Commentaire de l'arrêt Mennesson relatif à la convention de gestation pour autrui rendu par la Cour d'appel de Paris le 18 mars 2010, par Alexis Castelli

Commentaire de l’arrêt Mennesson relatif à la convention de gestation pour autrui rendu par la Cour d’appel de Paris le 18 mars 2010, par Alexis Castelli

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Explorer : # gestation pour autrui # ordre public # filiation # intérêt supérieur de l'enfant

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La transcription d’un acte de naissance étranger en contradiction avec l’ordre public français doit-elle être annulée ? C’est sur cette question et plus amplement sur la convention de gestation pour autrui que la Cour d’appel de Paris s’est prononcée dans un arrêt en date du 18 mars 2010.

En l’espèce, suite à une convention de gestation pour autrui contractée entre Mme Floyd et les époux Mennesson, conformément à la législation en vigueur dans l’État de Californie, Mme Floyd a donné naissance à deux enfants, Valentina et Fiorella, issues des gamètes de M. Mennesson et d’une tierce personne. Ces jumelles ont ensuite été remises aux époux Mennesson.

Le 14 juillet 2000, conformément à la législation californienne en vigueur, un jugement de la cour suprême de Californie établit le couple Mennesson « père et mère des enfants à naître » issus des embryons du couple, portés par la gestatrice. De retour en France, les époux Mennesson obtiennent la transcription des actes d’État civil américain sur les registres de l’État civil de Nantes. Le procureur de la république décidée d’assigner les époux Mennesson en demandant l’annulation de la transcription devant le tribunal de grande instance de Créteil.

En 2005, le jugement du tribunal de grande instance de Créteil déclare le procureur de la république, alors demandeur, « irrecevable en sa demande » aux motifs qu’il ne «  saurait remettre en cause l’existence même des actes de naissance des enfants F.et V. établit en exécution d’une décision prononcée par la cour suprême de Californie ». Suite à cette décision, le ministère public, appelant, interjette appel.

La cour d’appel de Paris, dans un arrêt confirmatif du 25 octobre 2007, rejette la demande du ministère public, la déclarant irrecevable au regard de l’ordre public international. La cour d’appel de Paris avait notamment fondée sa décision sur l’intérêt supérieur des enfants. Non satisfait de la décision rendue par les juges de second degré, le ministère public décide de se pourvoir en cassation.

La première chambre civile de la Cour de Cassation dans un arrêt rendu le 17 décembre 2008 casse l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris. En effet, la cour régulatrice a estimé que le ministère public, alors demandeur au pourvoi, justifiait d’un intérêt à agir en nullité des transcriptions, puisque les énonciations inscrites sur les actes d’État civil ne pouvaient résulter que d’une convention de gestation pour autrui, convention formellement prohibée en droit français. La Cour de Cassation a donc renvoyé les parties devant la cour d’appel de Paris, autrement composée.

Les époux Mennesson prétendent l’action du ministère public irrecevable. Pour cela ils soutiennent que le ministère public conteste la possession d’état alors qu’il ne conteste ni l’opposabilité en France du jugement américain, ni la fois raccorder, au sens de l’article 47 du Code civil, aux actes dressés en Californie. Les époux Mennesson soutiennent que le ministère public ne peut invoquer la fraude au civil et qu’il ne peut demander l’annulation de la seule transcription après avoir sollicité l’annulation des actes de naissance. Les époux Mennesson estiment également ne pas avoir eu droit à un procès équitable. D’autre part ils considèrent que l’action du ministère public se heurte à un intérêt supérieur des enfants protégé par des normes internationales (telles que l’article 3-1 de la Convention internationale des droits de l’enfant et l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme). Ils estiment que l’intérêt supérieur de l’enfant dépasse l’intérêt d’ordre public.

Dès lors le problème juridique posé est celui de savoir si une transcription d’acte de naissance étranger sur l’état civil français peut être considérée comme valide, considérant que la naissance, en l’espèce, est issue d’une convention de gestation pour autrui.

La cour d’appel de Paris, dans son arrêt rendu le 18 mars 2010 a déclaré l’action du ministère public recevable, au motif que le ministère public avait agi pour la défense de l’ordre public, comme le permet l’article 423 du code de procédure civile. La cour déclare l’annulation de la transcription sur les registres du service central d’État civil de Nantes, des actes de naissance établis en Californie et désignant M. Dominique Mennesson et Mme Sylvie Pittaro en qualité de père et mère des enfants Valentina et Fiorella car la décision de la cour californienne est effectivement contraire à l’ordre public français qui prohibe la gestation pour autrui. Enfin, la cour d’appel a estimé que l’absence de transcription n’avait pas pour effet de priver les deux enfants de leur état civil américain et de leurs liens de filiation établi sur le sol américain, la cour consacre donc la différence entre retranscription des actes de naissance et filiation.

Ainsi convient-il de démontrer que l’action du ministère public est fondée sur la prohibition de la gestation pour autrui et cherche à sauvegarder l’ordre public (I) et que cette annulation de la transcription des actes de naissance sur l’état civil aura des effets sur la filiation (II).

I- L’action du ministère public fondée sur la prohibition de la gestation pour autrui

Le ministère public a demandé que soient déclarées nulles des transcriptions sur les registres d’État civil français des actes de naissance de Valentina et Fiorella afin de sauvegarder et de défendre l’ordre public. En effet, la gestation pour autrui y est contraire, elle est prohibée par le droit français (A) au motif qu’elle est incompatible avec la notion de respect du corps humain (B).

A – L’action du Ministère Public en matière de GPA

L’article 423 du Code de Procédure Civile dispose que le Ministère Public « peut agir pour la défense de l’ordre public à l’occasion de faits qui portent atteinte à celui-ci ».

En effet dans le cadre de l’affaire Mennesson, le ministère public a estimé que la transcription des actes de naissance américains de Valentina et Fiorella sur les registres de l’état civil français portait atteinte à l’ordre public et a demandé l’annulation de celle-ci pour plusieurs motifs.

D’abord parce qu’il considérait qu’il y avait une absence d’effet de la décision californienne dans l’ordre juridique français car selon lui la force probante des actes étrangers est déterminée par la loi française.

Ensuite parce qu’il considérait que cette même décision californienne validait des actes de naissance d’enfants issues d’une convention de gestation pour autrui et que ces naissances heurtaient l’ordre public français. En effet, l’article 16-7 qui dispose que « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle » du Code civil vise la nullité de toute convention issue d’une gestation pour autrui. La loi française prône donc l’annulation systématique des conventions de gestation pour autrui. Le ministère public a considéré que la législation étrangère était contraire à l’ordre public international et il demande qu’on en écarte l’application. Il estime que le jugement de la Cour suprême de Californie a été rendue à la suite d’une fraude à la loi française (Pourquoi fraude à la loi : parce que le MP soutient que les époux connaissaient l’interdiction française de la GPA et se sont rendus devant la Cour Californienne dans l’objectif de passer outre la loi française). C’est pourquoi il demande que les actes de naissance des enfants ne puissent pas être transcrits sur les registres d’état civil français. Le ministère public, dépassant la question de la recevabilité de son action pour aborder son bien fondé, soutient en substance que si c’est l’ordre public international qui doit être pris en compte dans le contrôle du jugement étranger, c’est au regard de l’ordre public interne que devrait être appréciée la validité de la transcription sur les registres français d’un acte d’état civil étranger.

De plus l’article 16-9 du Code civil dispose que « Les dispositions du présent chapitre sont d’ordre public », ce qui implique que ces dispositions s’appliquent à tous, et que le non-respect d’une d’entre elles peut causer un trouble à l’ordre public. Dans cette affaire, accepter la transcription demandée par les époux Menesson revenait à violer l’article 16-7 du Code civil, qui est d’ordre public, ce qui peut justifier l’intervention du procureur de la République.

La gestation pour autrui est jugée contraire à l’ordre public et est prohibée par le droit français car elle contraire à des principes tels que l’indisponibilité du corps humain.

B- Le respect du corps humain et la GPA

Les articles 16 et suivants du Code civil sont issus des lois dites bioéthiques de 1994, au nombre de deux, la loi n°94-653 et la loi n°94-654, révisée en 2004, relatives au respect du corps humain.

L’article 16 du Code civil énonce « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie ». Par l’expression « sa vie » le législateur a voulu donner une dimension individualiste dans un article qui traite de la personne au sens général. L’article 16-9 du même code dispose : « les dispositions du présent chapitre sont d’ordre public », ce qui implique qu’elles s’imposent à tous les sujets de droit.

L’article 16-1, « Chacun a droit au respect de son corps. Le corps humain est inviolable. Le corps humain, ses éléments et ses produits ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial », pose le principe de l’intangibilité du corps humain. Ce principe d’intangibilité comprend l’indisponibilité et l’inviolabilité du corps humain.

En ce qui concerne l’indisponibilité, le corps humain ne peut faire l’objet de convention comme l’énonce l’article 1128 du Code civil, il y a donc une non-patrimonialité, en droit français, du corps humain. Il est considéré comme une chose non évaluable en argent (articles 16-1 et 16-5 du Code civil). Il n’y a pas de vente possible mais le corps humain peut faire l’objet de don, comme le prévoit l’article 16-6 du Code civil.

En matière d’inviolabilité, c’est l’article 16-1 alinéa 2 du code qui consacre le principe de l’inviolabilité du corps humain. L’article 16-3 énonce la notion de consentement préalable, et l’article 16-8 pose le principe de l’anonymat, du don anonyme, de sorte qu’il n’y a pas d’identification possible entre donneur et receveur. Certaines exceptions sont admises comme par exemple l’urgence thérapeutique ou l’impossibilité pour le patient d’exprimer son consentement (article 16-3) ou la nécessité thérapeutique ou de santé publique pour lever l’anonymat sur le donneur ou le receveur (article 16-8).

Ces principes d’intangibilité du corps humain sont doublement garantis, sur le plan judiciaire par le juge, qui peut intervenir comme le prévoit l’article 16-2 du Code civil, et sur le plan légal avec l’article 16-9 qui déclare que ces dispositions sont d’ordre public.

Historiquement la gestation pour autrui est une des plus anciennes méthodes de lutte contre l’infertilité (la première mention de la GPA remonte à l’ancien testament, Hagar acceptant de porter un enfant d’Abraham et de le donner à l’épouse de ce dernier). Bien qu’autorisée ou tolérée par de nombreux pays (tels que le Royaume-Uni, certains états des Etats-Unis avec les contrats de surrogates mothers…) en France la Gestation pour autrui est fortement prohibée car elle considérée comme portant atteinte au respect du corps humain. Elle a d’abord été interdite par la jurisprudence. L’arrêt de principe en la matière a été rendu par l’assemblée plénière de la Cour de cassation le 31 mai 1991, affaire « Alma Mater ». La Cour régulatrice a condamné avec force l’ensemble du processus de la procréation et de la gestation pour autrui en cassant un arrêt de cour d’appel de Paris du 15 juin 1990. Elle a déclaré, dans un attendu de principe, que le contrat de mère porteuse, portait atteinte aux principes de l’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes. Cette position jurisprudentielle a ensuite fait l’objet d’une consécration législative. En effet le législateur a confirmé cette jurisprudence en créant par la loi n°94-653 du 29 juillet 1994, l’article 16-7 du Code civil.

Si, nous l’avons vu, l’action du ministère public se fonde sur la prohibition, en droit français, de la gestation pour autrui et des conventions de mères porteuses. Il demande l’annulation de la transcription des actes de naissance américains sur les registres d’état civil français. La cour d’appel de Paris décide par cet arrêt du 18 mars 2010 d’annuler cette transcription car la décision de la Cour californienne est effectivement contraire à l’ordre public français qui prohibe la Gestation Pour Autrui. Cette décision va avoir des conséquences sur la filiation de ces enfants, qui ne seront pas des conséquences positives et pour les époux Mennesson et pour leurs enfants.

II – Les effets de l’annulation de la transcription sur la filiation

L’article 16-7 du Code civil sanctionne la gestation pour autrui, et cette sanction tient dans la nullité même de la convention de mère porteuse. Sa conséquence principale est l’interdiction de l’établissement du lien de filiation. La cour de Paris a considéré que cette absence de transcription n’avait cependant pas pour effet de priver les deux enfants de leur état civil américain et de leur lien filiation établit en Californie. Il est donc intéressant de s’interroger sur l’absence de reconnaissance sur le sol français de filiation vis-à-vis des parents (A) et de se demander si l’intérêt supérieur des enfants, comme l’invoque les Mennesson a été respecté (B)

A- La filiation vis-à-vis des parents

La question qui se pose est celle de savoir si la mère, au sens de l’article 311-14 du Code civil est la mère gestatrice, c’est-à-dire celle qui a accouché de l’enfant, ou la mère génitrice, c’est-à-dire celles dont les gamètes ont permis la conception.

En droit français on considère que la mère est la femme qui a accouché de l’enfant. Cette situation pourrait évoluer, car elle est en contradiction avec la disposition, très contestée, de la loi du 20 novembre 2007 admettant, de façon marginale il est vrai, le recours aux tests ADN pour établir la filiation maternelle de certains candidats à l’immigration. En l’état, la loi applicable serait la loi de la mère porteuse, c’est-à-dire la loi californienne, reconnaissant donc Monsieur Dominique Mennesson et Madame Sylvie Pittaro comme père et mère des enfants selon la législation en vigueur dans l’état de Californie (Family Act section 7630 and 7650).

Pour écarter cette conclusion, il n’y a que l’exception à l’ordre public.
En effet en droit international privé, si le juge considère qu’une législation étrangère est contraire à l’ordre public international français il en écarte l’application. La loi de 1972 sur la filiation et l’ordonnance du 4 juillet 2005 sur le même sujet, ont prévu des règles de droit international privé applicables à l’enfant. Il existe trois articles dans le Code civil sur ces questions. L’article 311-14 précise : « la filiation est régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de l’enfant ; si la mère n’est pas connu par la loi personnelle de l’enfant. ».

Dans une affaire où la procréation pour autrui a été effectuée dans l’état de Californie, lequel reconnait la procréation pour autrui, via les contrats de surrogates mothers, c’est normalement d’après ce texte la loi personnelle de la mère porteuse donc la loi de Californie qui s’applique à l’enfant mais les juges refusent de faire jouer la loi personnelle lorsque cette loi heurte l’ordre public international français. Dès lors une législation qui autorise la gestation pour autrui sera considérée comme contraire à l’ordre public français et ne sera pas applicable en France.

L’article 311-15 du Code civil conserve une règle de droit international privé applicable à la possession d’état. Si, nous dit ce texte, « l’enfant et ses père et mère, ou l’un d’eux, ont en France leur résidence habituelle, commune ou séparée, la possession d’état produit toutes les conséquences qui en découlent, selon la loi française, lors même que les autres éléments de la filiation auraient pu dépendre d’une loi étrangère ».

Madame Mennesson aurait peut être pu invoquer cet article 311-5 puisqu’elle a élevé les deux enfants depuis leur naissance. Néanmoins on peut craindre encore une fois qu’on leur aurait opposé l’ordre public international français.
Enfin l’article 311-17 prévoit « La reconnaissance volontaire de paternité ou de maternité est valable si elle a été faite en conformité, soit de la loi personnelle de son auteur, soit de la loi personnelle de l’enfant. ». Là encore dans cette affaire il aurait été possible à la mère de reconnaître les enfants en droit français sans exequatur (validation par une juridiction française d’une décision rendue par une juridiction étrangère) mais les juges auraient-ils appliqué l’article 311-17 ?

Dès lors, les époux Mennesson étant reconnus comme les père et mère de Valentina et Fiorella sur le sol californien mais pas sur le sol français, ils n’ont aucun droit de filiation sur les deux enfants. Cela peut contraindre les époux à d’interminables procédures pour inscrire leurs filles où que ce soit, et surtout, les place devant un problème insoluble en cas de divorce ou de décès. La nullité de la convention de gestation pour autrui valide l’absence d’état civil en France. C’est ainsi que les « enfants MENESSON » se retrouvent juridiquement avec une filiation vis-à-vis de leurs deux parents aux U.S.A et sans filiation sur le territoire français. Les juges ont écarté toute considération du droit international et européen de l’enfant en considérant que l’absence de transcription n’a pas pour effet de priver les deux enfants de leur état civil américain et de remettre en cause le lien de filiation qui leur est reconnu à l’égard des époux MENNESSON par le droit californien. Peut-on donc considérer que l’intérêt supérieur de l’enfant, qui est protégé par des normes internationales supérieures, vacille face à l’intérêt de l’ordre public ?

B- L’intérêt supérieur de l’enfant

Afin de définir cette notion qu’est l’intérêt supérieur de l’enfant, considérons ce qui importe à l’enfant, ce qui est nécessaire pour lui assurer une vie digne et heureuse. Autrement dit, cela implique que pour toute décision qui concerne un enfant, c’est l’impact que va avoir cette décision sur sa vie qui doit être considéré et donc son intérêt qui doit prévaloir.

Cette notion est un principe général qui doit ou devrait s‘appliquer pour de nombreuses situations, par exemple en cas de séparation des parents, lorsqu’on parle d’adoption ou encore d’éducation.

Ce principe figure parmi les premiers articles de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant des Nations Unies, aussi appelée Convention de New York, ratifiée par la France et entrée en vigueur le 6 septembre 1990.

L’article 3 alinéa 1 de ce texte précise que « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ». Il consacre le concept d’intérêt supérieur de l’enfant.

Le conseil d’Etat a reconnu l’applicabilité directe de cet article (arrêt CINAR, 22 septembre 1997) et la Cour de cassation, qui jusqu’en 2005, rejetait cette applicabilité, a effectuée un revirement de jurisprudence (arrêts du 18 mai et 14 juin 2005), et l’a admise.

On peut également citer l’article 8 de la CEDH qui énonce « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. »

Cet arrêt de la Cour d’appel, qui aurait pu faire prévaloir les dispositions de l’article 3-1 de la CIDE et 8 de le CEDH, qui ont une valeur supérieure à l’article 16-7 du code civil, peut paraître un non sens absolu au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Si la Cour estime que l’absence de transcription n’as pas pour effet de priver les deux enfants de leur état civil américain et de remettre en cause le lien de filiation qui leur est reconnu à l’égard des époux Mennesson par le droit californien, peut-on considérer que par sa décision elle a protégé l’intérêt des enfants Valentina et Fiorella. ?

Il est en effet assez difficile de comprendre en quoi l’annulation de la transcription des actes d’état civil américain assure l’intérêt supérieur des enfants, alors que cela les prive de leur filiation française sur le sol français. Force est de constater que la vie de ces deux enfants risque d’être jalonnée de tracasseries administratives. Peut-être pas dans l’immédiat, mais plus tard : par exemple, lorsqu’elles devront faire renouveler leur passeport et leur carte d’identité, quand elles voudront se marier, au moment où leurs parents décéderont et que se posera la question de l’héritage. Si elles veulent devenir fonctionnaires ou militaires, se présenter à une élection... Chaque fois qu’elles devront justifier de leur nationalité française, ce sera compliqué, faute de transcription. Juridiquement, pas de problème : leur filiation est établie vis-à-vis de parents français. Administrativement, c’est une autre affaire.

D’un autre côté les parents savaient parfaitement que la GPA est illégale en France. On ne peut donc "naïvement" revenir vers le législateur en se posant en victime. La détresse des parents est compréhensible, tout comme la défense des intérêts de l’enfant mais la loi est la loi. Peut-on acheter de la drogue à l’étranger et venir la revendre en France ? La réponse est non, le recours a une mère porteuse est interdit en France donc un enfant naît de cette procédure ne peux être reconnu, ou alors il faut changer la loi. A l’aube de l’examen des lois bioéthiques il y a une réelle nécessité de donner une réponse juridique aux situations d’enfants nés à l’étranger par le recours d’une mère porteuse et si il y a une frilosité du juge vis-à-vis de la GPA (cet arrêt en est encore la preuve) le législateur ne devrait pas tarder à répondre à cette question douloureuse qu’est la légalisation de la GPA. Il est d’ailleurs à noter que le 27 janvier 2010, deux propositions de loi identiques ont été déposées par des sénateurs, elles visent à légaliser la GPA et à en faire un instrument supplémentaire de l’assistance médicale à la procréation, en proposant d’encadrer cette pratique avec une limitation de conditions. Le Conseil d’Etat a lui, dans son étude sur la révision des lois de bioéthique adoptée le 9 avril 2010, demandé le maintien de l’interdiction de la GPA mais avait également proposé une piste afin de tarir les litiges nés au regard de l’établissement du lien de filiation en proposant de reconnaître la filiation avec le père et de déléguer l’autorité parentale à la « mère commanditaire ». Une mesure qui serait une réponse partielle à la satisfaction de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Alexis Castelli

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