Quelques principes établis par la jurisprudence en matière d’indemnisation de contrefaçon ont été rappelés dans une récente affaire.
Une société, titulaire de deux brevets relatifs à une centrale d’alarme, ayant appris que des magasins offraient à la vente des systèmes d’alarme estimés contrefaisants, met en connaissance de cause le vendeur de ces produits en lui notifiant par lettre, copies des brevets (conformément à l’article L.615-3 al. 3 du Code de la propriété intellectuelle). Il procède quelques mois plus tard à des saisies-contrefaçon chez ce revendeur ainsi que chez le fabricant de ces mêmes produits.
Le titulaire et son licencié distributeur exclusif assignent devant le tribunal de grande instance les sociétés prétendues contrefactrices (le fabriquant et le revendeur). Le jugement retient la contrefaçon pour l’un des brevets. L’affaire se poursuit devant la cour d’appel et la Cour de cassation. Cette dernière confirme la décision d’appel sur la contrefaçon retenue, et la recevabilité de la demande de réparation du préjudice à l’encontre des titulaire et licencié.
1er principe : Afin de réparer le préjudice de la contrefaçon, il convient d’abord « de distinguer selon que le brevet contrefait est exploité ou non ». En l’espèce, le licencié n’exploite pas le brevet, et par conséquent seul le breveté peut obtenir une indemnisation.
2e principe : Il convient ensuite « d’évaluer la masse contrefaisante ». La masse retenue est constituée de l’ensemble des produits intégrant le dispositif contrefaisant.
3e principe : Il est également constant que l’indemnisation du préjudice s’analyse, lorsque le brevet n’est pas exploité, en une redevance indemnitaire assise sur le chiffre d’affaire contrefaisant.
Ainsi sont calculés le nombre de produits contrefaisants vendus, le chiffre d’affaire réalisé sur cette masse contrefaisante et le taux de redevance indemnitaire.
Le taux de redevance indemnitaire est apprécié par rapport, d’une part au taux contractuel moyen établi dans le domaine technique concerné, en l’espèce de l’ordre de 5% pour le secteur de l’électronique et les biens grand public, et d’autre part, au taux de marge nette sur la vente des produits, usuellement considéré de 25%.
Par ailleurs, dans cette affaire, le juge considère que le breveté disposant déjà de distributeurs n’aurait accordé au fabricant contrefacteur et concurrent direct « qu’une licence à un taux plus élevé que celui habituellement pratiqué dans le secteur ». Le taux global de redevance indemnitaire est donc rehaussé à 10%.
Muriel AUPETIT
Mandataire OEB
Cabinet WAGRET
TGI Paris, 3e ch., 3e section, 16 sept. 2009