décident des volumes achetés, mais les magasins, en l'occurence les enseignes CORA et CASINO qui y adhérent.

Par conséquent, il n'y a rien d'incohérent à écarter la responsabilité des centrales de référencement lorsque les magasins ou enseignes adhérents interrompent brutalement les commandes.

Il en irait bien entendu autrement si la centrale prenait l'initiative de retirer le produit de son assortiment, et que ce soit ce retrait qui explique la rupture totale ou partielle des relations commerciales.

Mais tel n'était pas le cas dans la décision CORA MEGAMIX qu'a entendu critiquer ConsoConcurrDistriM2pro.

On ne parle pas dans cette décision de déréférencement, mais de rupture brutale (et partielle) des relations commerciales.

Cdt

   

de Hervé   le Jeu 14 Juin 2007 10:43

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Dans ces conditions, ce n'était plus une vraie centrale de référencement mais une centrale de référencement et d'achat... A moins que la rupture des relations commerciales ne soit que la conséquence du déréférencement. Mais dans ce cas là, la question n'est plus la même...
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...

   

de Erick   le Jeu 14 Juin 2007 11:11

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Hervé a écrit :Dans ces conditions, ce n'était plus une vraie centrale de référencement mais une centrale de référencement et d'achat...


Non, il s'agit d'une centrale de référencement. Les centrales de référencement ne sont pas des acheteurs mais des prestataires de services.

Elles permettent aux fournisseurs référencés de bénéficier d'une centralisation des négociations. Au lieu de négocier avec X enseignes et/ou X points de vente, le fournisseur n'aura qu'un seul interlocuteur ce qui présente un avantage important en termes de volume et de coûts.

Mais les missions de la centrale de référencement s'arrêtent au référencement et à la négociation centralisée des conditions d'achat.

La relation d'achat vente, elle, n'existe qu'entre le fournisseur et les distributeurs. La centrale est tiers à cette relation.

Les centrales d'achat, par opposition aux centrales de référencement, achètent des produits pour les revendre. C'est le cas par exemple d'Interdis (centrale d'achat de produits alimentaires de Carrefour France).

Une des raisons majeures de la coexistence des centrales d'achat et des centrales de référencement tient à la structure des réseaux de distribution qui peuvent être soit des regroupements d'indépendants (LECLERC ou INTERMARCHE), soit des réseaux intégrés (Carrefour, Casino, Auchan)

Lorsque les réseaux sont "intégrés", c'est à dire lorsque les points de vente appartiennent à un Groupe, il n'y a aucune raison de distinguer les négociations de l'achat.

Lorsque les magasins sont indépendants, il est préférable de distinguer la négociation de l'achat. L'idée est de permettre de massifier, et donc de bénéficier de conditions préférentielles, sans pour autant porter atteinte à l'indépendance des adhérents.

Les centrales de référencement ont ainsi permis à de tous petits distributeurs, parfois même de petits épiciers de quartier indépendants, de renforcer leur position face aux gros fournisseurs de l'alimentaire.

Il existe aussi des centrales dans le secteur de l'électronique grand public, du bricolage notamment qui permettent à des magasins indépendants, grace à la massification opérée au niveau des centrales de référencement, de bénéficier de conditions pas trop éloignées de celles dont bénéficie la grande distribution.

Le cas d'OPERA s'il est assez singulier puisque cette centrale de référencement regroupait deux enseignes indépendantes l'une del'autre, à savoir CORA et CASINO, n'était pas unique puisque LUCIE regroupait de la même façon LECLERC et SYSTEME U…

En tout état de cause, c'est bien de référencement dont il s'agit, et pas d'achat.

Hervé a écrit :A moins que la rupture des relations commerciales ne soit que la conséquence du déréférencement. Mais dans ce cas là, la question n'est plus la même..


On est d'accord, c'est ce que je vous indiquais dans mon précédent message :

Erick a écrit : Il en irait bien entendu autrement si la centrale prenait l'initiative de retirer le produit de son assortiment, et que ce soit ce retrait qui explique la rupture totale ou partielle des relations commerciales.

Mais tel n'était pas le cas dans la décision CORA MEGAMIX qu'a entendu critiquer ConsoConcurrDistriM2pro.

   

de Hervé   le Jeu 14 Juin 2007 11:48

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Ce que je comprends mal, c'est que si la centrale de référence n'a aucune action d'achat, je ne vois pas en quoi on pourrait lui reprocher une rupture brutale des relations commerciales, puisque les relations commerciales ne sont pas avec ladite centrale...

Par contre, on pourrait reprocher non pas une rupture des relations commerciales mais un déréfencement abusif qui me semble distinct (alinéa 2 de l'article L420-2 et non alinéa 1 pour la rupture brutale des relations commerciales). Me trompè-je?
Quand les cons voleront, il fera nuit en plein jour...

   

de Erick   le Jeu 14 Juin 2007 12:40

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Hervé a écrit : Ce que je comprends mal, c'est que si la centrale de référence n'a aucune action d'achat, je ne vois pas en quoi on pourrait lui reprocher une rupture brutale des relations commerciales, puisque les relations commerciales ne sont pas avec ladite centrale...


On est bien d'accord, c'est ce que je m'efforce d'expliquer. Et c'est la raison pour laquelle je ne suis pas d'accord avec la critique qui a été formulée par ConsoConcurrDistriM2pro à l'encontre de l'arrêt CORA / MEGAMIX.

La Cour a fort logiquement écarté la responsabilité en considérant :

"Considérant, par ailleurs, qu'il n'est pas contesté que OPERA n'a jamais acheté de pantalons à MEGAMIX ; que son objet social ne comportait pas la commercialisation de marchandises, mais seulement celui, déjà indiqué, de rechercher des fournisseurs et de négocier avec eux des conditions commerciales pour le compte de CASINO et CORA ; qu'il en résulte que MEGAMIX n'est pas mieux fondée à rechercher la responsabilité de OPERA au titre d'un arrêt brutal de commandes alors qu'elle n'en a elle-même jamais passé ; "

Hervé a écrit :
Par contre, on pourrait reprocher non pas une rupture des relations commerciales mais un déréfencement abusif qui me semble distinct (alinéa 2 de l'article L420-2 et non alinéa 1 pour la rupture brutale des relations commerciales). Me trompè-je?


Encore une fois, dans l'affaire MEGAMIX il n'y a pas eu de déréférencement...

Les produits de MEGAMIX ont toujours figuré dans l'assortiment d'OPERA, ce sont simplement les conditions de marché qui ont conduit les magasins CORA et CASINO a diminuer le volume de commandes (les produits MEGAMIX se vendaient moins bien).

Dès lors, et encore une fois, je ne vois pas à quel titre la responsabilité d'OPERA aurait pu être recherchée...

Cdt

   

de Hervé   le Jeu 14 Juin 2007 13:18

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Excusez-moi Erick, je n'ai pas eu le temps de lire l'arrêt concerné mais avec ces éléments là, je ne peux qu'être d'accord avec vous...
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de Jean Marc Cheze   le Ven 15 Juin 2007 10:49

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Bonjour,
L'article sur le village http://www.village-justice.com/articles ... ,2477.html
traite du problème et doit être très utile pour beaucoup d'entreprises.
La rupture intervient souvent suite à une décôte vue sur un centre serveur télematique de renseignement commercial.
La société ne peut continuer ses relations avec un partenaire qui a un ratio de défaillance de 100 % et qui connait des incidents de paiements ou des rejets significatifs.
L'état de cessation des paiements est latent .Il faut peut être mieux dans beaucoup de cas rompre et remplacer ce partenaire très rapidement par un autre qui pourra assurer le service et payer la rupture compte tenu de l'article du code de commerce que subir un préjudice encore plus important.La transaction semble un moyen d'en sortir.Une veille juridique et financière est indispensable avec un suivi de ses partenaires .
Qu'en pensez vous ?
Cordialement
Dernière édition par Jean Marc Cheze le Sam 16 Juin 2007 7:48, édité 3 fois.
"A bon droit aider on doit" Leroux de Lincy
juriste gestion risques credit manager.
viadeo
Membre de l'association Henri Capitant.
http://www.cfo-news.com/La-manus-injectio-ou-la-regle-de-la-creance_a12944.html

   

de ConsoConcurrDistriM2pro   le Ven 15 Juin 2007 11:55

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Je comprends ce que tu dis Erick, mais sincèrement, pour avoir vu les locaux de Cora, de leur centrale d'achat actuelle, ancien locaux d'opéra, c'est plus qu'hypocrite de raisonner en terme purement juridique. On pourrait retenir la responsabilité conjointe de Cora et Casino.

Je m'interrogeais plutôt sur la réalité des actions menées par Opéra, et quand bien même ca ne serait que du référencement, au final, le fournisseur traite avec les deux distributeurs en ayant en face une sorte de double colosse.
Si opéra référence, opéra déréférence?
Mais effectivement en l'espèce ca n'est pas du déréférencement, c'est de la rupture de relations, qui plus est pas si brutale que ça.
Ce que j'essayais d'exprimer, c'est que malgré le montage juridique consistant à faire apparaitre la centrale comme du simple référencement et pas comme une acheteuse, la réalité au niveau pression est la même.
Etudiant Master 2 pro Consommation Concurrence (distribution...) - a trouvé son stage! ;)

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