Innover en cabinet d’avocat (4) : mettre en oeuvre le projet d’innovation.

Paola Predko

Consultant chez Lexlife : la startup du droit du côté des avocats !

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Explorer : # innovation # management # conduite du changement

Après avoir soigneusement préparé votre démarche durant la phase d’innovation en amont (voir nos articles précédents), place à la phase d’action et à la mise en oeuvre du projet. Si la phase d’innovation en amont nécessite des qualités telles que la créativité, la projection dans des domaines inconnus, la phase de mise en oeuvre mobilise des compétences radicalement opposées. Au cours de cette étape cruciale du développement, le responsable de l’innovation passe le relai au chef de projet, à qui revient la tâche de « piloter » le plan d’action. La mise en en oeuvre du projet doit se faire dans le respect formalisé du cahier des charges, qui tient lieu d’expression du besoin à satisfaire, tout en gardant à l’esprit la maîtrise du périmètre et des coûts de développement.

Vous trouverez-ci dessous quelques conseils pour bien conduire le développement d’un projet d’innovation dans votre cabinet.

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La boîte à outils du chef de projet

A l’issue de l’innovation en amont, la phase exploratoire est achevée, l’étude de faisabilité à été réalisée. Les grandes orientations fonctionnelles et techniques de l’innovation ont été prises par l’organe décisionnel du projet. Le rôle du chef de projet est désormais de coordonner les ressources nécessaires à la réalisation effective. Pour la bonne réalisation de sa mission, le chef de projet pourra faire appels à différents outils de suivi et de contrôle.

- Le cahier des charges traduit l’expression du besoin auquel l’innovation doit répondre. Il reprend précisément les objectifs, les résultats attendus et la ligne conductrice du projet. Il investit le chef de projet de sa mission, en précise le périmètre et les responsabilités. Véritable tableau de bord du projet, il décrit précisément l’innovation à mettre en oeuvre. Il reprend les éléments essentiels de l’étude de marché (cibles, besoins de la clientèle visée, concurrence, prévisions de chiffres d’affaire) et de l’étude de faisabilité (techniques et moyens employés pour atteindre les objectifs). Le cahier des charges n’omet aucun aspect du projet : stratégie, organisation, ressources humaines, matérielles et financières, processus de réalisation, marketing etc. Il donne un instantané du projet en termes de performances, de délais et d’objectifs.

- L’organigramme des tâches présente la totalité des travaux à accomplir dans le cadre du projet. Il présente les différentes actions à réaliser au sein d’une arborescence dite « itérative » (une étape après l’autre). Il est conseillé de procéder à plusieurs niveaux de découpages en regroupant les tâches sous différents processus ou « lots de travaux », et de mettre en évidence l’interdépendance entre les différentes étapes. L’organigramme des tâches permet de « verrouiller » le contenu du projet et de prévoir l’ensemble des travaux à planifier. Outil indispensable d’organisation du projet, il sert également de support de contrôle au cours de l’avancement de la mise en oeuvre.

- L’organigramme des ressources donne une vision structurée et organisée des moyens nécessaires au projet. Cette vision permet d’affecter à long terme les ressources pertinentes à des lots de travaux à réaliser. Les ressources à gérer peuvent être des ressources humaines, qui sont alors appréciées sous l’angle de leurs compétences. Il peut également s’agir de ressources techniques et matérielles, il s’agit alors d’identifier les équipements et besoins organisationnels majeurs, nécessaires à la réalisation du projet.

- Le calendrier d’exploitation opère un croisement entre les données de l’organigramme des tâches et celles de l’organigramme des ressources. Il établit les délais des différentes étapes de réalisation et définit l’emploi du temps des acteurs du projet. Il est conseillé de consacrer une grande attention à son élaboration et de prévoir des marges dites de « tolérances » (prendre en compte notamment l’incertitude des délais fournisseurs, absences, imprévus…). Veillez à mettre en évidence les « jalons » ou points de passages d’une itération à l’autre. Planifier les réunions d’avancement, les phases d’évaluation et de validation des différentes étapes.

- Le prévisionnel financier établit la liste des achats et dépenses nécessaires à la réalisation du projet. Incluez les devis des prestataires externes auquel le cabinet fera appel pour les besoins du projet (consultants, agence de communication, prestataire IT…). Evaluez également le coût de la mobilisation des ressources humaines internes du cabinet, selon le temps consacré à la réalisation du projet. Comme pour les délais, prévoyez des seuils de tolérance en cas d’incertitudes ou de fluctuation du budget.

Tous ces éléments viennent alimenter le fonds documentaire du projet. Ce dernier permet de matérialiser les évolutions du projet au fur et à mesure de son exécution. Il permet aux acteurs de s’appuyer sur des références précises et garanti l’interprétation commune de la gestion de projet.

Mettre en oeuvre le projet

-  Adapter son style de management

La bonne conduite de la mise en oeuvre nécessite d’obtenir l’efficacité de l’équipe dans les différentes situations mises en scènes par le projet. Le chef de projet devra adapter son style de management pour chacune de ses situations, afin de motiver les acteurs, tout en structurant la démarche projet. En tant que « pilote », le chef de projet ne peut pour autant se cantonner à son rôle de « directeur » des opérations. Tour à tour « coach » des équipes, médiateur des conflits ou encore gestionnaire, le chef de projet veillera à favoriser la remontée d’information à travers un mode de management participatif et communiquant.

  • Surveiller la production technique

Dans le cas où votre projet innovant intègre une production technique tierce (par exemple un outil informatique, un site web…), maintenez une relation de proximité avec le ou les prestataires externes tout au long du projet. Veillez à ce que les documents nécessaires (bons de commande, briefings etc) soient tenus à disposition pour ne pas risquer de retards dans la production. Assurez vous que vos attentes sont parfaitement comprises par vos interlocuteurs, de manière à anticiper, et à maîtriser les demandes de modifications.

  • Effectuer les premiers tests

Dans l’idéal et si votre projet le permet, prévoyez une phase de test pour valider vos hypothèses. Par exemple, si votre innovation consiste à proposer un service juridique sous forme d’abonnement, sélectionner un échantillon de clients fidèles et de confiance et proposez leur de tester cette nouvelle formule pendant une période donnée. A l’issue de la phase de test, il est très important de recueillir les retours, le « feedback » des personnes qui auront participé à l’expérience. Vous pourrez ainsi ajuster au moment du développement à grande échelle du projet. Cette phase de test permet également de familiariser les acteurs aux nouvelles pratiques issues de la mise en place du projet.

  • Maîtriser l’avancement du projet et le reporting

Le chef de projet s’impose des relevés réguliers des avancées du projet afin de vérifier l’adéquation des réalisations avec le cahier des charges, la maîtrise des coûts et des délais. Le pilotage et le reporting du projet s’effectuent donc en continu, en réactualisant les supports de suivi aussi souvent que nécessaire. Les écarts par rapport aux prévisions sont ainsi détectés en temps réel et peuvent faire place à une prise de décision rapide et éclairée en toute situation.

Piloter le projet

  • Maintenir l’engagement des acteurs

Le chef de projet doit identifier les leviers qui lui permettront de motiver ses équipiers tout au long du projet. Il doit remporter l’adhésion et la participation de l’équipe, tout en intégrant les individualités qui compose le groupe et en veillant à leur satisfaction. Le rôle du chef de projet est de maintenir un climat favorable au développement du projet en restant à l’écoute des différents besoins de ses collaborateurs : besoin de reconnaissance, besoin de communication et d’échange, besoin d’être rassuré face à l’incertitude.

  • Gérer les désaccords

Du fait de son caractère nouveau et inconnu, les désaccords sont quasi inhérents au projet d’innovation. Le chef de projet joue un rôle majeur dans la résolution de ces désaccords. Il doit les détecter au plus tôt et choisir le mode de résolution le plus adapté : coopération, consensus, report temporaire ou retrait d’une action, réaffectation des responsabilités, négociation etc. L’objectif est de traiter le désaccord de façon optimale pour les acteurs, en gardant à l’esprit l’intérêt du projet et surtout en évitant la dégénération en conflits de personnes.

  • Conduire le changement

La conduite d’un projet, et particulièrement d’un projet d’innovation, bouleverse très souvent les habitudes, les méthodes, les responsabilités, les compétences et parfois même les valeurs des parties prenantes dudit projet. Le chef de projet doit parfaitement identifier les alliés, les indifférents et les opposants du projet. Il catalyse le changement en prévoyant un système d’information propre au projet et en s’appuyant sur une stratégie d’influence saine et maîtrisée. Les impacts du projets sur les acteurs doivent être étudiés afin d’activer les leviers appropriés pour la conduite du changement : informer et communiquer avec l’équipe, former les acteurs aux nouvelles pratiques, faire participer le groupe à la prise de décision.

La conduite d’un projet d’innovation nécessite donc une grande polyvalence de la part du chef de projet. Si aucun des associés du cabinet n’est en mesure de s’investir du rôle pour des raisons de charges de travail, ou de compétences, n’hésitez pas à vous faire accompagner par des professionnels au cours de cette phase.

A la clôture des opérations de développement, le projet d’innovation touche presque à sa fin. Restent à pérenniser et à promouvoir l’innovation auprès de son marché. Cette étape finale fera l’objet du notre prochain – et dernier – article de cette chronique sur l’innovation.

Paola Predko

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