Le 21 janvier 2021, le Sénat a adopté à l’unanimité une proposition de loi visant à fixer à 13 ans l’âge-seuil en-deçà duquel un mineur ne peut consentir à un rapport sexuel avec un adulte.
Cette proposition de loi crée une nouvelle infraction spécifique pour criminaliser tout acte de pénétration sexuelle entre un majeur et un mineur âgé de moins de 13 ans. Ainsi, pour qualifier un viol, il ne sera plus nécessaire de relever que la victime âgée de moins de 13 ans n’était pas consentante mais seulement que l’auteur avait connaissance de l’âge de la victime ou ne pouvait l’ignorer.
Lors des débats relatifs à l’adoption de la loi du 3 août 2018, la disposition visant à fixer à 15 ans l’âge minimal de consentement avait pourtant été écartée après un avis du Conseil d’Etat du 15 mars 2018 alertant le gouvernement sur les risques de censure par le Conseil Constitutionnel.
A ce jour, le droit français ne détermine pas explicitement de présomption de non-consentement en deçà d’un certain âge. La question du consentement de la victime est toujours appréciée au cas par cas par les juges et cette automaticité d’une absence de consentement pour les mineurs en dessous d’un certain âge fait débat.
Il convient de préciser en outre que l’expression « majorité sexuelle » ne figure pas en tant que telle dans le droit français mais que le code pénal retient l’âge de 15 ans comme pivot pour déterminer la gravité des infractions. Dès lors qu’un mineur n’a pas encore atteint le jour de son 15ème anniversaire, la protection est renforcée en matière d’infractions sexuelles.
1. Mineurs de moins de 15 ans.
Lorsqu’un majeur impose une relation sexuelle à un mineur de 15 ans, il pourra être poursuivi pour viol sur le fondement de l’article 222-22 du code pénal.
Afin de caractériser cette infraction, il est nécessaire de relever que l’auteur a usé de violence, contrainte, menace ou surprise. Ces procédés permettent de déduire que le mineur de moins 15 ans n’a pas donné son consentement et que la relation était nécessairement imposée.
Ces notions de violence, contrainte, menace et surprise sont définies par la jurisprudence et l’absence de consentement de la victime est appréciée au cas par cas.
Il en va ainsi de l’individu qui menace d’abandonner la jeune victime, nue et dans un endroit isolé [1], de l’individu qui maintient la tête de la victime afin qu’elle lui fasse une fellation [2] ou encore de l’individu qui a un rapport sexuel avec une jeune fille, malgré ses supplications [3].
En outre, afin de faciliter la preuve du non-consentement de la victime mineure, l’article 222-22-1 du Code pénal précise que la contrainte peut être physique ou morale et qu’elle peut résulter de la différence d’âge existant entre une victime mineure et l’auteur des faits ou encore de l’autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur cette victime.
Par exemple, la jurisprudence a considéré que pour des enfants de 1 an et demi et de 5 ans, « l’état de contrainte ou de surprise résulte du très jeune âge des enfants qui les rendait incapables de mesurer la gravité et la nature des actes qui leur étaient imposés » [4].
Le fait que la victime soit un mineur de moins de 15 ans est une circonstance aggravante de l’infraction de viol. Selon l’article 222-24 2° du Code pénal, la peine encourue passe alors de 15 ans à 20 ans de réclusion criminelle.
Lorsqu’un majeur a une relation sexuelle avec un mineur de moins de 15 ans, même si ce dernier était consentant ou que le majeur n’a pas usé de violence, contrainte, menace ou surprise, le majeur pourra être poursuivi pour le délit d’atteinte sexuelle sur mineur réprimé par l’article 227-25 du Code pénal.
En effet, cet article 227-25 du Code pénal dispose que :
« Hors le cas de viol ou de toute autre agression sexuelle, le fait, par un majeur, d’exercer une atteinte sexuelle sur un mineur de quinze ans est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende. »
Des circonstances aggravantes existent et tiennent à la personne de l’auteur, par exemple lorsque celui-ci est un ascendant ou une personne ayant autorité de droit ou de fait sur la victime.
En résumé, même lorsque le majeur n’a pas usé de violence, contrainte, menace ou surprise, et que le mineur a consenti à l’acte, le droit français incrimine tout acte sexuel entre un majeur et un mineur de 15 ans et considère que quelles que soient les circonstances l’auteur doit être poursuivi à minima pour atteinte sexuelle sur mineur de 15 ans.
2. Mineurs entre 15 et 18 ans.
Lorsque le mineur âgé de 15 à 18 ans consent à une relation sexuelle avec un majeur et que ce dernier n’a pas usé de violence, contrainte, menace ou surprise, alors, selon l’article 227-27 du Code pénal, cette relation sexuelle n’est punissable que dans deux cas : si le majeur est un ascendant légitime, naturel ou adoptif ou toute autre personne ayant autorité sur la victime, ou si le majeur est une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions. La peine encourue est alors de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
La jurisprudence a considéré qu’il s’agissait notamment de l’ami de la famille qui s’était vu confier la garde du mineur pendant un mois de vacances [5], du professeur de judo du mineur [6] ou encore de son professeur d’enseignement professionnel [7].
En dehors de ces deux hypothèses, un mineur âgé de plus de 15 ans peut avoir des relations sexuelles librement consenties avec un majeur, sans que ce dernier puisse être poursuivi.
En revanche, si l’auteur a usé de violence, contrainte, menace ou surprise sur le mineur de 15 à 18 ans pour obtenir une relation sexuelle, alors il pourra être poursuivi pour viol sur le fondement de l’article 222-23 du Code pénal.
Aucune circonstance aggravante tenant à la minorité de la victime de plus de 15 ans n’est alors prévue par le code pénal.
3. Conclusion.
Le droit français ne prévoit pas explicitement d’âge en-deçà duquel l’absence de consentement du mineur à une relation sexuelle est présumée. Il a cependant choisi d’incriminer toute relation sexuelle entre un majeur et un mineur de moins de 15 ans, seule l’échelle des peines variant en fonction de la qualification de l’infraction retenue.
Toutefois, il fixe à 15 ans l’âge à partir duquel un mineur peut avoir une relation sexuelle avec un majeur, dès lors que ce dernier n’a pas usé de violence, contrainte, menace ou surprise.
Dans les prochaines semaines, d’autres textes seront examinés à l’Assemblée Nationale et au Sénat, tous visant à exclure la possibilité d’un consentement à un acte sexuel pour les mineurs en deçà de 15 ans.