Le sort du bail commercial dans la liquidation judiciaire. Par Joan Dray

Le sort du bail commercial dans la liquidation judiciaire.

Par Joan Dray

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Explorer : # liquidation judiciaire # bail commercial # résiliation de bail # loyers et charges

Lorsque le preneur se trouve en liquidation judiciaire, le liquidateur fera le choix soit de résilier le bail, soit de le poursuivre en vue de sa cession.
Lorsque le liquidateur décide de résilier le bail, elle est notifiée au bailleur et s’impose à lui.

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Dans ce cas, le bailleur devra obtenir la restitution des locaux et ses clés.
En revanche, lorsque le liquidateur décide de poursuivre le bail, il ne dispose pas toujours de liquidités permettant de régler le bailleur et cela peut lui être d’une grande difficulté.

Il arrive également parfois que le bailleur s’oppose à cette cession car il estime que le bail est résilié de plein droit soit pour des causes antérieures au jugement de liquidation judiciaire, soit pour des causes postérieures.

Si dans le premier cas, il s’agira essentiellement de faire constater la résiliation pour manquement du locataire à des obligations de faire (réparations, travaux etc..) ou de ne pas faire, dans le second cas, le bailleur agira pour obtenir le paiement des loyers et charges que le liquidateur ne peut pas régler.

Il faut bien comprendre que le bailleur qui doit attendre la cession pour être payé peut se retrouver légalement en difficulté.

La loi lui permet d’agir et d’obtenir la résiliation du bail

 Résiliation pour cause antérieure

Depuis la loi du 26 juillet 2005, le bailleur qui souhaite poursuivre la résiliation judiciaire ou de plein droit du bail, pour des causes antérieures au jugement d’ouverture de la procédure, doit introduire son action dans un délai de trois mois.

Le législateur a modifié le point de départ de ce délai puisque celui ci court désormais à partir de la publication du jugement de liquidation judiciaire (Code de commerce art <l 641-12 al4).

Attention cependant car il s’agit d’un délai de forclusion et non un délai de prescription, ce qui signifie très clairement que le bailleur doit redoubler de vigilance car a l’expiration de ce délai, il sera irrecevable à introduire toute action judiciaire pour faire constater la résiliation du bail pour des causes antérieures.

Il faut cependant savoir ce que le législateur a entendu sur la notion de « cause antérieure ».

En effet, il est utile de s’interroger sur la possibilité d’introduire une action en justice par le bailleur pour des causes antérieures au jugement d’ouverture, tel que le défaut de paiement du loyer ou tout autre manquement contractuel.

La règle de l’arrêt des poursuites a conduit la Cour de cassation à trancher sur cette conception en considérant que : « les causes antérieures au jugement de liquidation judiciaire ne peuvent concerner que les obligations autre que le paiement de somme d’argent ».

Aussi, cette jurisprudence devrait continuer à se poursuivre malgré la nouvelle rédaction de l’article L 661-12 du Code de commerce, et le bailleur ne pourrait toujours pas invoquer comme cause de résiliation, le défaut de paiement de loyer ou charge antérieurs au jugement d’ouverture.

En pratique, cela signifie que le bailleur ne pourrait invoquer que l’inexécution de faire ou de ne pas faire (exemple réparation locative, travaux, remise en état, …) incombant au locataire avant le jugement.

Bien évidemment le bailleur devra toujours prendre la précaution d’assigner le liquidateur en qualité de représentant de la société.

 Résiliation pour cause postérieure

Il va de soi que le bailleur peut agir en résiliation pour des causes financières postérieures aux liquidations judiciaires car la règle de l’arrêt des poursuites ne concerne que le défaut de paiement avant le jugement.
Il serait totalement inadmissible que le bailleur qui a déjà perdu des créances de loyers et charges soit dans l’impossibilité de recouvrer des créances de loyers postérieures au jugement.

L’article L 641-12 al 5 du Code de commerce dispose que : …
Le législateur a ainsi permis au bailleur de poursuivre la résiliation pour des causes financières postérieures à la liquidation judiciaire ou au jugement de conversion d’une sauvegarde ou de redressement en liquidation.
Cette règle est logique car les loyers et charges doivent être payés comptant pendant toute la durée ou le bail est continué.

Le bailleur pourra donc parfaitement introduire une action en justice et mettre en jeu le mécanisme de la clause résolutoire.

Cela étant il devra respecter des délais puisqu’il ne pourra agir qu’au terme d’un délai de trois mois à compté du jugement de liquidation judiciaire (art L622-14 al 3).

Ce délai d’attente n’est pas sans conséquences financières pour les bailleurs puisqu’ils devront attendre avant d’être autorisé à agir en résiliation.
Ce sacrifice a pour seul effet de permettre le maintien du bail qui pourra faire l’objet d’une cession.

Le bailleur doit garder cependant à l’esprit qu’il bénéficie d’un privilège que pour les deux dernières années de loyers précédant le jugement d’ouverture ( L622-16 Code de commerce).

Dans la pratique, la place du bailleur est pourtant malaisée puisque son privilège spécial est non seulement primé par le super privilège des salariés et le privilège des frais de justice et depuis la réforme de 2005 par le privilège de la conciliation institué par l’article L 611-11 du nouveau code.

Joan Dray

joanadray chez gmail.com

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