Affaire Cahuzac, le retour.

Par Julien Elbaz.

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Explorer : # fraude fiscale # procès en appel # démission politique # redressement fiscal

L’ancien ministre du Budget est de nouveau jugé pour fraude fiscale, blanchiment et déclaration incomplète ou mensongère de patrimoine. Il maintient la thèse du financement politique.

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Le procès en appel de l’ancien ministre du Budget s’est ouvert lundi 12 février. En 2016, il avait été condamné en première instance à trois ans de prison ferme pour avoir dissimulé de l’argent sur un compte en Suisse puis à Singapour. Il s’agissait d’« une faute pénale d’une exceptionnelle gravité, destructrice du lien social et de la confiance des citoyens dans les institutions de l’État », selon le jugement du tribunal correctionnel de Paris.

Aujourd’hui, l’ancien ministre le reconnaît. « Je me suis enfoncé dans un déni qui a culminé à des sommets inimaginables fin 2012. Je n’étais pas honnête un jour, malhonnête un autre jour, c’est plus insidieux. Tout le monde me demande comment cela a été possible, je ne suis pas sûr d’avoir la réponse. Je ne voulais pas y penser, cela ne me plaisait pas. Mais j’ai fraudé », explique-t-il au président du tribunal, Dominique Pauthe.

Le 16 mai 2012, Jérôme Cahuzac est nommé ministre délégué au Budget par Jean-Marc Ayrault. Sa mission : demander aux exilés fiscaux de « contribuer au redressement du pays ». Mais voilà qu’en décembre 2012, sept mois après sa nomination, une enquête de Mediapart révèle que le ministre avait longtemps détenu un compte bancaire non déclaré à l’Union des banques suisses (UBS) de Genève. De l’argent obtenu grâce à une clinique de chirurgie esthétique créée avec son épouse en 1993. La somme a ensuite été transférée dans une banque singapourienne.

Fraude « obstinée, sophistiquée et familiale »

Dans un premier temps, Jérôme Cahuzac nie tout. « Je démens catégoriquement les allégations contenues sur le site Mediapart. Je n’ai pas, je n’ai jamais eu de compte à l’étranger, ni maintenant ni avant », déclare-t-il, pugnace, devant l’Assemblée. Il sera cependant obligé de démissionner en mars 2013 et d’avouer un peu plus tard une « faute inqualifiable ».

Le patrimoine global dissimulé par le couple Cahuzac est estimé à 3,5 millions d’euros. Quelque 600 000 euros ont été cachés par l’ancien ministre à Genève puis au Singapour, 2,7 millions ayant été dissimulés par sa femme sur l’île de Man.

C’est une fraude « obstinée, sophistiquée et familiale », selon l’enquête. Cela explique la lourde condamnation pénale subie par le couple : deux ans de prison ferme pour la femme, trois ans pour Jérôme Cahuzac. Le couple a subi un redressement fiscal de plus de 2 millions d’euros et les intermédiaires ont été également poursuivis. La banque Reyl & Cie a notamment écopé d’une amende d’environ 2 millions d’euros.

Victime des circonstances

Qu’attend aujourd’hui Jérôme Cahuzac, seul protagoniste du dossier à avoir fait appel ? « Je reconnais les faits, mais j’ai un sentiment de peur, peur de la prison, je pense aux miens, à mes enfants et à ma famille », affirme-t-il à Dominique Pauthe, qui veut connaître les raisons l’ayant poussé à faire appel de la première condamnation.

Pour ce second procès, l’ancien ministre s’est choisi un nouveau défenseur, le très médiatique Eric Dupond-Moretti. Mais sa ligne de défense n’a pas changé. Il maintient la thèse d’un « financement politique » du mouvement de Michel Rocard pour justifier l’ouverture d’un compte en Suisse en 1992. Cet argent devait « servir à financer » la campagne des législatives de 1993 et préparer la présidentielle de 1995.

Jérôme Cahuzac dit avoir démarché des laboratoires « officiellement » tout en demandant des « financements parallèles ». Ces fonds seront versés sur un premier compte UBS en 1992 par un ami de l’ancien ministre. En 1993, ce dernier ouvrira en son nom propre un nouveau compte, qui sera rapidement hébergé par la banque genevoise Reyl. En 2009, l’ensemble des avoirs seront transférés vers Singapour.

Pour éviter la prison, Jérôme Cahuzac se présente comme une victime des circonstances qui n’a pas eu le choix. « Toute ma vie est une suite d’accident et de hasard » explique-t-il devant le tribunal. Et d’ajouter : accepter le poste de ministre de Budget a été « une faute majeure ».

Julien Elbaz

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