Prêt en devise - Focus sur le prêt Crédit Mutuel et sa jurisprudence.

Par Stéphane Ceccotti, Avocat.

788 lectures 1re Parution:

Explorer : # prêt en devise # risque de change # clause abusive # information emprunteur

Ce que vous allez lire ici :

Le prêt immobilier en francs suisses avec remboursement en euros expose l'emprunteur à des risques de change. Les juridictions françaises, en s'alignant sur la jurisprudence de l'UE, insistent sur la nécessité d'informations claires et compréhensibles à l'égard des clauses liées au risque pour protéger les emprunteurs.
Description rédigée par l'IA du Village

Nous envisageons ici les moyens de recours possibles des emprunteurs ayant contracté des prêts en devise auprès du Crédit Mutuel au regard du droit positif et de décisions homogènes récentes.

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Il sera décrit en l’espèce le prêt en devise Crédit Mutuel, qui est un prêt immobilier libellé en francs suisses, remboursable en euros à taux variable et indexé sur le Libor (London Interbank Offered Rate) 3 mois.

Un risque de change pèse encore une fois sur l’emprunteur, dans la mesure où il expose à un risque d’augmentation de deux composantes essentielles du crédit, celle du taux et du capital.

La dette ayant augmenté au cours du temps l’emprunteur doit rembourser une échéance dont le montant augmente, ou dont le capital restant dû augmente, et cela malgré de nombreuses années d’amortissement.

L’emprunteur doit faire reconnaitre l’existence du risque de change.

La Cour de justice de l’Union européenne rappelle toutefois dans sa jurisprudence univoque qu’un établissement bancaire se doit dans le cadre de ces prêts spécifiques d’informer clairement l’emprunteur (frontalier ou non) et ce de manière particulièrement compréhensible sur les risques inhérents au contrat de prêt.

Cette position claire appelle les juridictions françaises à s’aligner.

Dans un premier cas datant de 2023 : Cour de cassation, civile, Chambre civile 12 juillet 2023, 22-17.030, faute de paiement de l’intégralité du capital emprunté à l’échéance, la banque avait mis en œuvre des mesures d’exécution, levées à la suite du règlement du solde du prêt au moyen d’un nouvel emprunt souscrit auprès d’une autre banque.

La banque est en l’espèce condamnée.

Quatre principes soutiennent cette condamnation :

  • Les clauses relatives au remboursement et au risque de change qui définissent l’objet principal du contrat ne sont rédigées de manière claire et compréhensible que si elles contiennent des informations suffisantes et exactes permettant à un consommateur moyen de comprendre le fonctionnement concret du mécanisme financier et d’évaluer ainsi le risque des conséquences économiques négatives… ;
  • Ces clauses conclues entre un professionnel et un consommateur sont susceptibles de créer, au détriment du non-professionnel, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat si le professionnel ne pouvait raisonnablement s’attendre à ce que ce dernier accepte un risque disproportionné de change ;
  • Le caractère abusif d’une telle clause s’apprécie à la date de conclusion du contrat ;
  • De telles clauses sont abusives si elles créent un déséquilibre significatif en ne mettant pas mesure l’emprunteur d’envisager les conséquences prévisibles et significatives de la fluctuation des monnaies sur ses obligations.

Dans un second cas : Cour de cassation, civile 18 septembre 2024 n°22-17746 - les emprunteurs ont assigné la banque, demandant que les clauses concernant le risque de change soient déclarées abusives et réputées non écrites et ont également assigné la banque en responsabilité pour avoir manqué à son obligation de mise en garde.

La cour d’appel a jugé que les clauses n’étaient pas abusives puisque ces clauses définissent l’objet principal des contrats de prêt et qu’elles sont compréhensibles par tout lecteur normalement attentif et diligent, en ce qu’elles alertent clairement l’emprunteur sur l’existence d’un risque de change pouvant survenir pendant toute la durée du prêt.

La cour d’appel avait notamment considéré qu’avait été remis aux emprunteurs avant l’acceptation de la première offre de prêt, une attestation par laquelle ils certifiaient, notamment, « avoir pris connaissance des risques de change liés au franc suisse ».

L’arrêt est cassé par la Cour de cassation pour deux raisons principales :

  • les clauses concernant le risque de change ne permettaient pas, à elles seules, d’apprécier le caractère personnalisé des explications qui avaient pu être fournies,
  • les emprunteurs n’avaient reçu aucune simulation chiffrée et l’attestation était rédigée en termes relativement généraux.

La Cour de cassation adopte une protection renforcée des emprunteurs même dans le cas de remise d’une attestation dédiée au risque de change.

Dans un troisième cas datant de janvier 2025 - Tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse le 23 janvier 2025 RG 223617, le tribunal considère ici spécifiquement que les emprunteurs frontaliers demeurent, comme tout consommateur, exposés au risque de change face à la dépréciation de l’euro, ayant pour conséquence l’augmentation corrélative de leur dette.

Le Crédit Mutuel avait ainsi l’obligation d’informer les emprunteurs au moyen de clauses rédigées de manière transparente et intelligible, et ce peu important leur situation de frontaliers.

Cette décision est une application directe du standard de « consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé » de la CJUE, qui élargit le plus possible la notion de consommateur moyen européen.

Par conséquent, les critères retenus par les juridictions françaises se stabilisent et convergent désormais vers une harmonisation de la jurisprudence applicable à l’ensemble des emprunteurs sous l’impulsion de la Cour de justice de l’Union européenne.

Stéphane Ceccotti, Avocat au Barreau de Montpellier

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