La capacité en droit occupe une place particulière dans le paysage des formations universitaires : présente dans de nombreuses universités en France [1], c’est un cycle d’études de deux ans accessible à toute personne de plus de 17 ans, sans aucun critère de diplômes. Elle permet ainsi aux non bacheliers de s’inscrire dans l’enseignement supérieur et ouvre la voie sur le monde du travail et les concours administratifs.
C’est un diplôme d’Etat qui permet d’obtenir un niveau équivalent à celui du baccalauréat et d’accéder à la Licence 1 voire la Licence 2 selon les résultats obtenus. Elle est également compatible avec une activité salariée ou d’autres études puisqu’elle propose des cours du soir et les samedi répartis sur deux années.
Donner une deuxième chance.
Créée sous Napoléon, et anciennement régie par le décret n° 56-348 du 30 mars 1956 (abrogé depuis l’arrêté de 2021 évoqué plus bas), la capacité en droit avait pour objectif initial, comme nous l’explique Sophie Rozez, directrice de la capacité en droit à l’Université de Paris Nanterre, de « permettre au peuple de faire des études supérieures ». Aujourd’hui, elle vise à « donner une deuxième chance à des personnes en situation d’échec ou d’insuffisance » en leur donnant une formation de base dans les grandes disciplines juridiques.
Son historique récent témoigne d’une désaffection, que Sophie Rozez met sur le compte d’une « méconnaissance de la formation par les publics visés et par les institutions et partenaires susceptibles de les faire connaître. » Il y avait ainsi 8 215 élèves en 1997-1998 [2] et le nombre a progressivement baissé jusqu’à 2 265 étudiants en 2019/2020 [3].
Voie d’employabilité.
Or, cette filière, « bien qu’elle ne permet pas en tant que tel d’avoir une professionnalisation » rappelle Sophie Rozez, agit comme une voie d’employabilité pour de nombreux jeunes non bacheliers et pour des personnes en situation de reconversion professionnelle. C’est ce que défend la directrice de la formation à Nanterre qui est témoin chaque année de « la volonté de réussir, la motivation qui caractérise le capacitaire en droit » alors qu’il s’agit au départ d’un « public diversifié avec des fragilités. » Le cadre d’étude est par ailleurs très important : « Le fait pour eux d’être à l’Université est très valorisant. Ils sont dans une dynamique de groupe, ils se soutiennent, sans phénomène de perdition. »
La nécessité d’une meilleure promotion.
La capacité en droit à Nanterre est l’une des rares formations de ce type, sinon la seule, à avoir réussi à inverser la tendance de la décroissance des effectifs. Sophie Rozez nous explique que le problème résidait dans l’insuffisante promotion du diplôme auprès, à la fois des jeunes, mais aussi des partenaires institutionnels (lycées, maisons des jeunes et de la culture, centre sociaux des Hauts-de-Seine). « Je suis allée voir des partenaires institutionnels pour informer de l’existence de la capacité et ça a marché. » Par ailleurs, « nous avons revu la maquette de présentation, et nous avons introduit, en plus des enseignements de base dans les grandes disciplines juridiques, de l’anglais, de l’histoire du droit, de l’expression juridique écrite et orale. »
La réforme de 2021.
La capacité en droit a été partiellement réformée par arrêté du 25 Septembre 2021.
L’arrête précise notamment :
que le certificat de capacité en droit est un diplôme national de niveau 4 ;
que les études en vue de l’obtention du diplôme peuvent se dérouler en un an ou deux ans ;
que "l’ensemble des activités de formations diversifiées correspondent pour l’étudiant au minimum à l’équivalent de 300 heures d’enseignements et d’encadrement pédagogique" ;
que peuvent s’inscrire en première année de licence mention droit, les titulaires du certificat de capacité en droit ayant obtenu une note moyenne au moins égale à 10 sur 20.
Voilà pour le "socle minimum", qui laisse une certaine liberté aux facultés de droit. A Nanterre par exemple, Sophie Rozez explique : "nous avons apporté des modifications dans le sens de la semestralisation, d’un renforcement de la méthodologie et en restant sur les deux années qui sont à nos yeux nécessaires à une bonne intégration en Licence 1. Nous sommes une des rares formations à assurer plus de 500 heures d’enseignement en présentiel sur deux ans."
Discussions en cours :
Très intéressant article.
La capacité en droit, m’a permis, sans bac, d’entrer en fac de droit et de terminer mes études universitaires. Et même de réussir un concours de la magistrature.
Je n’ai jamais compris pourquoi cette voie d’étude est si peu connue ?
Bonjour la capacité ce fut très difficile ? Combien d’heure de révision par semaine ? Étant vous en presentielle ?
Oui, la capacité en droit est une véritable opportunité pour toutes celles et ceux qui veulent suivre très tôt une voie juridique. C’est en 1969 que j’ai pu accéder, grâce à ce diplôme, aux filières universitaires (licence, master...) et me préparer à exercer mon métier de juriste en droit social (que j’exerce toujours). Je partage l’avis de mes confrères qui s’étonnent à juste titre de voir combien cette opportunité de s’ouvrir aux métiers du droit est, encore aujourd’hui, si peu promue. Et pourtant, elle demeure la seule voie d’accès sérieuse à qui veut acquérir une solide connaissance de l’ensemble des matières juridiques, avant de s’engager sur des études supérieures universitaires, les deux années nécessaires pour obtenir la capacité en droit permettant, aussi, de dessiner les contours d’un projet professionnel qui mènera à une future spécialisation.
Frédéric Berdeaux
Vous êtes sur la bonne voie.....Persévérez.....
Et encore aujourd’hui, sans le bac, mais avec une capacité en droit, poursuite en licence, puis le master et la tentative d’un doctorat !
La capacité est une formidable opportunité pour quiconque souhaite faire du droit : ex-lycéen, professionnel en reconversion, reprise d’étude, et même des retraités qui souhaitent s’impliquer plus dans le milieu associatif ou de la gestion de leur immeuble... Des promotions aux profils variés !
Cette filière est un formidable tremplin qui doit être valorisée afin de continuer à être une voie de la seconde chance.
Elle souffre d’un manque de visibilité ; grace au travail en commun entre professeurs, étudiants (notamment l’association CAP-Assas, l’association des capa d’Avignon ...), anciens étudiants dont le député Aurélien Taché, nous allons oeuvrer pour que cette filière ne soit pas démantelée.
Ps : la question au Sénat de 2009 portait sur le fait que les etudiants de capa en formation initiale étaient privés de bourses alors même qu’ils sont elligibles. En 2021 rien n’a changé !
L’association CAP-Assas a écrit au MESRI et à toutes les administrations concernées afin de les alerter sur cette situation qui porte atteinte aux droits constitutionnels des étudiants dont s’agit. Malheureusement rien ne semble bouger et une action au contentieux se profile.