I. Le droit à l’avocat en garde à vue
La dernière décennie a vu s’accroitre la place de l’avocat dans le cadre de la garde à vue.
Pour rappel, la garde à vue est une mesure de privation de liberté, allant de 24 heures à 144 heures, décidée initialement par un enquêteur qui estime qu’une personne est suspecte d’avoir commis une infraction punie d’emprisonnement.
La garde à vue peut être clôturée par la délivrance par l’enquêteur d’une convocation pour jugement, par une présentation du mis en cause à un juge d’instruction aux fins d’une mise en examen, par une présentation à un procureur de la République aux fins de jugement immédiat ou d’un placement sous contrôle judiciaire en attente du jugement, ou enfin par aucune poursuite, la garde à vue n’ayant pas confirmé d’infraction à l’égard du gardé à vue.
Dans ce dernier cas, quel que soit le temps de votre garde à vue, aucune indemnisation pour votre privation de liberté n’est envisageable, aucune procédure n’étant mise en place et la responsabilité de l’État en matière judiciaire ne peut être engagée que très difficilement pour une faute lourde.
Cependant, lors d’une mesure de garde à vue, la personne concernée dispose de plusieurs droits et notamment celui d’être assistée par un avocat.
Si le gardé à vue choisit l’assistance d’un conseil, il disposera d’un entretien confidentiel au sein des locaux de garde à vue d’une durée maximum de 30 minutes, renouvelé à chaque 24 heures.
L’avocat l’assistera entre outre pour chaque audition et en cas de confrontation.
Le conseil ne peut répondre à la place du mis en cause, mais il s’assurera du respect des règles procédurales et il pourra formuler des questions et des observations en fin d’audition.
En pratique, l’avocat pose un cadre supplémentaire à la mesure de garde à vue, il évite une trop grande pression morale sur le gardé à vue et s’assure que les règles élémentaires de correction soient respectées.
En effet, il est observé que la police et la gendarmerie évoluent positivement dans le sens du respect des droits fondamentaux. Cependant, il arrive encore que certains enquêteurs aiment « la vieille école » avec une volonté de pression sur le mis en cause, ce que la présence de l’avocat permettra d’éviter grandement. Il est d’ailleurs relevé que les bons enquêteurs n’ont absolument pas besoin de hurler, ou d’user de mépris, pour démontrer à un mis en cause qu’une infraction est, ou non, caractérisée à son égard.
L’avocat pourra être choisi par le gardé à vue s’il en connait un, pourra être proposé par la famille sous réserve d’acceptation par le gardé à vue ou pourra être commis d’office si le gardé à vue souhaite être assisté par un avocat mais qu’il n’a pas de conseil habituel.
Lors du choix d’un avocat commis d’office, l’avocat intervenant est indemnisé par l’État quel que soit les conditions de revenus du gardé à vue. En effet, l’urgence de la mesure ne permet pas de justifier du seuil des revenus inférieurs ou non au seuil d’admission à l’aide juridictionnelle.
L’avocat en garde à vue est donc un droit pour tous et il n’existe aucune raison de ne pas y recourir.
Pour les mineurs, ce droit est devenu une obligation.
II. L’obligation à l’avocat en garde à vue pour les mineurs
Le droit des mineurs était peu différent du droit des majeurs concernant l’assistance de l’avocat en garde à vue. Seule une information renforcée des parents est prévue. Les parents ainsi informés peuvent, comme pour les majeurs, solliciter un avocat pour leur enfant placé en garde à vue.
Cependant, en cas de parents défaillants, le mineur était placé dans la position de choisir d’être ou non assisté par un avocat en signant un formulaire.
Il n’était donc pas rare qu’un mineur refuse l’avocat par une mauvaise compréhension, par une volonté de paraître innocent ou parce qu’on lui avait expliqué que ce serait plus rapide sans avocat. Aucun de ces motifs n’est efficient.
L’enfant, bien qu’incapable juridiquement, était donc en position de refuser l’assistance d’un avocat.
La loi du 18 novembre 2016 dite « de modernisation de la justice du XXIe siècle (1) » est venue modifier cette situation en rendant obligatoire l’assistance par un avocat des enfants placés en garde à vue.
Ainsi, l’ordonnance du 2 février 1945, modifiée à de nombreuses reprises depuis, vient imposer l’assistance de l’avocat par la réformation de son article 4, V :
« V-Dès le début de la garde à vue, le mineur doit être assisté par un avocat, dans les conditions prévues aux articles 63-3-1 à 63-4-3 du code de procédure pénale ».
Cette réforme sera appliquée à partir du 1er janvier 2017.
L’avocat intervenant pour les mineurs est astreint aux mêmes missions que pour les majeurs.
Dans les cadres des avocats commis d’office, la majorité des Ordres des avocats assurent cependant des formations renforcées afin que les avocats qui interviennent pour ces enfants aient des méthodes adaptées au jeune âge du justiciable.
Cette réforme apparaît donc particulièrement opportune dans un État de droit.
En effet, il n’était pas admissible que des mineurs, nécessairement plus fragiles et influençables que des majeurs, puissent se priver d’un droit fondamental. Cette procédure était d’autant plus inégalitaire que les personnes familières de la procédure de garde à vue ne manquaient pas d’être assistées par un Conseil. Ainsi, ce déséquilibre n’affectait que les plus influençables et les moins habitués de cette mesure.
En conséquence, cette réforme ne viendra pas affecter l’effectivité de l’enquête mais apportera le respect des droits fondamentaux pour l’ensemble des mineurs placées en garde à vue dont il est bon de rappeler que ce sont des enfants.