Dans le contexte économique actuel, une question majeure se pose, quel droit du travail faut-il pour le travail du XXI ème siècle ? Vaste débat qui occupe l’actualité sociale.
Le droit du travail français est-il adapté au travail du XXI ème siècle ?
Au vue des débats à ce sujet, il semble que le droit du travail français n’est plus adapté au monde du travail. On le dit trop complexe, ce qui engendre au final un sentiment d’insécurité juridique pour l’ensemble des acteurs du monde du travail. Pour d’autres, cette complexité peut représenter un frein à la compétitivité, voir à ce sujet l’article « Le droit du travail français est-il un frein à la compétitivité des entreprises ? » qui revient sur un colloque organisé par le réseau d’avocats Gésica et l’école de commerce IESEG.
Se pose aussi la question du contrat à durée indéterminée (CDI), doit-il rester la norme ?
Les entreprises ont besoin de flexibilité pour pouvoir se développer et créer des emplois. De leur côté les salariés ont besoin de sécurité dans leur parcours professionnel, ces deux principes ne changent pas. Or, les façons de travailler changent et avec elles le contrat de travail qui lie l’employeur et le salarié.
Actuellement, le contrat à durée indéterminée (CDI) est la référence en matière de contrat. Mais comme le montre la dernière étude de l’INSEE sur « l’emploi et les salaires » édition 2014, il y a une augmentation du recourt aux formes particulières d’emploi (FPE) pour les nouveaux contrats de travail (voir graphique de l’étude de l’INSEE ci-dessous).
Cette augmentation du recours au FPE s’explique par un usage différent des CDD et des contrats d’interim par les employeurs d’une part mais aussi parfois par les salariés. La rotation de la main-d’oeuvre est de plus en plus fréquente, en 30 ans, elle a presque quintuplé. Aujourd’hui, plus de neuf embauches sur dix se font sous la forme de CDD ou de contrats d’intérim.
Le Figaro de son côté, cite dans un article de septembre 2014 que la part des embauches en CDI est tombée à 5% en 2011. Ce constat est illustré par le graphique de l’INSEE présenté plus haut.
La somme des articles traitant du droit du travail sur le blog du VJ (rubrique droit social) montre l’ampleur des incertitudes et conflits potentiels liés à ce sujet.
Le travail de demain : rénovation ou révolution ?
Dans son ouvrage Me Haïba Ouaissi [1] « Le travail de demain : rénovation ou révolution ? » [2] nous dit d’oser !
« Oser porter sur notre droit du travail un regard sans concession, dépouillé à la fois d’idéologie et de nostalgie d’un passé idéalisé ».
Comme par exemple dire que le droit du travail français de nature très règlementaire, n’assure ni une bonne protection des travailleurs ni une bonne efficacité économique. Et oser lui préfèrer un droit plus conventionnel.
Oser dire que le CDI qui est la norme dans un monde du travail stable, ne peut plus l’être en période de changement. "Demain, le parcours professionnel d’un salarié sera de plus en plus morcelé et ce n’est pas la détention d’un CDI qui lui assurera la stabilité de l’emploi".« Oser redéfinir les relations individuelles et collectives de travail ».
Face à l’évolution du travail, le but pour le salarié ne serait plus d’obtenir un emploi durable, mais une employabilité durable avec pour sa sécurité des droits portables (rattachés à sa qualité de salarié et non plus liés à son emploi) tout au long de sa vie professionnelle.
Cette employabilité durable suppose une formation constante du travailleur. Celle-ci est rendue possible par le Compte Personnel de Formation (CPF).
« L’employabilité du salarié doit devenir la première responsabilité sociale de l’entreprise de demain ». Former les employés au plus haut niveau de compétences est un atout et un élément majeur du management moderne.« Oser une démocratie sociale qui dépasse la lecture anachronique d’un antagonisme supposé entre intérêts de l’employeur et du salarié » et faire du dialogue social la source incontournable du droit du travail.
En passant par le dialogue social on permet à chacune des partie de s’investir, de trouver les fonctionnements les mieux adaptés à leur secteur d’activité en constante évolution tout en optimisant la fonction protectrice du droit du travail. Le salarié devient acteur dans son entreprise.
Le législateur lui-même encourage le dialogue social et donc la conclusion de conventions collectives car cela permet une bonne adaptation des normes, tout en évitant la prolifération des textes réglementaires.
Le « dialogue social sera moins appelé à créer de nouveaux droits qu’à rénover et moderniser le droit existant (...) »
Si la modernisation du droit du travail passe par le dialogue social, cela sous-entend notamment moins de conflits sociaux. Quel sera alors le rôle de l’avocat, des conseils des prudhommes ? Quel nouveau type de contrat devront-ils défendre si le CDI n’est plus la norme ?
Quelle place peuvent prendre les juristes dans ce dialogue social ?
Si l’avenir du salarié n’est plus l’obtention d’un emploi durable, mais son employabilité durable, comment s’organisera sa formation ? Quel sera le rôle des employeurs et des professionnels du droit dans la prévention des risques, nouvel élément structurant de la politique managériale ?
Le débat n’est pas terminé.