Si le Code du travail offre depuis 2016 et la Loi pour une République Numérique un encadrement légal [1] de l’activité de joueur esportif - légalement joueur de compétition de jeu vidéo -, d’autres droits pré-existants, droits patrimoniaux et extra-patrimoniaux, sont également exploitables.
En effet, la pratique professionnelle de jeux vidéo dans le cadre de compétitions soulève des questions juridiques quant au respect de la vie privée l’identité numérique du joueur (I), les droits associés à son avatar ou sa représentation en ligne au sein du jeu vidéo (II) et enfin quant à l’exploitation de son image à l’occasion des événements esportifs (III).
I. Respect de la vie privée et identité numérique.
Quel que soit le statut sous lequel il exerce son activité, amateur ou professionnel, le joueur esportif demeure titulaire de droits associés à sa personnalité : ces derniers comprennent notamment le respect de sa vie privée son droit à l’image ainsi que le contrôle de ces données personnelles (Références aux lois n°78-17 du 06 Janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (Loi « informatique et libertés ») ainsi que les dispositions transposées du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 (RGPD)).
Ainsi, tout personne quelle que soit sa notoriété peut, sur le fondement civil (L’engagement de la responsabilité délictuelle de l’article 1240 du Code civil permet de réparer les éventuels préjudices subis, moraux voire économiques, notamment par la perte de chance d’avoir pu tirer profit de l’exploitation commerciale de son image) et/ou pénal (En matière de contrôle de l’image d’une personne, voir les Art 226-1 et 226-8 du C. pénal), s’opposer à la divulgation d’information la concernant dès lors qu’elles portent sur l’intimité de sa personne notamment sa vie familiale, ses relations amoureuses, ses convictions religieuses ou politiques, etc.
Quelques exceptions légales et jurisprudentielles sont à noter principalement relatives à des faits ou informations qui auraient déjà été divulguées ou dans l’exercice du droit à l’information du public.
Ces droits trouvent à s’appliquer également dans le cadre d’activités professionnelles liées au secteur numérique : on parle alors d’identité numérique. Cette dernière comprend synthétiquement les données techniques, les données relatives à l’état civil, l’intégrité physique ou morale ainsi que les créations de l’esprit par lesquelles elle peut s’exprimer tel que l’avatar dans les jeux vidéo [2].
II. L’avatar numérique du joueur esport.
Dans un contexte marqué par les développements technologiques proposant des environnements virtuels de plus en plus complexes notamment à travers les notions de metavers [3], de nombreux titre de jeux vidéo développés par les studios intègrent aujourd’hui des outils de création numérique mise à la disposition des joueurs. Ils leur permettent de générer un avatar personnalisé plus ou moins détaillés selon les critères proposés.
L’avatar du jeu vidéo. Il constitue à la fois une œuvre de l’esprit et un élément de l’identité personnelle du joueur dont la titularité des droits pourra dépendre du degré de personnalisation qui est permis par l’éditeur et de la relation entre le joueur salarié et son employeur [4]. Plus généralement, l’ensemble des éléments virtuels utilisés par le joueur à titre de marque peuvent également faire l’objet d’une protection au titre du droit d’auteur.
A ce titre, il est admis que les atteintes portées à l’avatar peuvent mettre en cause la réputation et l’investissement personnel du joueur. Ce dernier peut ainsi protéger toute atteinte à ses attributs numériques notamment en cas de vol d’objets virtuel, cyber-viol ou atteinte à la réputation.
III. L’exploitation de l’image du joueur esport.
Ces dernières années ont vu se consacrer la possibilité d’exploiter et négocier l’image d’une personne. Le droit à l’image dispose aujourd’hui d’une double nature, extrapatrimoniale et patrimoniale, et s’apparente ainsi à un droit d’auteur au sens du Code de la propriété intellectuelle pouvant faire l’objet d’autorisation et de contrat de licence.
Pour son exploitation, il est possible de distinguer plusieurs types d’images du joueur esportif :
L’image associée, collective ou individuelle selon que sont présentés à ses côtés les autres membres de l’équipe esportive, appartient et est exploitée par l’employeur ayant prévu dans les contrats de travail ou de prestation le contrôle de l’image de sa marque et produits. Les joueurs participent à la promotion de leur club.
L’image individuelle exploitée personnellement par le joueur, sans référence à son club et généralement exploitée de manière autonome.
L’image à l’occasion de compétitions esportives. Contrairement au sport traditionnel conférant à l’organisateur le monopole d’exploitation des droits liés à la compétition, les droits liés à la compétition esportives sont régis par le droit commun des contrats et pourra le cas échéant se partager entre l’organisateur, le club voire dans certains cas, l’éditeur du jeu vidéo.
En l’absence de l’application des dispositions spécifiques au sport, il revient aux règles classiques du droit civil et à la liberté contractuelle d’encadrer l’image des joueurs esportifs.
Joueur mineur. On notera enfin les difficultés complémentaires d’user et exploiter leur image compte tenu de la minorité d’une grande partie des intervenants. À l’image des artistes, mannequins ou jeunes sportifs, des règles complémentaires fondées principalement sur l’autorisation parentale auront vocation à s’appliquer.
Joueur artiste interprète. De nombreux auteurs se sont prononcés sur l’existence de droits associés aux performances réalisées par le joueur au cours des compétitions. Tel un artiste interprète exécutant une prestation originale et personnelle, les réalisations parfois uniques de certains joueurs seraient éligibles à des droits d’auteur ou droits voisins associés.
Cette position reste cependant critique au regard de la jurisprudence contemporaine.
Le joueur esportif se rapproche en ce sens plus du sportif que d’un artiste réalisée une prestation d’expression créative. A l’inverse, les actions réalisées par les compétiteurs relèvent d’une réflexion intellectuelle fondée sur al recherche de performance et de victoire dans un affrontement. La qualification d’artiste est en conséquence fortement contestable.
Les conséquences sont importantes pour le joueur et/ou son équipe. En effet, ces derniers ne pourraient invoquer des droits d’artistes/interprètes pour contrôler la diffusion ou rediffusion de contenus de leurs compétitions.