D’entrée de jeu, il sied de dire en liminaire qu’en droit congolais le mariage constitue un acte civil, solennel et public qui lie deux personnes adultes de sexe opposé et non engagées dans un quelconque précédent mariage enregistré auprès de l’officier de l’état civil [1]. Telle est la forme du mariage reconnue officiellement par le législateur congolais, dont les conditions de formation et dissolution, les effets ainsi que les modes de preuve sont formellement prévus dans le Code de la famille.
En outre, il est impérieux de signifier qu’en droit congolais le mariage est prouvé principalement par la production d’un acte civil ou d’un livret de ménage établi au moment de son enregistrement ou célébration dudit mariage [2]. Toutefois, il peut exceptionnellement être prouvé à travers un acte de notoriété ainsi que la possession d’état d’époux. C’est la preuve du mariage par la possession d’état d’époux qui va particulièrement nous intéresser dans la suite de notre contribution.
Le fondement légal de la possession d’état d’époux.
La notion de la possession d’état d’époux trouve son fondement en droit congolais à travers l’article 438 du Code de la famille qui dispose : "A défaut d’acte de l’état civil, le mariage est prouvé par la possession d’état d’époux. Deux personnes ont la possession d’état d’époux lorsqu’elles se considèrent et se traitent mutuellement comme époux, et qu’elles sont considérées et traitées comme tels par leur famille et la société."
La possession d’état d’époux peut être prouvée par le témoignage d’au moins deux personnes de l’entourage du couple ou par le témoignage des parents ou des membres de famille des concernés. Elle peut être également contestée à travers les mêmes moyens testimoniaux [3].
La possession d’état d’époux est-elle une preuve du mariage informel ?
Dans la société congolaise le mariage informel, désigné communément sous le vocable lingala "Yaka To Fanda", constitue une situation où deux personnes adultes de sexe opposé cohabitent et vivent de manière informelle dans une relation conjugale durable et engagée au vu et au su de tout le monde. Autrement dit, il s’agit d’une relation de fait sans formalité légale.
En effet, en droit congolais le mariage informel n’a aucune valeur juridique, car le législateur congolais a absolument fait abstraction de telle relation dans le code de la famille. Ipso facto, le mariage informel ne crée aucun lien de droit entre les deux partenaires.
Toutefois, sous d’autres cieux, le mariage informel est tant soit peu reconnu dans la législation. C’est le cas notamment de la notion du concubinage en droit français. Le législateur français définit le concubinage comme : « une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple » [4].
À cet effet, il faut noter que cette reconnaissance légale du concubinage n’est que superficielle, car le législateur français n’a point déterminé les effets patrimoniaux et extrapatrimoniaux qui découlent d’une telle union informelle. Cette situation est dûe naturellement au caractère informel du concubinage, comme le souligne même Irène Théry : "toute formalisation du concubinage aurait pour effet de renvoyer dans le non-droit les situations non formalisées" [5]. Néanmoins, la jurisprudence a tout de même développé quelques principes qui garantissent certains droits aux concubins dans certaines circonstances.
Par ailleurs, le concubinage en droit français n’est point à confondre avec le pacte civil de solidarité, car ce dernier est entendu comme : "un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexe différent ou de même sexe, pour organiser leur vie commune" [6]. Au fait, le pacte civil de solidarité est une union peu formelle dont les termes et les conditions du contrat sont déterminés par les parties elles-mêmes. Le pacte civil de solidarité est différent non seulement du mariage qui est une institution légale, mais aussi du concubinage qui est une union informelle.
Quant à la question susmentionnée, il sied de dire que la possession d’état d’époux ne constitue nullement la preuve du mariage informel, moins encore une forme de mariage informel en droit congolais, car le législateur n’a point prévu une législation.
C’est donc à tort que certains affirment que la possession d’état d’époux est un concept qui vient justifier une relation de fait ou une forme de mariage informel.
La possession d’état d’époux est-elle une preuve du mariage formel ?
À cette question, nous pouvons immédiatement répondre de manière positive, car la possession d’état d’époux joue concrètement un rôle dans la preuve du mariage formel en droit congolais. En effet, il s’agit d’une notion juridique qui sert à prouver un mariage formel pour lequel on ne peut plus constituer les preuves d’existence ou de célébration. C’est pourquoi les preuves testimoniales valent leur pesant d’or en matière de possession d’état d’époux, car les preuves ordinaires du mariage, comme l’acte civil, sont introuvables dans le cas échéant.
En somme, la possession d’état d’époux est l’une des formes de preuve du mariage formel servant à attester l’existence d’un mariage qu’on ne saurait plus retrouver la preuve de célébration.
Conclusion.
La possession d’état d’époux ne constitue ni une preuve ni une forme de mariage informel en droit congolais. Par contre, elle constitue en réalité une preuve servant à prouver l’existence d’un mariage pour lequel les preuves de célébration ont totalement disparu. Bref, la possession d’état d’époux ne joue un rôle que dans la preuve du mariage formel et non celui informel.