La notion de traitement de données à caractère personnel.

Par Debora Cohen, Avocat.

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La notion de traitement de données est au cœur du Règlement général sur la protection des données.
Il convient de revenir sur sa définition et son régime juridique.

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I. La définition de la notion de traitement de données par le Règlement général sur la protection des données.

L’article 4.2 du Règlement général sur la protection des données (ci-après "le RGPD") dispose qu’on entend par traitement :

« toute opération ou tout ensemble d’opérations effectuées ou non à l’aide de procédés automatisés et appliquées à des données ou des ensembles de données à caractère personnel, telles que la collecte, l’enregistrement, l’organisation, la structuration, la conservation, l’adaptation ou la modification, l’extraction, la consultation, l’utilisation, la communication par transmission, la diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l’interconnexion, la limitation, l’effacement ou la destruction ».

En outre, il s’agit de toute intervention effectuée sur les données de la collecte à leur destruction.

Ainsi, chacun, dans le cadre de ses activités professionnelles ou associatives, effectue quotidiennement des opérations de traitement : collecte, saisie, enregistrement, stockage, modification, transmission, archivage, suppression etc.

Par exemple, dans le cadre de la gestion de la paie, le responsable RH collecte les données, les saisit dans un logiciel de paie, les enregistre, les transmet aux organismes sociaux, les transmet le cas échéant à un prestataire, les édite sous la forme d’un bulletin de salaires, transmet les bulletins de salaires aux salariés concernés, les conserve, les archive et les détruit.

Il en est de même pour le recruteur dans le cadre de son activité de recrutement ou le responsable d’inscription dans un établissement scolaire. À chaque étape, le responsable du traitement ou le sous-traitant doit veiller à ce que les opérations effectuées sur les données le soient en conformité avec le RGPD.

II. Les règles applicables au traitement de données.

a) Les principes.

Afin qu’il soit conforme au RGPD [1], le traitement doit respecter les principes fondamentaux suivants :

  • le principe de finalité : avoir une finalité déterminée et légitime ;
  • le principe de licéité : avoir une base légale (consentement, contrat ou exécution de mesures pré-contractuelles, respect d’une obligation légale, sauvegarde des intérêts vitaux, intérêt public, intérêt légitime) ;
  • le principe minimisation : collecter uniquement les données nécessaires au traitement ;
  • le principe de l’exactitude : s’assurer de la provenance des données et les mettre à jour lorsque c’est nécessaire ;
  • le principe de la durée de conservation limitée : ne pas conserver les données de façon illimitée ;
  • le principe de la transparence : informer systématiquement les personnes concernées sur le traitement de leurs données ;
  • le principe de sécurité : assurer la protection physique et logique des données.

b) L’obligation de tenir un registre des traitements.

Dans le cadre de chaque activité de traitement, le responsable du traitement ou le sous-traitant doit toujours s’assurer que les droits des personnes concernées sont respectés.
Ces droits sont notamment :

  • Le droit d’accès aux données à caractère personnel
  • Le droit de rectification des données ;
  • Le droit de suppression des données (ou droit à l’oubli) ;
  • Le droit de portabilité des données ;
  • Le droit de limitation du traitement ;
  • Le droit d’opposition au traitement ;
  • Le droit de retirer son consentement à tout moment ;
  • Le droit de faire une réclamation à la Cnil.

Afin de pouvoir démontrer le respect de ces principes, l’article 30 du RGPD prévoit que tous les organismes publics comme privés, et qu’importe leur taille, ont l’obligation de tenir un registre des traitements, dès lors qu’ils traitent des données personnelles.

Ce registre doit contenir :

  • Les parties prenantes ;
  • Les catégories de données traitées ;
  • À quoi servent ces données, qui accède aux données et à qui elles sont communiquées ;
  • Combien de temps elles sont conservées ;
  • Comment elles sont sécurisées.

Par dérogation, l’article 30 du RGPD prévoit que les entreprises de moins de 250 salariés doivent inscrire au registre les seuls traitements de données suivants :

  • Les traitements non occasionnels ;
  • Les traitements susceptibles de comporter un risque pour les droits et libertés des personnes (système de géolocalisation, de vidéosurveillance, etc.) ;
  • Les traitements qui portent sur les données sensibles.

Outre cette obligation de tenir un registre des traitements, le responsable du traitement ou le sous-traitant doit accomplir d’autres obligations telles que :

  • S’assurer de la conformité de ses sous-traitants ;
  • Mettre en place des procédures ;
  • Respecter la vie privée dès la conception et par défaut ;
  • Encadrer les transferts de données en dehors de l’Union européenne ;
  • Réaliser une analyse d’impact en cas de nécessité…

III. Les sanctions en cas de manquement aux principes relatifs au traitement.

Lorsque, dans le cadre de ses activités, le responsable du traitement ou le sous-traitant, met en œuvre de tels traitements, il enfreint le RGPD et s’expose, en conséquence, aux sanctions prévues par ce Règlement.

Prévues à l’article 83 du RGPD, celles-ci peuvent être :

  • Un rappel à l’ordre ;
  • Une mise en demeure ;
  • Une injonction de se mettre en conformité, y compris sous astreinte ;
  • Une amende administrative pouvant aller jusqu’à 4% du chiffre d’affaires ou 20 millions d’euros mondial.

Le non-respect de ces principes est sanctionné par la Cnil.

Les décisions ci-dessous donnent un aperçu des manquements condamnables au sens du RGPD.

S’agissant du principe de finalité, la Cnil a prononcé, le 24 juillet 2018, une sanction pécuniaire de 30 000 euros, à l’encontre de l’Office Public de l’Habitat de Rennes [2] (OPH), pour avoir utilisé ses fichiers des locataires, pour envoyer un courrier à des fins politiques.

S’agissant du principe de licéité des traitements, la Cnil a condamné, le 5 septembre 2024 la société Cegedim Santé, d’une amende de 800 000 euros au motif qu’elle utilisait un téléservice permettant d’accéder à l’historique des remboursements de santé des patients et ne prévoyant pas la possibilité que les données soient simplement consultées par les médecins sans entraîner une collecte automatique.

S’agissant du principe de minimisation des données, le 9 janvier 2025, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a condamné la société SNCF Connect [3], pour sa non-conformité à l’article 6.1 du RGPD. L’entreprise collectait, parmi les données personnelles des clients, leurs civilités lors de leur achat en ligne en leur enjoignant de cocher une case indiquant « Monsieur » ou « Madame ».
La cour de justice a estimé que la collecte de la civilité des clients pour la personnalisation de la communication n’était pas indispensable à la fourniture du service de transport et n’était ainsi pas conforme au principe de minimisation des données.

S’agissant du principe d’exactitude des données, la Cnil, le 6 novembre 2024, a rappelé à l’ordre deux ministères [4] pour leur mauvaise gestion du fichier de traitements d’antécédents judiciaires (TAJ). Le Code de procédure pénale prévoit que certaines mises à jour de ce fichier sont obligatoires en fonction de la suite judiciaire donnée à l’affaire. Or, les parquets sanctionnés ne transmettaient pas automatiquement au gestionnaire du TAJ les décisions de relaxe, d’acquittement, de non-lieu et de classement sans suite contrevenant ainsi à l’obligation d’exactitude des données.

S’agissant du principe de conservation des données, la Cnil a condamné d’une amende de 100 000 euros la société PAP éditant le site pap.fr, au motif qu’elle avait défini une durée de conservation de dix ans pour les données de certains comptes clients ayant recours à des prestations payantes du site, sans que cette durée puisse être justifiée par les dispositions du Code de la consommation dont elle se prévalait.

S’agissant du principe de transparence, la Cnil a condamné le 9 avril 2024, la société Hubside Store à une amende de 525 000 euros, dans le cadre d’un démarchage téléphonique, notamment pour ne pas avoir transmis aux personnes démarchées les informations nécessaires sur la collecte et l’utilisation de leurs données personnelles (notamment l’identité, les coordonnées de l’organisme, les objectifs d’utilisation des données, les durées de conservation, la source des données, leurs droits ou encore leur possibilité d’adresser une plainte à la Cnil.

S’agissant du principe de sécurité, la Cnil a condamné, le 31 janvier 2024, un éditeur de site web d’une amende de 100 000 euros pour ne pas avoir mis en place des mesures techniques et organisationnelles adéquates pour assurer la sécurité des données des utilisateurs de son site. Cet éditeur prévoyait en effet des règles de complexité pour les mots de passe pour les comptes utilisateurs trop faibles et conservait en outre ces codes confidentiels en clair et sans chiffrement.

Debora Cohen, avocat au barreau de Paris, en protection des données personnelles et DPO externalisé
Mail : debora.cohen chez dcavocat.com
Site : https://www.dcavocat.com/

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