Un cabinet d'avocats en mode "start-up", pourquoi pas ?

Un cabinet d’avocats en mode "start-up", pourquoi pas ?

Rédaction du village

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Explorer : # innovation juridique # cabinet d'avocats # digitalisation # entrepreneuriat

Un cabinet, c’est une entreprise. Un peu spécifique, mais une entreprise avant tout. Alors qu’est-ce qui interdit à un cabinet de fonctionner comme une startup, justement à l’heure de la concurrence des "startup du droit" ? Comment un avocat peut-il lui aussi user de la dynamique entrepreuneriale moderne ?

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Mais au fait, qu’est-ce qu’une startup ? Définition courte : une entreprise adoptant une nouvelle organisation [1], à croissance potentiellement rapide [2], qui a pour but de trouver un marché nouveau ou de bouleverser un marché existant par son offre, et privilégiant la rapidité et la souplesse pour prendre de vitesse d’autres acteurs, n’hésitant pas à privilégier les capitaux propres pour investir (actionnaires souvent), de préférence au financement lié à son chiffre d’affaires ou à des emprunts (rarement accordés du fait des risques importants).

Transposé aux avocats, on voit que le seul point qui bloque est le recours aux capitaux extérieurs, encore en pleine discussion en France (mais déjà possible en Angleterre par exemple). Pour le reste... tout est possible !

... La volonté de réussir coûte que coûte, et l’on sait la profession d’avocat constituée de passionnés !

Parmi les fondements d’une vraie startup, on trouve assurément la volonté de réussir coûte que coûte, et l’on sait la profession d’avocat constituée de passionnés... La seule résistance à cette volonté de fer sera le nécessaire respect de la déontologie, à la fois atout et frein, en tous cas garde-fou... Au fond, la petite flamme d’un "startuper" est présente chez de nombreux avocats, car ce n’est que rarement un métier exercé par défaut.

Il faudra aussi chercher l’innovation, veiller sur ce qui se fait ailleurs, s’inspirer d’autres marchés (par exemple d’autres secteurs du conseil ou du secteur médical, dans plusieurs pays) pour tenter d’avoir ce "temps d’avance" qui met en lumière certaines startups. Ne rien s’interdire a priori.

Il faut un système performant d’échange, en toutes situations et tous lieux.

Cela passera notamment par un mode de travail connecté, au monde, aux nouveautés, aux réseaux, car on n’imagine pas un cabinet "nouvelle génération" qui n’utiliserait pas avec ses clients et collaborateurs un système performant d’échange, en toutes situations et tous lieux. Un "cabinet digital" donc [3], qui met au centre de ses journées le client, les services en ligne, la réputation publique des avocats, la communication quasi-permanente, le partage...

Faut-il être un jeune avocat pour agir ainsi ? Evidemment on est davantage prêt à risquer lorsque l’on a peu à perdre, mais la profession d’avocat est jeune, féminisée, renouvelée [4], dynamique, et consciente aujourd’hui dans sa majorité qu’il faut agir, que les temps ont changé. Elle est surtout un peu inquiète et désorientée, mais la culture "profession libérale" de ces professionnels en fait des entrepreneurs dès les bancs de l’école des avocats !

Il faut aussi savoir travailler en équipe, s’entourer de compétences complémentaires, et cette nouvelle organisation du travail, plus coopérative qu’avant et avec une hiérarchie complètement remise à plat, ne va pas de soi. C’est un apprentissage, une formation, qui n’est pas forcément plus intuitive pour les jeunes que pour les anciens, car les guides et méthodes du quotidien sont moins présents. Il faut apprendre à composer, lâcher prise, puis motiver, échanger, s’engager sans écraser, s’entourer de compétences diverses...
Parmi les compétences complémentaires dont l’avocat startuper devra s’entourer, celle des "legal techs" [5], des "marketeurs" [6], pourquoi pas des "community managers" [7]. Non, l’avocat n’est pas un spécialiste en tout... C’est cette prise de conscience qui est fondamentale, s’ensuit la recherche des talents complémentaires qui l’entoureront.

Il faudra souvent externaliser une partie des compétences ou partager des "temps d’experts".

Où trouver les ressources ? Il faudra souvent externaliser une partie des compétences ou partager des "temps d’experts" : un community manager ou un responsable marketing à temps partiel est souvent suffisant, donc partager à plusieurs un salaire d’expert est une vraie solution, de même que le recours à des jeunes en alternance d’un niveau bac+2 au moins).

L’avocat startuper doit aussi être agile, c’est-à-dire mobile et souple : le modèle de cabinet qu’il va créer va évoluer sans cesse, au fur et à mesure des essais, de la concurrence, des marchés qui évoluent, des idées de l’équipe qui va progressivement se constituer.
Et pour conserver cette souplesse, il faudra rester ouvert et... conserver une structure de cabinet qui permet les changements. "Exit" les frais fixes sur 5 ans pour de somptueux bureaux, les investissements importants financés sur plusieurs années, il faudra privilégier la capacité d’évolution et d’action (notamment financière) - quitte à changer de bureaux en quelques semaines et faire évoluer ses logiciels à tout moment (en mode "online" évidemment, facturés mensuellement et géré par un prestataire externe). Cette capacité sera évidemment facilitée par la digitalisation évoquée plus haut.

L’avocat startuper remettra régulièrement en question tout son modèle, en commençant par la facturation à l’heure, qui n’est plus tenable dans de nombreux cas. Au-delà des facturations au forfait, il songera, par exemple, à adapter sa facturation à chaque projet, à chaque client. Souple donc, et d’autant plus facilement qu’il aura une structure légère.
Il aura, en permanence, sur son ordinateur portable un business plan, des tableaux de bord, un outil CRM (gestion des données clients et des relations).

Commencez votre nouvelle vie d’avocat par là : trouvez des sources d’inspiration... [8]

Interview de Jérôme Giusti, cabinet 11.100.34 Avocats Associés qui se définit comme une "start up lawyer."
L’esprit start up pour vous, qu’est-ce que c’est ?

"Dans notre cabinet nous sommes 15 avocats, sans aucune fonction support, chaque avocat est autonome.
Nous nous voyons comme des entrepreneurs, accompagnant des startups et startup nous-mêmes. Nous essayons de vivre une nouvelle façon d’être avocat, sur un marché où les avocats ne sont pas vraiment positionnés (les startups). Il n’y avait pas d’offre mais une grande demande, nous sommes donc bien une startup, car on a construit sur un marché naissant.

Notre clientèle nous pousse à nous réinterroger en permanence sur notre posture, notre organisation, pour proposer une offre qui s’adapte à leurs besoins. Cela rebondit sur notre propre organisation et nous interroge sur la façon de nous développer, d’externaliser ou pas, de recruter...

Au quotidien, nous maintenons une relation importante avec nos clients, nous n’automatisons pas tout. Mais nous voyons moins nos clients de visu, du fait de l’effet de masse et de la demande des startup elles-mêmes, moins demandeurs de rendez-vous. Nous communiquons sur le web, dans toute la France.
Comment garder la confiance d’une personne sans la voir ? C’est une vraie question que nous nous posons. Nous construisons la confiance autrement et ça nous pousse à réfléchir au sujet. "

Rédaction du village

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Notes de l'article:

[1Ce peut être une nouvelle entreprise, ou une société déjà existante mais modifiant profondément son modèle.

[2C’est évidemment un peu simpliste car ce n’est pas en se déclarant "startup" que l’on trouve la croissance, ni du nombre de clients ni du chiffre d’affaires, mais tous l’espèrent.

[4+41 % d’avocats en 10 ans - Source CNB.

[5"Legal techs" : Des juristes de formation développant les technologies du numérique, issus par exemple du DIU Droit et Informatique des Universités Paris I et Paris Sud.

[6Les avocats ne sont pas formés au marketing, dont ils ont souvent une connaissance intuitive mais partielle.

[7Le community manager est chargé d’animer des communautés de clients ou de prospects, de collaborateurs, par la mise en relation et la publication d’informations.

[8On vous aide un peu, voyez notamment et .

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Discussions en cours :

  • par Maxime Polin , Le 20 octobre 2015 à 17:46

    Merci pour cet article, très intéressant.
    Je m’étais déjà posé la question, mais il n’est pas évident de se lancer. On verra dans le futur.

  • par Stéphane Lefer , Le 2 octobre 2015 à 09:28

    Bel article intéressant. Etre une start-up et agir comme un startuper est d’un grand rafraichissement au quotidien. Les rencontres avec les autres start-ups, surtout au final quand elles ne sont pas dans votre secteur, est une grande source d’enrichissement. A Paris, il est possible d’obtenir un label "My Start-up in Paris". Bravo.
    S Lefer - Oxygen+ ... une autre start-up

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