Chirurgie esthétique et responsabilité pénale. Par Mathilde Goineau, Avocat.

Chirurgie esthétique et responsabilité pénale.

Par Mathilde Goineau, Avocat.

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Explorer : # chirurgie esthétique # responsabilité pénale # risques médicaux # information patient

La chirurgie esthétique désigne les actes chirurgicaux tendant à modifier l’apparence corporelle d’une personne, à sa demande, sans visée thérapeutique ou reconstructrice.

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La pratique de la chirurgie esthétique constitue un exercice de la médecine, même s’il s’agit de rectifier un organe sain mais dont l’aspect extérieur peut paraître déplaisant.

Doivent donc notamment être pratiqués par un médecin :

  • les traitement de la couperose et l’ablation d’excroissances cutanées,
  • les traitement de la calvitie,
  • les injections,
  • les chirurgies mammaires,
  • les liposuccions ainsi que les actes médicaux qui leur sont préparatoires, tels que l’injection de produits sédatifs [1].

L’exercice de la chirurgie esthétique est subordonné à des règles pénalement sanctionnées concernant [2] :

1) Les installations dans lesquelles sont pratiquées les interventions.

Une intervention de chirurgie esthétique ne peut être pratiquée que dans des installations satisfaisant à des conditions techniques de fonctionnement, ayant fait l’objet d’une certification.

2) L’information financière qui doit être fournie au patient.

Le praticien doit notamment [3] :

  • informer la personne concernée, et, s’il y a lieu, son représentant légal sur :
    • les conditions de l’intervention,
    • les risques,
    • et les éventuelles conséquences et complications ;
  • remettre un devis détaillé ;
  • respecter un délai minimum entre la remise de ce devis et l’intervention éventuelle. Le délai minimum est fixé à 15 jours [4].

La responsabilité pénale du praticien peut également être recherchée sur le fondement de la mise en danger délibérée d’autrui, notamment lorsque le chirurgien a pratiqué des interventions de chirurgie esthétique sans précaution et en ayant recours à un personnel sans qualification.

Par ailleurs, le délit de blessures involontaires peut être retenu, par exemple en cas d’ablation tardive de prothèses mammaires qu’un chirurgien avait placées sur une patiente au cours d’une première intervention faisant suite à une mastectomie sous-cutanée, et en les remplaçant par d’autres prothèses, sans faire procéder aux examens bactériologiques nécessaires [5].

De même, la Cour de cassation a déclaré un chirurgien coupable d’homicide involontaire, à l’occasion d’une opération de chirurgie esthétique, en l’absence de prise en compte du risque avéré de thrombose présenté par la victime en raison de son âge, considérée comme une faute essentielle et déterminante ayant directement entraîné le décès [6].

La jurisprudence a également retenu le délit de tromperie sur la qualité du chirurgien, lorsque le médecin était présenté comme chirurgien alors qu’il n’en avait pas la qualité.

C’est un manquement, d’une part à la loyauté, d’autre part au principe selon lequel un médecin doit s’abstenir de réaliser des actes qui dépassent ses compétences, en l’occurrence une lipoaspiration qui est un acte chirurgical.

La responsabilité du directeur de l’établissement est aussi engagée pour avoir entretenu chez la patiente l’illusion que l’intervention serait réalisée par une équipe chirurgicale compétente et qualifiée [7].

Engager la responsabilité pénale à la suite d’un acte de chirurgie esthétique nécessite d’être bien accompagné sur le plan juridique afin de mettre toutes les chances de son côté, car la procédure peut être complexe et technique.

Mathilde Goineau
Avocat en droit pénal et en droit médical
Barreau des Hauts-de-Seine - Toque 120
Titulaire du Diplôme Universitaire de Contentieux Médical
avocat.goineau chez gmail.com

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Notes de l'article:

[1Cass. 1ère civ, 5 février 2014 / n° 12.140.

[2Article L6324-2 du Code de la santé publique.

[3Article L6322-2 du Code de santé publique.

[4Article D6322-30 du Code de la santé publique.

[5Cass crim, 19 octobre 2004 / n° 04-80.317.

[6Cass crim, 29 octobre 2002 / n° 01-87.374.

[7CA Paris, 25 oct. 2001, RDSS 2002. 257.

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