Forum : Emploi et carrière

Sujet : Le statut des avocats collaborateurs (non salariés) ?

Vos expériences, le marché de l'emploi, les évolutions de carrière et des métiers...
 

Le statut des avocats collaborateurs (non salariés) ?

de Technosis   le Mar 18 Mai 2004 10:59

  • Technosis
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Beaucoup de jeunes avocats dans mon entourage vivent des situations tout à fait inédites... Ils sont passionnés par leur métier, travaillent beaucoup (énormément) et ne comptent pas les heures...

Alors que penser du fait que certains d'entre eux :
- n'ont pas de contrat signé (car on trouve toujours une bonne raison pour repousser cette signature et puis : "on n'en est pas réduit à ça entre nous tout de même" dixit !!!);
- sont obligés de quémander tous les mois leur rétrocession laquelle leur est versée très irrégulièrement, jamais à date fixe;
- peuvent avoir une rétrocession inférieure de près de 1000 e. au tarif UJA 2ème année alors qu'ils sont en 4ème année;
- sont payés, au sein d'un même cabinet, au même montant, quelle que soit leur expérience (c'est facile à savoir : les chèque sont parfois littéralement jetés sur les bureaux, sans enveloppe, genre "tiens, voilà ta cacahouette")
- sont obligés également, car tout simplement crevés et à bout de nerfs, de quémander une pauvre petite semaine de vacances, ce qu'ils n'obtiennent pas ("les congés payés, c'est pour les fonctionnaires" dixit !!!)
- etc...

Moi je suis juriste d'entreprise, salarié, alors bien sûr je ne compare pas ces deux professions très différentes mais tout de même... je trouve tout cela parfaitement lamentable !

Que penser de ces avocats "associés" (qui sont aussi, après tout, des entrepreneurs) qui peuvent se comporter ainsi comme des esclavagistes en se réfugiant, avec beaucoup de facilité, sur les fameuses "spécificités de ce métier passionnant" ? La Loi (autrement dit le flou artistique régnant sur le statut exact des collaborateurs non salariés) leur permet-elle réellement tout cela ? Les règles propres à la profession sont t'elles également aussi floues ?

Ne faudrait il pas décidément que l'Ordre, le premier concerné, et éventuellement les pouvoirs publics s'attèlent une bonne fois pour toute à régulariser ces situations de collaborateurs soumis à des patrons qui contournent allègrement tout à la fois le droit social, la morale, et, plus simplement, les règles de bon sens les plus élémentaires ?

Qu'en pensez vous ?

   

de stephanie v   le Mar 18 Mai 2004 11:13

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que je suis d'accord avec toi...
alors que je n'ai pas encore debute ma collab! quand on est stagiaire dans les cabinets on nous exploite et nous promet monts et merveilles des notre prestation de serment...
tous les problemes que tu as liste se retrouvent dans tous les barreaux... et au nom de la deontologie et de la confraternite, certaines personnes peuvent se croire tout permis!
le meilleur statut m'apparait etre celui d'avocat salarie mais encore faut il trouver des cabinets qui acceptent cela. ca me parait essentiel dans les grands barreaux ou la possibilite de developper une clientele perso est illusoire ( quand on est de permanence une demi journee par an si tout va bien) alors que l'on s'investit surtout pour le maitre de stage au debut...

   

de Renaud   le Mar 18 Mai 2004 11:34

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j'ai quitté l'entreprise pour tenter l'aventure...et je me reconnais dans tout ça !!!

je suis resté 4 mois en tout et pour tout et je suis retourné en entreprise illico presto......

parfois c'est vraiement galère...d'où ma nette préférence aujourd'hui pour l'entreprise en raison, d'une part, d'un métier qui me convient mieux et de cette mauvaise expérience.

quand on réclame sa rétrocession, on dirait qu'on va demander une faveur !!

bien sur j'imagine que ça ne se passe pas comme ça partout...

   Drôle de drame.....

de Patrice GIROUD   le Mar 18 Mai 2004 15:11

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Les situations décrites existent surtout à PARIS....

En province, si rien n'est rose, les Ordres ont souvent "moralisé" les situations contractuelles en exigeant un contrat écrit avec mentions obligatoires et déposé à l'Ordre, des minima pour les deux premières années de stage, l'obigation de congés payés (SIC), l'obligation d'un préavis, etc....
"Il faut essayer d’être heureux, ne serait-ce que pour donner l’exemple" Jacques Prévert

   

de Renaud   le Mar 18 Mai 2004 15:15

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ma situation était à Orléans...

   A Renaud

de Patrice GIROUD   le Mar 18 Mai 2004 15:18

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J'ai dit : "Les Ordres ont souvent ......."

Les comportements déviants existent aussi en province !
"Il faut essayer d’être heureux, ne serait-ce que pour donner l’exemple" Jacques Prévert

   

de Renaud   le Mar 18 Mai 2004 15:23

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merci j'avais lu, c'était juste pour info...

   Les cordonniers sont les plus mal chaussés

de Avril   le Mar 18 Mai 2004 20:05

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J'ignore comment ça se passe dans les autres professions, mais au sein de la profession d'avocat, le statut du collaborateur libéral présente l'intérêt de montrer ce qui se passe lorsque l'on se trouve dans une zone de non-droit-social.

Je suis collaboratrice dans un cabinet d'affaires parisien qui m'a démontré à quel point le côté sur-protecteur du salarié du droit du travail est justifié. Il est dommage que des nullos et des fainéants s'en servent à leur profit, mais si on ne met pas de barrières les managers dénués de morale, de classe et d'autorité naturelle en profitent !!

Depuis que je suis esclave dans ce cabinet, je me sens l'âme d'une syndicaliste d'extrême gauche. C'est l'horreur...

J'ai l'impression de ne compter pour la société qu'en temps que cotisante. Zéro protection sociale alors que je paye pour la retraite des cheminots...

Virée, je n'ai plus aucune source de revenus alors que le cabinet nous demande de facturer 10h/jour (et certains le font !!)....Bref j'arrête, je vais m'énerver.

   Re: Le statut des avocats collaborateurs (non salariés) ?

de Diane   le Mer 19 Mai 2004 10:08

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Technosis a écrit :Beaucoup de jeunes avocats dans mon entourage vivent des situations tout à fait inédites... Ils sont passionnés par leur métier, travaillent beaucoup (énormément) et ne comptent pas les heures...

Alors que penser du fait que certains d'entre eux :
- n'ont pas de contrat signé (car on trouve toujours une bonne raison pour repousser cette signature et puis : "on n'en est pas réduit à ça entre nous tout de même" dixit !!!);
- sont obligés de quémander tous les mois leur rétrocession laquelle leur est versée très irrégulièrement, jamais à date fixe;
- peuvent avoir une rétrocession inférieure de près de 1000 e. au tarif UJA 2ème année alors qu'ils sont en 4ème année;
- sont payés, au sein d'un même cabinet, au même montant, quelle que soit leur expérience (c'est facile à savoir : les chèque sont parfois littéralement jetés sur les bureaux, sans enveloppe, genre "tiens, voilà ta cacahouette")
- sont obligés également, car tout simplement crevés et à bout de nerfs, de quémander une pauvre petite semaine de vacances, ce qu'ils n'obtiennent pas ("les congés payés, c'est pour les fonctionnaires" dixit !!!)
- etc...

Moi je suis juriste d'entreprise, salarié, alors bien sûr je ne compare pas ces deux professions très différentes mais tout de même... je trouve tout cela parfaitement lamentable !

Que penser de ces avocats "associés" (qui sont aussi, après tout, des entrepreneurs) qui peuvent se comporter ainsi comme des esclavagistes en se réfugiant, avec beaucoup de facilité, sur les fameuses "spécificités de ce métier passionnant" ? La Loi (autrement dit le flou artistique régnant sur le statut exact des collaborateurs non salariés) leur permet-elle réellement tout cela ? Les règles propres à la profession sont t'elles également aussi floues ?

Ne faudrait il pas décidément que l'Ordre, le premier concerné, et éventuellement les pouvoirs publics s'attèlent une bonne fois pour toute à régulariser ces situations de collaborateurs soumis à des patrons qui contournent allègrement tout à la fois le droit social, la morale, et, plus simplement, les règles de bon sens les plus élémentaires ?

Qu'en pensez vous ?


Moi aussi je me reconnais dans votre description réaliste de la situation du collaborateur.

J'ai quitté comme beaucoup cette profession. Aujourd'hui juriste je revis !

   Re: Le statut des avocats collaborateurs (non salariés) ?

de Technosis   le Mer 19 Mai 2004 10:57

  • Technosis
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Diane a écrit :Moi aussi je me reconnais dans votre description réaliste de la situation du collaborateur.
J'ai quitté comme beaucoup cette profession. Aujourd'hui juriste je revis !


Cette description est en effet très réaliste car...bien réelle !!! C'est un condensé ce que vivent certains de mes amis : l'un d'entre eux cumule même l'ensemble ... et ceci, dans un beau petit cabinet parisien qui tourne très bien et dont les associés sont bien connus sur la place !!! Je rêverais de jeter les noms à la meute si cela ne risquait évidemment pas de créer des ennuis sévères à mon ami ! Alors, bien sûr, "mon cher confrère" par ci, "mon cher Maître" par là... c'est bien joli, ça fait mousser... mais quand on voit comment le cabinet est géré et, surtout, comment les collaborateurs sont considérés (ce qui n'empêche pas les compliments lobotomisants type : "vous êtes formidables")... c'est nettement moins reluisant et honorable !!!

 
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Comment faire retirer un avis négatif visant son restaurant ? Par Lamia El Fath, Avocate.

Comment faire retirer un avis négatif visant son restaurant ?

Par Lamia El Fath, Avocate.
-
2470 lectures

1re Parution : 29 décembre 2023

4.23  /5
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Dans le milieu hyper concurrentiel de la restauration, les notations affichées sur Internet ont un impact considérable sur l’attractivité des établissements. Les mauvais avis peuvent noircir leur réputation. Souvent, les restaurateurs se trouvent démunis face aux commentaires de clients insatisfaits. Alors, que faire de ceux qui sont démesurés ou totalement mensongers ? Cet article met en avant les moyens à disposition des restaurateurs pour supprimer ces commentaires offensants ou qui jettent le discrédit sur leur activité de façon infondée.

« Sur fond de couleurs pastels, dans un monde aux apparences parfaites, les rapports humains sont dictés par un système de notation via lequel chacun a la possibilité d?évaluer les personnes qu?il croise. Lacie met en place des stratagèmes pour obtenir une meilleure note mais commet une succession d’erreurs qui l’entrainent vers la catastrophe ».

Cet épisode de Blackmirror, intitulé « Nosedive » ou « Chute libre » en français, peut évoquer le système d?évaluation omniprésent sur les différentes plateformes en ligne, contribuant au succès ou, au contraire, à l’echec de certains restaurants. La consultation des notes sur les réseaux sociaux ou les plateformes en ligne fait partie des habitudes des clients avant de choisir le lieu de leur prochain diner. Avec l’exposition d’Internet, l?effet bouche-à-oreille s?amplifie, parfois illégitimement.

L’image et la réputation des restaurants en dépend.

Afin de ne pas reproduire un épisode de BlackMirror, des gardes-fous existent et permettent d’endiguer les dérives. S?il semble difficile voir quasi-impossible de se défaire des mauvais commentaires, il existe des solutions.

Il s’agit de trouver un juste équilibre entre la liberté d?expression et la protection des personnes ou de leur activité économique.

Quelles sont les limites à la liberté d’expression ? Qu?est-il possible de faire lorsqu?un faux avis ou un mauvais avis est publié sur la fiche Google My Business, Trip Advisor, la Fourchette, Trustpilot ou autre, de son restaurant ?

Les bonnes pratiques généralement recommandées pour réagir face à un mauvais commentaires - qui relèvent davantage du « marketing » que du juridique, sont les suivantes :

  • Contacter l?auteur de l?avis pour en discuter et peut être parvenir à ce qu?il retire son commentaire de son plein gré ;
  • Exercer son droit de réponse, pour montrer que l?expérience décrite ne correspond pas à la réalité, contextualiser l?avis, nuancer le propos et peut-être même avoir le dernier mot. Attention toutefois à ne pas tomber dans l?agressivité ou, soi-même, tenir des propos injurieux, diffamatoires ou dénigrants ;
  • Inviter ses clients satisfaits à noter son restaurant, afin de contrebalancer l?avis négatif avec des avis positifs plus récents ;
  • Enfin, faire confiance à ses clients et prospects, qui sauront déceler le vrai du faux.

Toutefois, ces premiers réflexes ne permettent pas de supprimer les avis négatifs et, en fonction des circonstances, peuvent ne pas suffire à préserver la réputation du restaurant. Afin de définitivement supprimer l’avis gênant, certaines procédures peuvent être envisagées.

I. Quels sont les avis qu’il est possible de faire retirer ?

Comme évoqué ci-avant, la difficulté dans le traitement des avis négatifs sur Internet est de trouver le juste équilibre entre liberté d?expression et respect des droits de la personne ciblée. La liberté d’expression est un droit fondamental auquel est attaché le droit à la libre critique.

En conséquence, un mauvais avis ne pourra pas automatiquement être supprimé, sauf s?il est interdit en application des conditions générales de la plateforme concernée ou qu?il est contraire à la loi applicable.

En France, les principales infractions qui peuvent entrainer la suppression d’un faux commentaire ou d’un commentaire inapproprié sont l?injure, la diffamation ou le dénigrement.

Déterminer la qualification juridique idoine est déterminante pour l’issue des procédures entreprises en ce que le délai de prescription en dépend et qu’une qualification inappropriée pourrait conduire à être débouté de ses demandes. Cette première analyse doit donc faire l’objet d’une attention particulière.

i) Les avis injurieux.

L?injure se définit comme :

« toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l?imputation d?aucun fait » (Article 29 de la loi du 29 juillet 1881).

Pour simplifier, un commentaire injurieux est celui qui contient une insulte, plus ou moins indélicate, grossière ou ordurière, présentant un caractère offensant.

Contrairement à la diffamation, l?injure ne doit contenir l?imputation d?aucun fait à la personne qu?elle vise. C?est ce critère qui porte la distinction entre les deux infractions.

Les propos suivants ont par exemple été considérés comme des injures : « arriviste », « P***** », « petite vermine », « Menteuse, incapable et incompétente », « SS », l?accusation de « manquer de courage civique », « couard, homme vil dont la pensée roule au niveau du caniveau », « nullard » pour la critique d?un avocat sur un blog.

ii) Les avis diffamatoires.

La diffamation, quant à elle, s?entend comme :

« toute allégation ou imputation d?un fait qui porte atteinte à l?honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé » (Article 29 de la loi du 29 juillet 1881).

Autrement dit, il s?agit d?une assertion, qu?elle soit affirmative ou empreinte d?un doute, qui attribue à une personne un fait précis et déterminé de nature à affecter l?honneur ou la considération de la personne visée.

A titre d?exemple, a été jugé diffamatoire les propos suivants diffusés sur le site TripAdvisor, concernant un restaurant : « Désolé, mais ce grand restaurant gastronomique est fermé. Son chef l’a vendu il y a deux ans ».

En effet, le fait de fermeture allégué constitue bien un fait pouvant faire l’objet d’une preuve et non un simple jugement de valeur et il est faux. La cour d’appel a cependant souligné « qu’alléguer une fermeture n’est pas en soit une diffamation mais peut en constituer une en fonction des éléments et des circonstances extrinsèques de la cause ». Or, en l’occurrence, le commentaire a été publié sur la « page dédiée à ce restaurant sur un site internet qui a vocation à être consulté notamment par les clients potentiels de ce restaurant ce qui est de nature à porter atteinte à la position professionnelle de son exploitant » et à faire croire qu’elle avait cessé son activité.

En outre, l’auteur de l’avis ne pouvait pas invoquer sa bonne foi dans la mesure où il s’agissait d’un journaliste spécialiste de la gastronomie et du voyage et qu’en cette qualité « il lui appartenait de vérifier les informations qu’il diffuse » et que l’existence de nombreux avis sur la page TripAdvisor du restaurant pouvait lui permettre de constater que le restaurant n’était pas fermé [1].

A contrario, a été considéré comme non diffamatoire un avis faisant état du manquement contractuel d?une agence immobilière qui a rendu une caution en retard sans effectuer d?état des lieux de sortie [2]. Les propos imputaient uniquement à l?agence de ne pas avoir respecté ses obligations contractuelles, manquements qui ne peuvent à eux seuls être considérés comme portant atteinte à l?honneur et à la considération de l?agence, faute de justifier du caractère délibéré de ces manquements.

Par ailleurs, la diffamation peut apparaître justifiée si l?auteur de l?avis est de bonne foi ou s?il est en mesure de démontrer la véracité des propos qu?il tient.

La bonne foi est caractérisée dès lors que l?avis porte sur une information intéressant le public, qu?il repose sur une base factuelle suffisante et que le ton utilisé est mesuré, dépourvu d?animosité personnelle. L?exception de vérité, quant à elle, peut être retenue s?il est prouvé que l?avis n?est rien d?autre que la retranscription de la réalité des faits.

Dans ces deux hypothèses, l?auteur de l?avis ne pourra pas être condamné pour diffamation.

Pour demander le retrait d?un faux avis sur le fondement de la diffamation, il faut donc :

D?une part, démontrer que l?avis :

  • Est l?expression d?un fait précis et déterminé ;
  • Vise une personne physique ou morale (votre restaurant ou son chef par exemple) et non des produits ou des services ;
  • Est de nature à porter atteinte à l?honneur ou à la réputation de la personne ciblée.

D?autre part, que l?avis n’ait pas été rédigé de bonne foi ou ne retranscrive pas la réalité.

iii) Les avis dénigrants.

Un avis qui vise des produits ou des services et non une personne ne pourra pas être supprimé du fait de son caractère diffamatoire. Cependant, suivant certaines conditions, l?avis négatif sur des produits ou des services pourra être considéré comme dénigrant et alors être retiré.

Le dénigrement est une construction jurisprudentielle issue du droit commun de la responsabilité civile.

La jurisprudence considère ainsi que :

« Même en l?absence d?une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l?une, d?une information de nature à jeter le discrédit sur les produits, les services ou les prestations de l?autre peut constituer un acte de dénigrement, ouvrant droit à réparation sur le fondement de l?article 1240 du Code civil ».

Des avis postés sur Internet pourront être qualifiés d?actes de dénigrement, et non de diffamation, dès lors qu’ils visent distinctement la qualité des services proposés par une entreprise dans le but d’inciter une partie de la clientèle à s’en détourner et qu’ils ne portent pas atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne physique ou morale exploitant l’entreprise [3].

Le fondement du dénigrement doit donc être cantonné aux propos, avis ou commentaires, portant sur les produits et services proposés par une entreprise, et non aux avis portant sur les personnes, c?est là la ligne de démarcation qui sépare le dénigrement, relevant du droit commun, des infractions de presse de la loi du 29 juillet 1881.

A titre d’exemple, par un jugement arrêt en date du 20 mars 2018, la Cour d?appel de Dijon a confirmé un jugement du tribunal de grande instance de la même ville qui avait jugé qu’un avis posté antérieurement à l?ouverture d’un restaurant, ne pouvait pas correspondre à l?expression d?un avis objectif se fondant sur une expérience réelle. La cour d’appel a considéré que

« si le commentaire critique de services ou de prestations publié sur un site internet n?est pas en soi constitutif d?une faute, comme l?a justement retenu le premier juge, il devient fautif lorsque son auteur n?a pas bénéficié des services ou des prestations critiquées et qu?il procède d?une intention de nuire » et que « ces commentaires, peu flatteurs pour un établissement portant le nom prestigieux de Loiseau, étaient destinés à dissuader la clientèle potentielle de le fréquenter, et ils constituent un dénigrement manifeste de nature à engager la responsabilité délictuelle de leur auteur ».

Toutefois, il convient de souligner que la liberté d’expression demeure le principe. Dès lors, bien qu’elle ne soit pas sans limite, la critique est libre.

Par un arrêt en date du 26 septembre 2018, la chambre commerciale de la Cour de cassation a de la sorte rejoint la position de la première chambre civile en retenant que, « hors restriction légalement prévue, la liberté d’expression est un droit dont l’exercice, sauf dénigrement de produits ou services, ne peut être contesté sur le fondement de l’article 1382, devenu 1240, du Code civil » [4].

Un client est en droit de manifester son insatisfaction sur la qualité de la cuisine, les plats qu’il aura goûté, l’accueil ou le service si ses propos restent mesurés et conformes à son expérience, bien que subjective.

La chasse aux mauvais avis doit donc être effectuée de façon réfléchie. En effet, aucune diffamation ou aucun dénigrement ne sera retenu si les propos litigieux reposent sur une base factuelle suffisante. Autrement dit, si l?avis apparaît justifié, l?internaute a le droit de l?exprimer et l?avis doit subsister.

iv) Les autres fondements.

La diffamation, l?injure et le dénigrement ne sont pas les seuls fondements juridiques pouvant donner lieu à la suppression d?un avis. L?avis peut par exemple constituer une incitation à la haine ou à la discrimination, une atteinte à la vie privée ou encore du harcèlement.

II) Comment faire retirer un avis négatif concernant son restaurant ?

Afin de retirer un mauvais avis au sujet de son restaurant, nous recommandons de suivre le modus operandi suivant :

1. Vérifier que l?avis en question est effectivement illicite (voir ci-avant).

2. Si les coordonnées de l?auteur sont disponibles, le contacter afin de lui demander de supprimer son avis en lui expliquant les raisons qui poussent à considérer que son avis est illicite.

3. En fonction de l?objectif poursuivi, effectuer un constat d?huissier visant à se constituer la preuve de la publication de l?avis litigieux. Cette preuve sera utile en cas de contentieux, si l?avis est supprimé, afin notamment de justifier d?éventuelles demandes en réparation.

4. Engager la procédure de signalement de l?avis via la plateforme concernée. Qu?il s?agisse de Google, de TripAdvisor ou de la Fourchette, l?ensemble de ces plateformes ont mis en place des procédures permettant de signaler des faux avis, des avis illicites ou des avis ne respectant pas leurs conditions générales. Elles ont pour obligation de supprimer tout contenu « manifestement illicite » qui leur serait notifié via cette procédure. La notification devra donc justifier ce caractère « manifestement illicite » qui pourra être évident en cas d’injure mais beaucoup moins en cas de diffamation.

Souvent partagées entre la volonté d?assoir leur communauté par le nombre de contributions publiées, le respect de la liberté d?expression de leurs utilisateurs d?une part, et la nécessité de préserver les intérêts des restaurateurs d?autre part, les plateformes donnent rarement suite aux retraits d?avis. D’ailleurs, il a été reconnu le droit pour la plateforme d’attendre une décision de justice si un doute demeure quant à l’illicéité de l’avis visé [5].

Précisons qu’en cas d?inaction de la plateforme à la suite de votre notification, la responsabilité de la plateforme peut être engagée.

5. Si la procédure de signalement n?aboutit pas, il peut être opportun de mettre en demeure la plateforme de supprimer l?avis litigieux, par lettre recommandée avec avis de réception.

6. Demander la suppression du commentaire litigieux à la plateforme via une procédure judiciaire accélérée. Cette procédure est prévue en application de l’article 6-I-8 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l?économie numérique (dite « LCEN »), selon lequel :

« le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, peut prescrire à toute personne susceptible d’y contribuer toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne ».

Cette procédure permet de demander au juge du tribunal judiciaire d?enjoindre, en urgence, la plateforme concernée de supprimer le contenu litigieux. Suivant l’ordonnance du juge, la plateforme concernée sera ainsi contrainte de procéder au retrait de l?avis.

A cet égard le texte a récemment évolué. Dans sa version initiale, ces mesures pouvaient être ordonnées en référé ou sur requête. Désormais, le président du tribunal judiciaire statue exclusivement suivant la procédure accélérée au fond.

7. Parallèlement, agir à l?encontre de l?auteur de l?avis qui vise votre restaurant. En fonction de la qualification juridique de l?avis (injure, diffamation, dénigrement ou autre) l?action sera pénale ou civile.

  • Dans le cas d’une action en dénigrement, l’auteur de l’avis devra être préalablement identifié, ce qui n’est pas toujours aisé. Puis, une action pourra être intentée par devant le tribunal judiciaire ou le tribunal de commerce à l’encontre de cette personne.
  • Dans le cas d’une action pour injure ou diffamation, il est recommandée de déposer une plainte avec constitution de partie contre x, afin de sécuriser l?action en présence d?un auteur d?avis anonyme et d’éviter la prescription de l’action. En effet, en matière d’injure et de diffamation, le jeu de la prescription fixé à 3 mois est particulièrement piégeux.

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Notes de l'article:

[1CA Amiens, 1ère Chambre civile, 13 septembre 2018, 17/00340.

[2Cour d?appel de Paris, 26 février 2020, n° 18/24207.

[3TGI Nanterre, 21 nov. 2019, Sté Auto-école Newton Levallois c/ X et Cour d?appel de Paris, 26 février 2020, n° 18/24207.

[4Com. 26 septembre 2018, n° 17-15.502.

[5CA Paris, pôle 1 2e ch, 4 avril 2013.

"Ce que vous allez lire ici". La présentation de cet article et seulement celle-ci a été générée automatiquement par l'intelligence artificielle du Village de la Justice. Elle n'engage pas l'auteur et n'a vocation qu'à présenter les grandes lignes de l'article pour une meilleure appréhension de l'article par les lecteurs. Elle ne dispense pas d'une lecture complète.

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Comment retirer un avis négatif sur son restaurant? Il existe plusieurs actions possibles selon si l'avis est identifié comme injurieux, diffamatoire ou dénigrant.
Description rédigée par l'IA du Village