La séance débute avec sept employés d’une entreprise de transports brestoise à la barre, exprimant à la chaîne les mots « je le jure ! », avant de quitter la chambre aussitôt. Suite à un renvoi de la deuxième affaire, la suivante se déroule en quelques instants. Deux ayant droit d’une personne décédée suite à une non-assistance à cette personne qui était en danger par un tiers. Malheureusement pour eux, le prévenu étant lui-même décédé, la quatrième affaire s’imposa immédiatement.
« Rocambolesque comme histoire, du début à la fin ! »
Un jeune homme de 21 ans souhaitant être rejugé sur des faits de non-justification de ressources d’une personne qui côtoie un auteur de trafic de stupéfiants avec lequel il vendait auparavant des substances illégales. Une personne ayant déjà une belle collection de délits au sein de son casier judiciaire, comportant sept condamnations allant de la conduite sans permis, du trafic de stupéfiants, du port d’armes jusqu’à un vol aggravé avec outrage. Étant ainsi déclaré coupable le 22 mars 2022 pour ses derniers faits, il souhaite être rejugé.
En l’espèce, les forces de l’ordre remarquent une voiture ayant deux individus dans l’habitacle, au milieu du parking du Burger King de Vannes durant la période du confinement. Dès la sortie du véhicule des deux jeunes hommes, les policiers constatent une forte odeur de cannabis et découvrent en plus de cela 1 335 euros en billets répartis en deux paquets de cellophane. Le prévenu explique avoir trouvé cette matière au sol et à penser immédiatement à enfiler son argent dedans, le Président répondant à l’accusé « Vous vous moquez du policier gentiment ». Le jeune prévenu explique qu’ils attendaient avec son confrère, une amie, remarque à laquelle le Président demande sur un ton frivole « une fille chacun ou une en commun ? » en demandant ainsi son nom, un élément que l’accusé ne connaissait « plus ». Le Président ne manquant pas de lui dire qu’elle devait être « amie très chère ».
L’histoire incohérente continue dès lors que le prévenu explique que les billets étaient pour se payer le repas dans la chaîne de restauration rapide, le juge rétorquant « On peut s’en payer des Burger King avec cette somme quand même ! ».
Le Parquet cependant, tout en connaissant la stupidité du dossier, n’entre pas dans la voie d’une condamnation, car la simple présomption de la provenance illicite des fonds, ne suffit pour exiger une peine. Le Procureur de la République ne laissant en conséquence seulement la possibilité de la relaxe, les magistrats du siège cèdent ainsi à la demande.
« Le Maître Beurrier ».
Une affaire difficile à entendre tant pour la victime que l’audience présente, en passant dans les détails les plus intimes d’un acte traumatisant qu’a subi un jeune marin en apprentissage, qui souffre désormais professionnellement et psychiquement des conséquences de l’agression à son encontre.
Les prévenus, un couple au service de la Marine Nationale, qui ont effectué une « tradition » dénommée « le Maître Beurrier » sur l’un de leurs camarades lors d’une soirée privée, durant la nuit du 31 janvier au 1er février 2021. Il s’agit en outre d’un rituel prodigué à certains jeunes marins, consistant à insérer du beurre dans la raie entre les deux fessiers, pour que ce dernier fonde au contact avec la peau de cette zone intime. Un acte qualifié de « dégueulasse » par beaucoup durant la procédure, et ce, avant de prendre en compte les dégâts à l’égard de la victime sur le plan psychologique.
« Il faut quand même vaincre deux obstacles, le pantalon et le caleçon » explicite le Président au moment où le prévenu ayant commis l’acte, explique que la pénétration de sa main dans le postérieur de la victime, était involontaire et qu’il souhaitait « seulement » étaler le beurre sur la surface extérieure de ce dernier. De plus, la femme du principal accusé, a retenu le jeune marin au sol pour ainsi permettre à son compagnon de réaliser le rite malsain. Une légère tension s’installa entre les juges et les prévenus, l’Assesseur les qualifiants de « caïds » au sein de leur groupe de marins. La deuxième Assesseur, quant à elle, cherche en profondeur dans l’affaire et découvre que le principal accusé a, lui aussi, subi le culte à son entrée dans ce corps militaire, sans pour autant en avoir été troublé.
Les magistrats du siège devaient dès lors rechercher si l’acte avait été prémédité et s’il avait un caractère sexuel, ayant comme appui, des conversations d’une messagerie numérique. On pouvait y trouver des messages tels que « beurrer lui le cul ce bébé » ou encore « c’est une crevette », des propos écrits par le marin de 28 ans, la journée qui précédait les faits. Les preuves n’allant pas en la faveur des prévenus, l’intentionnalité de l’acte s’est manifestée encore une fois, le beurre ayant été obtenu le même jour que l’envoi des messages, l’accusé principal se défendant que ce fût pour « cuisiner ».
L’avocat représentant la partie civile, clame les faits d’un « mépris de la personne humaine ». Une plaidoirie qualifiable de puissante et touchante, les accusés gardant tout de même un regard vide et sans émotion. L’avocat ne se limite pas dans ses paroles, en humanisant les dommages psychologiques de son client, dont 14 mois de choc et 5 mois de dépression, sans compter l’abandon de sa vocation depuis son plus jeune âge, la Marine.
Le Parquet n’ayant point de clémence envers les accusés, qualifie les actes d’agressions sexuelles en demandant l’inscription au Fijais des deux prévenus. La Procureure de la République exige une peine de 3 ans d’emprisonnement, dont 2 ans avec sursis pour l’homme de 28 ans, et 2 ans d’emprisonnement avec sursis pour la femme de 30 ans.
Il vient alors au tour des avocats du côté de la défense. Défendant leurs clients respectifs en s’appuyant sur de la jurisprudence similaire à la procédure en cours, en ajoutant que l’agression ne relève en aucun cas d’un caractère sexuel, en soulignant l’utilisation durant toute l’audience du terme « tradition ». Un des deux avocats, allant jusqu’à démontrer le manque de militaires dans la Marine Nationale, pour défendre sa cliente.
La suspension de séance venant clore les plaidoiries, la décision du délibéré tomba par la suite. Les juges ont ainsi condamné les deux marins à 15 mois d’emprisonnement avec sursis, en plus d’une amende de 2 500 euros chacun, sans oublier une interdiction d’exercer une fonction dans les forces armées durant 5 ans.