L’obligation d’appel en cause des tiers intéressés en matière de conflits d’affiliation.

Par Renaud Deloffre, Magistrat.

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Dans une jurisprudence ancienne et dont les prescriptions sont très régulièrement réitérées par elle, la Cour de Cassation décide que lorsqu’un litige met en cause une question d’affiliation à un régime de sécurité sociale, le juge doit obligatoirement enjoindre l’appel en cause de toutes les personnes et organismes concernés et elle casse les décisions ayant méconnu cette obligation en ayant statué sur le fond sans que le ou les appels en cause nécessaires aient été effectués.

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S’il apparaît utile, compte tenu de son importance pour la pratique judiciaire, de présenter cette jurisprudence et, accessoirement, de s’interroger sur les modalités des mises en causes qu’elle impartit, il n’est pas inutile non plus de s’interroger sur les suites du litige une fois ces dernières effectuées, compte tenu de la jurisprudence de la Cour de Cassation portant sur l’absence de rétroactivité de la décision d’affiliation lorsque l’intéressé était antérieurement assujetti à un autre régime de sécurité sociale.

Dans une jurisprudence constante, la Cour de Cassation rappelle régulièrement que lorsqu’un litige met en cause une question d’affiliation à un régime de sécurité sociale, le juge doit obligatoirement enjoindre l’appel en cause de toutes les personnes et organismes concernés et elle casse les décisions ayant méconnu cette obligation.

L’obligation en question est un moyen de pur droit et le moyen en ce sens peut être soulevé pour la première fois devant la Cour de Cassation [1] et relevé d’office par cette dernière [2].

Cette jurisprudence est rendue systématiquement au visa notamment de l’article 14 du Code de procédure civile selon lequel nul ne peut être jugé sans avoir été entendu ou appelé.

Elle constitue le pendant exact de la jurisprudence sur l’indépendance des rapports s’agissant des litiges opposant d’un côté les caisses aux employeurs et d’un autre côté les assurés aux caisses.

Dans le cadre de cette jurisprudence sur l’obligation de mise en cause des tiers concernés par la question d’affiliation, les rapports entre les parties au litige, normalement au nombre de deux, et tous les autres intéressés sont en effet considérés comme indivisibles ce qui implique leur mise en cause.

Cette jurisprudence fait échec à l’application de l’article 4 du Code de procédure civile selon lequel le juge est tenu par les termes du litige puisqu’elle oblige les parties à appeler en cause des personnes ou organismes à l’encontre desquels elle ne demandaient rien.

En prévoyant une obligation de mettre en cause les intéressés, elle déroge en outre à l’article 332 du Code de procédure civile qui prévoit seulement que le juge peut inviter les parties à mettre en cause tous les intéressés dont la présence lui paraît nécessaire à la solution du litige [3].

Ce litige portant sur l’affiliation peut se poser dans deux hypothèses bien distinctes.

La première hypothèse, que l’on peut qualifier de conflit d’affiliation de la personne contrôlée, est celle d’une personne qui engage une procédure pour contester son affiliation ou qui est poursuivie par un organisme en paiement de cotisations dont elle conteste être tenue au paiement au motif qu’elle est affiliée auprès d’un autre organisme.

La deuxième hypothèse de litige d’affiliation, de loin la plus fréquente dans le contentieux, correspond à un litige portant sur l’affiliation au régime général des personnes apportant leur concours à l’employeur et il peut s’agir, mais pas toujours, d’un conflit d’affiliation de la personne ou des personnes concernées puisque s’il peut arriver que les personnes apportant un tel concours soient affiliées à un autre régime, auquel cas il y a bien conflit d’affiliation, il peut également arriver qu’elles ne soient affiliées à aucun régime.

La problématique est celle d’une personne physique ou morale qui fait l’objet d’un redressement par l’URSSAF au titre des personnes qui lui apportent leur concours et dont l’URSSAF considère qu’elles ressortissent du régime général et que leur rémunération doit être réintégrée dans l’assiette des cotisations.

S’agissant de la première hypothèse, à savoir le conflit d’affiliation de la personne contrôlée, on peut citer, parmi d’autres, une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 30 mars 1978 [4] dans laquelle une caisse autonome de retraite avait engagé une procédure en recouvrement contre un médecin biologiste percevant des sommes d’un centre hospitalier et considérées par ce dernier comme des honoraires et par l’organisme comme des salaires.

La cour d’appel ayant retenu le bien-fondé de la position du médecin, son arrêt est cassé au motif qu’il appartenait à la cour de trancher le conflit d’affiliation après avoir appelé à la cause l’hôpital et tous les organismes et tous les organismes de sécurité sociale susceptibles d’être concernés par la situation du médecin.

On trouve dans le même sens un arrêt du 4 juillet 2007 de la 2ème Chambre Civile [5] dans une affaire dans laquelle un chirurgien-dentiste poursuivi par Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes (CARCD) par voie de contrainte contestait les cotisations qui lui étaient réclamées par cet organisme au motif qu’il était salarié.

Là encore, la cour censure les juges du fond pour avoir statué au fond sans avoir au préalable appelé en cause l’URSSAF et la caisse primaire.

On trouve une autre illustration de conflit d’affiliation de la personne contrôlée dans un arrêt du 24 septembre 2020 (pourvoi n°19-17.009) dans une affaire dans laquelle un médecin retraité faisait l’objet d’une contrainte émise par la CARMF pour recouvrement de cotisations.

Le médecin contestait être tenu de ces cotisations au motif qu’il était salarié d’une société d’exercice libéral et qu’il devait être affilié au régime général.

Il a été suivi par la Cour d’Appel de Nancy qui est cassée au motif qu’en statuant ainsi, sans que la société d’exercice libéral à responsabilité limitée ait été appelée en la cause, alors que le litige dont elle était saisie portait sur la qualification des relations de travail liant le chirurgien-dentiste à cette société, la cour d’appel a violé les articles L311-2 du Code de la sécurité sociale et 14 du Code de procédure civile.

On notera que dans cet arrêt la Cour de Cassation n’a pas mentionné dans les personnes à mettre en cause la caisse primaire et l’URSSAF alors que dans de nombreux autres arrêts, elle prescrit la mise en cause des personnes intéressées par le conflit d’affiliation mais également des organismes sociaux concernés par ce dernier.

S’agissant de la seconde problématique intéressant notre propos et portant sur l’affiliation au régime général de personnes apportant leur concours à l’employeur, la jurisprudence a considérablement fluctué.

Dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 4 juin 1992 [6] était contesté un redressement au titre de rémunérations qualifiées d’honoraires versés à des anciens salariés et l’arrêt d’appel déclarant justifiée la réintégration opérée par l’URSSAF dans l’assiette des cotisations dues par la société est cassé pour avoir omis de prescrire la mise en cause des deux personnes concernées, ainsi que des divers organismes de protection sociale intéressés à la solution du conflit d’affiliation.

De même, dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt publié du 9 mai 1994 (9215691) était en cause un redressement notifié à un agent général d’assurances à raison de sommes versées à deux personnes chargées du recouvrement de primes d’assurances et qui étaient considérées par l’URSSAF comme salariées.

L’arrêt d’appel qui avait considéré que la position de l’URSSAF était bien fondée est cassé au motif que la cour ne pouvait décider l’affiliation des deux personnes concernées en leur absence.

Cette solution est abandonnée dans un arrêt de 1997 [7].

Dans cette affaire la cour d’appel avait décidé que les travailleurs portugais ayant travaillé pour le compte de la société ne relevaient pas du régime des travailleurs indépendants, mais du régime général des salariés et avait considéré le redressement litigieux comme bien-fondé.

Le moyen du pourvoi reprochant aux juges du fond d’avoir statué sans prononcer la mise en cause de ces personnes, ni celle des organismes concernés est rejeté par la Cour de Cassation au motif que la cour d’appel était saisie d’une demande en recouvrement de cotisations et non d’un conflit d’affiliation.

La solution est confirmée par un arrêt du 31 mai 2005 [8] qui est intervenu dans une affaire dans laquelle une cour d’appel avait annulé un redressement notifié à un conseil général au titre de l’emploi de personnes pour effectuer des transports scolaires au motif que l’URSSAF ne prouvait pas le lien de subordination et la Cour de Cassation approuve également la cour d’appel de ne pas avoir ordonné l’appel en cause des chauffeurs au motif qu’elle n’était pas saisie d’un conflit d’affiliation, mais de la contestation d’une décision de redressement de cotisations sociales.

A noter que dans un arrêt du 6 juillet 2000 (n° de pourvoi 98-12.135), la Chambre Sociale avait à l’inverse cassé un arrêt ayant, dans le cadre de la contestation d’un contrôle URSSAF maintenu le redressement correspondant à des sommes versées à une salariée et procédé à l’assujettissement de cette dernière sans mettre cette dernière en cause.

A partir de 2008, la jurisprudence de la 2ème Civile est dans le sens de l’obligation de mise en cause des tiers dont les rémunérations sont réintégrées par l’URSSAF dans l’assiette des cotisations du régime général lorsque cette réintégration est contestée [9] et plus généralement dans le sens de la mise en cause « des intéressés et des organismes de protection sociale dont ils sont susceptibles de relever », selon l’expression retenue [10].

Cette jurisprudence désormais bien établie porte assez souvent sur l’emploi de personnes considérées par l’URSSAF comme se trouvant dans un lien de subordination avec l’employeur.

Ainsi dans une affaire ayant donné lieu à un arrêt du 25 novembre 2021 (pourvoi n° 20-14.759), lorsque le redressement porte sur des rémunérations versées à une personne considérée comme bénévole par une association organisant des manifestations sportives mais comme salariée par l’URSSAF, la personne concernée doit obligatoirement être appelée en cause.

Dans cette même affaire, le même raisonnement est tenu par la Cour de Cassation s’agissant de pilotes de moto qui avaient été considérés par la cour d’appel comme participant à un spectacle et non à des compétitions et dont les rémunérations avaient été réintégrées dans l’assiette des cotisations et le redressement validé.

L’arrêt est cassé au motif qu’il appartenait à la cour d’enjoindre la mise en cause des intéressés.

Dans le même sens, entre autres nombreux arrêts, un arrêt du 6 avril 2023 (pourvoi n° 21-18.256) dans une affaire dans laquelle un club de rugby avait été redressé notamment au titre de l’emploi d’un bénévole.

Le chef de l’arrêt déclarant bien fondée la partie litigieuse du redressement est cassé au visa de l’article 14 du Code de procédure civile au motif que l’intéressé aurait dû être mis en cause.

De même, cette mise en cause s’impose lorsque le litige porte sur la requalification par l’URSSAF des relations entre l’employeur et une personne sous-traitante d’un sous-traitant de l’employeur considéré par l’URSSAF comme étant dans un lien de subordination avec l’employeur [11].

Dans la même affaire, pour une des périodes de rémunération réintégrées, la qualité de salarié n’était pas contestée mais il s’agissait d’un salarié expatrié affilié à la caisse de sécurité sociale des français à l’étranger et il y avait donc un conflit d’affiliation entre caisses qui nécessitait la mise en cause de l’intéressé et, peut-on également penser bien que la Cour de Cassation ne l’évoque pas, celle de la caisse de sécurité sociale des français à l’étranger.

Dans toutes ces affaires, le litige portait sur la qualification par l’URSSAF de relation de subordination constitutive d’un contrat de travail de la relation entre l’employeur et des personnes lui apportant son concours.

Mais, la problématique faisant l’objet de la jurisprudence de la Cour de Cassation étudiée peut porter sur l’emploi de personnes considérées comme ressortissant du régime général par l’URSSAF non pas à raison d’un lien de subordination avec l’employeur mais à raison de leur qualité de Président ou de dirigeant d’une société anonyme lesquels sont assimilés par la loi à des salariés.

On trouve en effet plusieurs arrêts dans lequel le litige portait sur la qualification par l’URSSAF de président ou de dirigeant d’une société par actions simplifiées, lesquels sont affiliés obligatoirement au régime général, d’une personne considérée par l’organisme comme dirigeant de fait [12].

Dans l’affaire ayant donné à l’arrêt du 11 mai 2023, le Président de la société était une société ayant pour unique actionnaire son ancien dirigeant et la cour d’appel avait considéré que cet ancien dirigeant avait maintenu de fait ce dernier dans ses anciennes fonctions et que les rémunérations qui lui étaient versées devaient être réintégrées dans l’assiette des cotisations sociales comme versées à un dirigeant de la société.

Cet arrêt est cassé au motif qu’en statuant ainsi alors qu’elle était saisie d’un litige portant sur la qualité de dirigeant de la société cotisante et son affiliation au régime général la cour avait violé les articles 14 du Code de procédure civile, L311-2 et L311-3,23° du Code de la sécurité sociale.

Le même raisonnement est tenu par la Cour de Cassation dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 10 novembre 2022.

Dans cette affaire l’ancien dirigeant de la société redressée était dirigeant d’une société avec lequel avait été conclu un contrat de prestation de service et il était de surcroît dirigeant de la société mère de la société contrôlée ce qui avait amené la cour d’Appel à considérer qu’il était dirigeant de la société contrôlée et à valider le redressement.

Cet arrêt est cassé au motif que la cour avait statué sur la qualité de dirigeant de l’intéressé sans l’appeler en cause.

On peut penser que la jurisprudence de la Cour de Cassation tant en ce qui concerne les conflits d’affiliation d’une personne que la requalification par l’URSSAF des relations entre la personne contrôlée et les personnes lui apportant leur concours semble assez claire en ce qu’il faut appeler en cause tous les organismes et toutes les personnes intéressés même si il arrive parfois que la Cour de Cassation ne fasse pas état de la totalité des intéressés dans les personnes à mettre en cause.

Cette obligation est impérative même si aucune partie ne sollicite cette mise en cause puisque qu’elle est d’ordre public et elle interdit absolument au juge de statuer sur le fond du litige avant qu’elle ne soit intervenue.

Par ailleurs, cette obligation de mise en cause n’est pas soumise aux conditions générales auxquelles est subordonnée l’intervention forcée par le Code de procédure civile et notamment, lorsqu’elle intervient en cause d’appel, à la condition d’évolution du litige prévue par l’article 555 du Code de procédure civile [13].

En ce qui concerne les modalités de mise en cause des différents intéressés, la Cour de Cassation n’a pas eu l’occasion de se prononcer.

L’appel en cause des intéressés au litige s’analysant comme une intervention forcée, certes sur injonction de la juridiction, il semble raisonnable de lui appliquer les dispositions de l’article 68 dont il résulte que les demandes incidentes, dont fait partie l’intervention forcée, sont faites à l’encontre des tiers dans les formes prévues pour l’introduction de l’instance et, en appel, par voie d’assignation.

L’instance étant introduite par les parties, on peut penser qu’il incombe aux parties de procéder aux mises en cause nécessaires et ce, devant le Pôle social, en saisissant ce dernier d’une requête en application de l’article R142-10-1 du Code de la sécurité sociale et, devant la cour, en faisant délivrer assignation aux intéressés.

Reste à déterminer quelle partie devra procéder à la mise en cause des intéressés.

Faut-il considérer que cette partie doit être celle à laquelle incombe la charge de la preuve du lien d’affiliation en litige ou bien celle ayant saisi la juridiction par l’acte introductif d’instance ou la déclaration d’appel ou bien de manière très pragmatique celle ayant le plus intérêt à la solution du litige ?

Quoi qu’il en soit de la réponse qui sera apportée par chaque juridiction à cette question, il semble indispensable, une fois déterminée la partie qui devra effectuer la mise en cause, de lui impartir un délai pour y procéder tout en enjoignant à l’autre partie de faire le nécessaire en cas de carence de l’adversaire dans le délai imparti, la cause devant être radiée si aucune des parties ne fait les diligences nécessaires.

A noter l’existence d’un arrêt [14] intervenu dans une affaire dans laquelle il semble que la juridiction du fond ait eu l’intention de faire procéder par le greffe à la convocation des personnes intéressées et ait à cet effet enjoint les parties de produire leurs adresses.

L’employeur ayant déféré très incomplètement à cette injonction mais se prévalant néanmoins d’un défaut de mise en cause des intéressés, qu’il attribuait à la caisse, et en déduisant que l’affaire n’aurait pas dû être tranchée au fond, la Cour de Cassation écarte ce moyen au motif que l’employeur, qui était à même de connaître les adresses des enseignants, ne pouvait se prévaloir d’un défaut de mise en cause qu’il avait, par sa carence, empêchée.

Les conditions de mise en œuvre de la jurisprudence de la Cour de Cassation sur l’appel en cause obligatoire des tiers intéressés semblent en définitive ne poser aucune véritable difficulté, sous la réserve très relative de la question de la détermination de la charge de l’appel en cause, et ne méritent pas plus de développements.

Il n’en va pas de même de la question des suites du litige une fois effectuées les mises en cause imparties, laquelle justifie quelques analyses complémentaires.

Dans cette perspective, il convient de présenter la jurisprudence de la Cour de Cassation portant sur l’absence de rétroactivité de la décision d’affiliation lorsque l’intéressé est assujetti à un autre régime de sécurité sociale par décision définitive.

Il résulte en effet d’une jurisprudence très ancienne et constante que la décision administrative individuelle d’affiliation qui résulte de l’adhésion à un régime de sécurité sociale s’oppose quel que soit son bien ou mal fondé, à ce que l’immatriculation à un autre régime puisse mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l’affiliation antérieure.

Un des premiers arrêts identifiés retenant une solution en ce sens mais avec une formulation qui n’est pas encore stabilisée dans la formulation actuelle est un arrêt du 27 octobre 1978 [15] intervenu dans une affaire dans laquelle un gérant libre de station-service s’était immatriculé à un régime de travailleurs indépendants et, au motif qu’il aurait commis une erreur d’affiliation, sollicitait rétroactivement son affiliation au régime des salariés.

La Cour de cassation approuve les juges du fond d’avoir estimé qu’en l’état de cette décision administrative individuelle d’affiliation au régime des non-salariés, quel qu’eut été son bien ou mal fondé, sa demande d’affiliation au régime général postérieure à la cessation de ses fonctions ne pouvait en tout état de cause, remettre en question rétroactivement en l’espèce les droits acquis sous le régime des travailleurs indépendants.

La même solution va être continuellement réaffirmée à l’identique dans des litiges portant sur la même problématique [16] et la majeure de la Cour de Cassation va ensuite trouver sa formulation définitive.

Dans l’immense majorité des arrêts, la Cour de Cassation indique dans sa majeure que si le statut social d’une personne est d’ordre public et s’impose de plein droit dès que sont réunies les conditions de son application, l’affiliation et le versement de cotisations du chef de la même activité à un autre régime de protection sociale s’opposent, quel qu’en soit le bien ou mal-fondé, à ce que l’assujettissement au régime général puisse mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l’affiliation antérieure [17].

Il convient de relever que si dans pratiquement toutes les affaires venues devant elles, la Cour de Cassation proscrit l’affiliation rétroactive au régime général d’un assuré affilié à un régime d’indépendants, cette interdiction d’affiliation rétroactive est susceptible également de s’appliquer en sens inverse [18].

Il résulte de la jurisprudence de la Cour de Cassation un certain nombre d’exceptions à cette règle.

On indiquera en premier lieu qu’il est fait exception à l’absence de caractère rétroactif de la nouvelle affiliation ou de la décision de l’URSSAF de requalifier les relations entre les parties dans le sens de l’assujettissement au régime général lorsque l’intéressé n’est pas affilié à l’ensemble du régime de protection sociale institué pour les travailleurs non salariés des professions non agricoles [19].

Par ailleurs, un arrêt a décidé que l’affiliation au régime des travailleurs indépendants ne faisait pas obstacle à l’affiliation pour la même période au régime général si les cotisations correspondantes n’avaient pas été réglées pour l’une des salariés et avaient été remboursées à l’autre [20].

On mentionnera ensuite que l’intervention d’un jugement pénal entraîne l’application rétroactive de la nouvelle affiliation décidée judiciairement [21].

Il faut ensuite réserver l’hypothèse de la fraude à la loi qui fait obstacle à l’absence de rétroactivité de la première affiliation [22].

Il semble également qu’il faille écarter l’absence de rétroactivité de la nouvelle affiliation en matière d’activités de formation et ce en application d’un arrêt du 26 novembre 2015 de la Cour de Cassation [23], lorsque sont en cause des activités de formateur occasionnel de personnes immatriculées en qualité de formateurs à un régime d’indépendants.

Dans cette affaire, un institut de formation à l’administration publique (IFAP) employait en Nouvelle Calédonie des formateurs occasionnels qui étaient affiliés au régime des indépendants et s’est vu délivrer une contrainte par la CAFAT (qui est l’organisme de recouvrement en Nouvelle-Calédonie) qui avait considéré que ces formateurs étaient salariés.

L’institut de formation, suivi par le Tribunal du travail de Nouméa, faisait valoir que la non-rétroactivité de l’affiliation au régime général faisant obstacle au redressement des cotisations sur la base d’une affiliation à ce régime général ce qui constituait l’application des arrêts précités de la Chambre Sociale.

La Cour de cassation approuve la Cour d’Appel de Nouméa d’avoir décidé que s’agissant de formateurs occasionnels l’assujettissement au titre de l’activité occasionnelle ne faisait pas obstacle au maintien de l’affiliation éventuelle à un régime particulier au titre de l’activité principale.

On voit donc apparaître dans cet arrêt la distinction entre activité de formation à titre principal et celle à titre occasionnelle permettant de faire exception à l’interdiction d’affiliation rétroactive et on donc penser que s’agissant de l’activité spécifique de formateur, et sous toutes réserves que la solution de cet arrêt ne soit pas spécifique à la situation particulière de la Nouvelle-Calédonie, peuvent parfaitement coexister l’affiliation principale à un régime d’indépendant et l’affiliation à titre secondaire au régime général et qu’il n’existerait donc aucun obstacle, certes après mise en cause des organismes et formateurs intéressés, à ce que la juridiction confirme, s’il y a lieu, le redressement afférent à l’activité de formateur occasionnel.

Une fois présentées les exceptions précitées à l’absence de rétroactivité de la nouvelle affiliation, il convient de se poser la question essentielle portant sur la possibilité à la fois de valider une contrainte suite à la requalification des relations unissant l’employeur à la personne lui apportant son concours et à la réintégration des rémunérations dans l’assiette des cotisations sociales au titre du régime général tout en disant qu’il ne peut y avoir de rétroactivité de l’affiliation de l’intéressé au régime général lorsqu’il est affilié à un autre régime, cette question ne se posant pas lorsque l’intéressé n’est affilié à aucun régime.

Cette problématique est traitée par un arrêt ancien publié de la Chambre Sociale du 9 avril 1998 (pourvoi 96-18.706) dans laquelle une société avait été redressée au titre des honoraires versés à son ancien Président-directeur général qu’elle avait engagée en qualité de consultant et la société contestait le redressement au motif que l’affiliation ne pouvait être prononcée rétroactivement.

La Cour casse l’arrêt ayant validé le redressement au motif que l’immatriculation au régime général ne pouvait mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l’affiliation antérieure.

Il semble bien résulter de cet arrêt que la requalification par l’URSSAF de la relation et la réintégration des rémunérations dans l’assiette des cotisations dues par l’employeur ne peut être effectuée à partir du moment où le salarié était affilié à un autre régime que le régime général.

Un autre arrêt de la chambre Sociale du 15 novembre 2001 [24] casse un arrêt réintégrant dans l’assiette des cotisations de l’employeur des commissions versées à son ancien salarié devenu courtier indépendant.

L’arrêt est cassé au motif que pendant la période correspondante le bénéficiaire des rémunérations était travailleur indépendant et avait acquitté des cotisations auprès de son régime d’affiliation.

Et dans des arrêts intervenus en matière de contentieux prud’homal, la chambre sociale vient dire de manière constante que s’il s’oppose à la remise en cause rétroactive d’ une affiliation antérieure, le principe de non-rétroactivité de l’affiliation s’oppose également à la perception des cotisations correspondantes et à la condamnation de l’employeur au paiement desdites cotisations [25], la Cour de Cassation n’admettant l’affiliation rétroactive à un régime d’assurance sociale qu’en cas d’absence totale d’affiliation pour l’activité et la période concernée [26].

Il est cependant important de souligner que s’il ne peut y avoir d’affiliation rétroactive au régime général lorsque l’intéressé est affilié à un régime d’indépendant, l’affiliation au régime général décidée par une caisse primaire produit ses effets pour la période postérieure à sa notification, sous réserve bien entendu de son bien-fondé si ce dernier est judiciairement contesté.

Ainsi dans un arrêt de la Chambre Sociale du 14 juin 1989 [27], la cour indique dans sa majeure que si la décision administrative individuelle d’affiliation qui résultait de l’adhésion à des régimes autonomes de travailleurs non-salariés faisant obstacle, quel que fût son bien ou mal fondé, à ce que l’immatriculation au régime général puisse mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l’affiliation antérieure, elle ne pouvait empêcher la décision d’assujettissement prise par la caisse primaire de produire ses effets pour la période postérieure à sa notification.

Dans le même sens la majeure de l’arrêt du 27 février 1992 de la même Chambre [28] rappelle que le principe de non-rétroactivité fait seulement obstacle à ce que le travailleur affilé à un autre régime de protection sociale soit assujetti au régime général pour une période antérieure à la date de la décision de la caisse primaire et qu’il n’est porté aucune atteinte à ce principe, lorsque sans avoir d’effet rétroactif, la décision d’affiliation met pour l’avenir la situation de l’intéressé en conformité avec les textes régissant son statut social et la cour précise dans sa mineure que l’affiliation au régime général prend date à compter de la date de notification des décisions prises en ce sens par les caisses primaires de rattachement, quand bien même l’exercice des voies de recours en aurait suspendu la mise en application.

On peut donc considérer au vu de la jurisprudence de la Cour de Cassation que, sauf application d’une des exceptions à la non-rétroactivité de la nouvelle affiliation, la juridiction ne peut substituer de manière rétroactive cette dernière à l’affiliation antérieure et qu’elle ne peut que rejeter les prétentions des organismes en paiement des cotisations correspondant à la période couverte par cette dernière.

La jurisprudence de la Cour de Cassation prohibant la rétroactivité de la nouvelle affiliation semble donc vider de toute véritable substance la poursuite du litige d’origine entre l’organisme et le cotisant s’il porte, comme dans l’immense majorité des cas, sur un redressement de l’URSSAF intervenu au titre d’une période pour laquelle la personne apportant son concours était affiliée à un autre régime que le régime général.

Au vu de la jurisprudence actuelle de la Cour de Cassation et sous toutes réserves d’un revirement de jurisprudence, les poursuites de l’organisme risquent, dans ce dernier cas de figure, d’être déclarées mal-fondées, sauf si l’on se trouve dans un des cas d’exceptions à la non-rétroactivité de la nouvelle affiliation.

Mais même dans les cas où il ne resterait rien de la substance d’origine du litige, ce dernier peut cependant retrouver une nouvelle vigueur avec les appels en cause ordonnés par la juridiction, les intéressés pouvant solliciter la requalification de leurs relations avec le cotisant voire même la condamnation de ce dernier à leur verser des sommes à titre de rémunérations ou de dommages et intérêts.

Si la personne apportant son concours obtient la requalification de ses relations, (requalification du concours apporté au cotisant en contrat de travail ou en fonctions de direction de la société), la décision en ce sens, à supposer que la demande de requalification d’une relation contractuelle soit analysée comme une demande au sens de l’article 5 du Code de procédure civile ou une prétention au sens de son article 4, aura alors autorité de la chose jugée dans les relations entre les intéressés et pourra être invoquée devant la juridiction compétente pour fonder les demandes dont cette dernière pourra être saisie par la personne apportant son concours.

S’agissant des demandes indemnitaires ou en rappel de salaires et accessoires du salaire émanant de la personne dont la qualité de salarié serait reconnue, le Pôle social devrait en toute logique se déclarer incompétent au profit du Conseil des Prud’hommes pour en connaître mais l’on peut s’interroger sur sa compétence pour connaître des demandes en versement de rémunérations ou de dommages et intérêts pour révocation abusive qui seraient dirigées contre la société par une personne dont serait reconnue la qualité de dirigeant de fait de la société.

En cas de recours contre la décision rendue par le Pôle Social, il conviendra de faire application des dispositions des articles 90 et 91 du Code de procédure civile si le tribunal a statué à la fois sur le fond et la compétence et les dispositions des articles 83 à 89 du même Code s’il n’a statué que sur la compétence.

S’agissant des prétentions en paiement ou indemnitaires qui seraient présentées devant la cour par la ou les personnes dont elle a ordonné la mise en cause et dont elle reconnaît la qualité de salarié ou bien de dirigeant de fait, la cour ne pourra relever d’office son incompétence puisqu’elle ne peut le faire, en application de l’article 76 du Code de procédure civile, que lorsque l’affaire relève de la juridiction pénale ou administrative ou échappe aux juridictions françaises et, si elle est saisie d’une exception d’incompétence pour connaître de telles demandes, on peut raisonnablement penser qu’elle ne pourra que se déclarer incompétente au profit de la juridiction de première instance compétente, les dispositions de l’article 90 du Code de procédure civile n’étant pas applicable à ce cas de figure.

Renaud Deloffre
Conseiller à la Chambre de la Protection Sociale de la Cour d’Appel d’Amiens.
Docteur de troisième cycle en sciences juridiques.

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Notes de l'article:

[12e Civ 10 octobre 2019 n° de pourvoi 18-17.877.

[2Dans ce sens 2e Civ., 18 février 2021, pourvoi n° 20-12.013 dans lequel la Cour de Cassation casse l’arrêt déféré ayant retenu l’existence d’un lien de subordination au vu du moyen relevé d’office par elle tiré de l’absence de mise en cause des intéressés.

[3Cependant un des arrêts s’inscrivant dans cette jurisprudence, à savoir celui du 24 septembre 2020, n° de pourvoi 17-17.009, est rendu au visa de ce texte ainsi que des articles 552 du Code de procédure civile R643-2 du Code de la sécurité sociale.

[4Soc 30 mars 1978 n° 7710908.

[52e Civ., 4 juillet 2007, pourvoi n° 06-17.346.

[6Soc., 4 juin 1992, pourvoi n° 90-13.036, Bulletin 1992 V N° 366.

[7Soc., 27 mars 1997, pourvoi n° 95-18.115.

[82e civ 31 mai 2005 pourvoi n° 0330741.

[92e Civ 15 mai 2008 n° de pourvoi 0713709.

[10Soc., 2 avril 1992, pourvoi n° 89-21.485.

[112e Civ 7 avril 2022 n° de pourvoi 20-21.622.

[122e Civ 11 mai 2023 pourvoi n° 2117226 ; Civ 2e 10 novembre 2022 pourvoi n° 2111806.

[13En ce sens Cass. 2e civ., 24 sept. 2020, n° 19-17.009 cassant l’arrêt ayant déclaré irrecevable en cause d’appel l’intervention forcée de l’un des organismes concernés au motif que le conflit d’affiliation était connu en première instance et que la condition d’évolution du litige n’est pas remplie.

[14Soc., 27 juin 1996, pourvoi n° 94-15.392, Bulletin 1996, V, n° 259.

[15Soc., 27 octobre 1978, pourvoi n° 77-11.919, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale n° 732 p549.

[16Par exemple Soc., 4 juillet 1979, pourvoi n° 78-10.631, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale n° 608 ; Soc 16 décembre 1980, pourvoi n°79-12.978, Bull n° 904.

[173 février 1988 n°85-16.875 ; 17 février 1988 n°85-16.639 ; 16 novembre 1988 n°86-12.345 ; 14 juin 1989 n° 86-16.750 ; 1er février 1990 n° 87-15.176 ; 28 février 1991 n° 88-12.436 ; 30 janvier 1992 n°89-14.528.

[18En ce sens Soc 11 octobre 2001 n°00-10.802 et également 2e Civ., 25 novembre 2021, pourvoi n° 16-15.908 dont il résulte l’immatriculation au régime spécial de la fonction publique ne peut mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l’affiliation antérieure au régime général.

[19En ce sens s’agissant d’une personne cotisant à la seule caisse d’allocations familiales en tant que travailleur indépendant, Soc., 13 décembre 1979, pourvoi n° 78-12.448, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale n° 996 et Soc., 21 mars 1991, pourvoi n° 88-20.051 s’agissant d’une personne assurée auprès de la CIPAV pour le risque vieillesse mais qui n’était inscrit à aucun organisme au titre de l’assurance maladie, en sorte qu’il ne pouvait pas être considéré comme justifiant d’une affiliation régulière au régime des travailleurs indépendants ; de même Soc., 7 avril 1994, pourvoi n° 91-15.540, Bulletin 1994 V N° 145 dont il résulte que seule la double affiliation à l’assurance maladie et à l’assurance vieillesse permet de justifier d’une affiliation régulière au régime des travailleurs non salariés/ En sens contraire Soc., 16 novembre 1988, pourvoi n° 86-12.345, Bulletin 1988 V N° 601 dont il résulte que l’immatriculation au régime général ne peut pas mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés de l’affiliation antérieure, quand bien même l’intéressé n’aurait pas obtenu son inscription à l’URSSAF, organisme du régime général, en vue du paiement de la cotisation d’allocations familiales et casse l’arrêt déféré dont la solution contraire reposait sur le fait que l’intéressé n’avait pas cotisé à tous les régimes de travailleurs non salariés.

[20En ce sens Soc., 10 mai 1990, pourvoi n° 87-20.281 / En sens contraire, Soc., 9 avril 1998, pourvoi n° 96-18.706, Bulletin civil 1998, V, n° 209 dont il résulte qu’il ait indifférent que l’assuré eût ou non perçu des prestations d’assurance maladie des régimes autonomes auxquels il était affilié.

[212e Civ., 22 février 2005, pourvoi n° 03-30.259, 03-30.253, Bull. 2005, II, n° 37 approuvant les juges du fond d’avoir rejeté l’argumentation des organismes sociaux faisant valoir qu’une décision d’affiliation au régime général ne peut mettre rétroactivement à néant les droits et obligations nés d’une affiliation antérieure et d’avoir retenu qu’un sous-traitant considéré comme salarié par la juridiction pénale devait bénéficier des prestations légales dues en cas d’accident du travail.

[22En ce sens par exemple Soc., 6 décembre 1990, pourvoi n° 88-15.146 qui rejette un pourvoi contre un arrêt ayant retenu que l’affiliation des intéressés auprès des organismes de travailleurs indépendants avait été faite en fraude de la loi, s’agissant de la mise à disposition de travailleurs non-salariés par une entreprise de travail temporaire, la cour d’appel était fondée à en déduire que la société ne pouvait se prévaloir d’un droit acquis faisant obstacle à une affiliation rétroactive des intéressés au régime général de la sécurité sociale, en conformité avec leur véritable statut social / Egalement, dans un sens un peu différent, Soc., 27 octobre 1978, pourvoi n° 77-11.919, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre sociale n° 732 p549 qui relève pour écarter l’affiliation rétroactive que les organismes de l’affiliation initiale ont accepté les cotisations sans fraude et sans réserve.

[232e Civ 26 novembre 2015 n° 1425615.

[24N° 00-12.031 et 00-12.032.

[25Soc., 13 octobre 2011, pourvoi n 10-13.703, précité ; Soc., 31 janvier 2012, pourvoi n° 10-26.513, précité ; Soc., 22 septembre 2015, pourvoi n° 13-27.742, 13-28.065 ; Soc., 24 mai 2018, pourvoi n° 16-19.896.

[26Soc 30 mai 2013 n°12-16153.

[27Pourvoi n° 86-16.750, Bulletin 1989 V n°449.

[28Pourvoi 89-20.301 et 89-20.538 P.

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