1. Les garanties dues par le promoteur aux acquéreurs en VEFA.
Le promoteur immobilier, vendeur en l’état futur d’achèvement (VEFA) est tenu à une double garantie vis-à-vis des acquéreurs :
a) Garanties légales du constructeur non réalisateur, tenu aux mêmes obligations que les constructeurs, à savoir la responsabilité biennale de bon fonctionnement, la responsabilité décennale, la garantie des désordres intermédiaires, prévues à l’article 1792 et suivants du Code civil, à l’exclusion de la garantie de parfait achèvement, puisque le promoteur, à la différence des entreprises en charge de la réalisation des travaux, n’est jamais tenu à une obligation de faire (sauf si stipulation contractuelle en ce sens) (article 1646-1 du Code civil).
Au titre des garanties du constructeur non réalisateur, si le promoteur est tenu in solidum aux côtés des constructeurs, il doit en principe pouvoir exercer pleinement ses recours à l’encontre des constructeurs, débiteurs finaux de ces garanties, sauf circonstances particulières, relativement circonscrites en pratique :
- faute du promoteur et notamment recherche d’économie,
- prestation vendue à l’acquéreur, mais non commandée au constructeur,
- liquidation judiciaire du constructeur et absence d’assurance souscrite par le constructeur…
b) Garantie des vices et défauts de conformité apparents (article 1642-1 du Code civil), dénoncées :
- au moment de la livraison,
- puis dans le délai de l’article 1648 du Code civil, à savoir dans le délai d’un an à compter la date la plus tardive, qu’il s’agisse de la réception ou de la livraison (dans ce cas un an, plus un mois).
Il convient de relever que le promoteur, en qualité de vendeur, est le débiteur exclusif de cette garantie, les constructeurs quant à eux, n’y étant pas tenus. Le promoteur pourra tenter d’exercer son recours à l’encontre des constructeurs, sur un fondement distinct, comme il sera développé ci-après.
2. L’exercice par le promoteur des recours à l’encontre des constructeurs pour ce qui concerne la garantie des vices et défauts de conformité apparents.
Le promoteur a tout intérêt à répercuter sur les constructeurs les réclamations qui lui sont dénoncées par les acquéreurs au titre des vices et défauts de conformité apparents, sur un fondement juridique distinct, à savoir la responsabilité contractuelle de droit commun des entreprises, et ce, afin de ne pas en rester le débiteur final.
Comment le promoteur peut-il répercuter aux constructeurs les réserves dénoncées à la livraison dénoncées par les acquéreurs au titre de la garantie des vices et défauts de conformités apparents afin de voir mobiliser les garanties des constructeurs ?
Plusieurs conditions doivent être réunies pour que le promoteur puisse effectivement exercer ses recours à l’encontre des constructeurs :
a) Premier point de vigilance : s’assurer que la teneur de l’ouvrage vendu par le promoteur à l’acquéreur correspond l’ouvrage commandé par le promoteur aux constructeurs.
L’ouvrage tel qu’il est vendu par le promoteur à l’acquéreur doit exactement correspondre à ce qui est commandé par le promoteur aux constructeurs.
Autrement dit, la teneur de l’ouvrage vendu par le promoteur aux acquéreurs selon contrat de VEFA doit correspondre aux contrats de louage d’ouvrage conclus entre le promoteur et les constructeurs.
Ainsi, les modifications apportées aux plans initiaux annexés notamment à l’acte de réservation ou encore au moment de la régularisation de l’acte authentique (de type configurations de l’espace, prestations supplémentaires, choix de matériaux) doivent être reportées par avenants aux constructeurs, et doivent être retranscrites au CCTP modificatif.
À défaut de faire correspondre ouvrage vendu et ouvrage commandé, les défauts de conformité non générateurs de désordres qui seront dénoncés au promoteur ne pourront pas être répercutés aux constructeurs, qui pourront se retrancher derrière le contrat de louage d’ouvrage qui ne comprend pas les modifications, de sorte que le promoteur sera l’unique débiteur de l’indemnisation et ne pourra utilement exercer ses recours contre les constructeurs.
Ainsi, à titre d’exemple, des fenêtres classiques ont été réalisées par les constructeurs au lieu de baies vitrées vendues par le promoteur à l’acquéreur.
- Si le CCTP prévoyait des baies vitrées, le promoteur sera en mesure d’exercer son recours contre les constructeurs ;
- Si le CCTP ne prévoyait pas les baies vitrées mais des fenêtres classiques, le promoteur sera dans l’impossibilité d’exercer de recours à l’encontre des constructeurs et restera seul tenu vis-à-vis des acquéreurs.
b) Deuxième point de vigilance : articuler les phases de livraison et de réception.
Pour répercuter les réclamations aux constructeurs, le promoteur doit articuler chronologiquement les étapes cruciales et déterminantes que sont la livraison et la réception de l’ouvrage, étapes distinctes en termes d’effets et de garanties associées.
Pour rappel :
- La livraison est la prise de possession par les acquéreurs du bien mis à disposition par le promoteur vendeur. Des réserves peuvent être émises par les acquéreurs au moment de la livraison et dans le délai d’un an à compter de la date la plus tardive entre la réception ou la livraison (un an plus un mois si à compter de la livraison).
- La réception est l’acte unilatéral du maitre d’ouvrage, à savoir le promoteur, par lequel il accepte de recevoir l’ouvrage réalisé par les constructeurs. Des réserves peuvent être émises par le promoteur maître d’ouvrage au moment de la réception, ainsi que dans le délai d’un an à compter de la réception au titre de la garantie de parfait achèvement.
Il est tout à fait possible de prononcer la réception avant ou après la livraison aux acquéreurs, puisqu’aucune disposition législative n’interdit une réception qui intervient après la livraison aux acquéreurs ou au contraire une livraison aux acquéreurs qui intervient après la réception.
Toutefois, en pratique, dans l’intérêt du promoteur, il convient de procéder à la livraison aux acquéreurs avant que le promoteur ne prononce la réception vis-à-vis des constructeurs.
D’une part, les réserves à la livraison, qui ne coïncident pas nécessairement avec les réserves à la réception, pourront faire l’objet d’un report au procès-verbal de réception par le promoteur et partant seront répercutées aux constructeurs, tenus à la garantie de parfait achèvement, sous réserve de ce qui a été évoqué ci-avant (cf. premier point de vigilance sur la teneur de l’ouvrage et des modifications apportées qui doivent être portées à la connaissance des constructeurs par avenants et par CCTP modificatif).
D’autre part, les réserves dénoncées ultérieurement par les acquéreurs au promoteur, dans le délai d’un an à compter de la date la plus tardive entre la réception et la livraison (un an plus un mois s’il s’agit du délai de livraison), seront dénoncées à leur tour par le promoteur aux constructeurs, dans le délai de garantie de parfait achèvement d’un an à compter de la réception. Pour ce faire, si la réception intervient après la livraison, le promoteur disposera du temps optimal pour répercuter les réclamations aux constructeurs dans le délai d’un an après la réception.
Si la livraison intervient après la réception, les réclamations dénoncées le plus tardivement par les acquéreurs au titre de la garantie de vices et défauts de conformité dans le délai d’un an plus un mois à compter de la livraison, en application des articles 1642-1 et 1648 du Code civil ne pourront pas être répercutées par le promoteur aux constructeurs sur le fondement de la garantie de parfait achèvement, puisque ce délai d’un an à compter de la réception sera déjà expiré.