Le défi de l'audio pour les juristes...

Le défi de l’audio pour les juristes...

Par Deborah Blaxell, consultante juridique, en association avec Martin Bonney, directeur international des services de conseil d’Epiq Systems.

Le nombre de réglementations applicables aux entreprises continue de croître alors que le volume de données traitées par ces mêmes entreprises ne cesse d’augmenter. Les données se présentent sous différentes formes, et leur recherche et leur examen afin d’identifier les preuves pertinentes dans le cadre d’une enquête constituent un défi considérable pour les entreprises. Les preuves audio, en particulier, peuvent s’avérer déterminantes dans un procès...

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Le nombre de réglementations applicables aux entreprises continue de croître alors que le volume de données traitées par ces mêmes entreprises ne cesse d’augmenter : chaque année, une société moyenne du classement Fortune 500 produit plusieurs petabytes de données électroniques. Chacun de ses employés envoie et reçoit une centaine d’e-mails par jour , et chaque donnée transite par le poste informatique de douzaines, voire de centaines de personnes. Qu’elles soient stockées sur des disques durs, dans des bases de données, sur des clés USB, des CD, d’autres supports amovibles ou encore sur des bandes de sauvegarde, ces données sont archivées, dupliquées et se multiplient de manière exponentielle. D’après une enquête réalisée en 2012 , 2,8 zettabytes de données ont été générés cette année-là. Et, selon les projections, ce volume devrait atteindre 40 zettabytes en 2020, soit 50 fois plus que depuis le début 2010.

Les données se présentent sous différentes formes, et leur recherche et leur examen afin d’identifier les preuves pertinentes dans le cadre d’une enquête constituent un défi considérable pour les entreprises. Les preuves audio, en particulier, peuvent s’avérer déterminantes dans un procès. En effet, si les entreprises ne traitent pas ces preuves de manière effective, elles s’exposent à la critique du juge, à une mauvaise publicité et à de très lourdes amendes de la part des autorités de contrôle.

Par exemple, en mai 2012, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a sanctionné deux banques d’une amende de 500 000 € chacune pour ne pas avoir suivi la procédure adéquate lors d’un sondage effectué auprès des investisseurs préalablement à une émission d’instruments financiers sur le marché primaire. En effet, la réglementation impose que les investisseurs soient informés dès le départ du fait qu’en raison de leur participation au sondage ils peuvent devenir destinataires d’informations privilégiées, ce qui a le potentiel de compromettre leur obligation fiduciaire. La réglementation inclut également des procédures de conservation des documents .

De nombreuses autorités de contrôle reconnaissent la force de conviction des enregistrements audio. En France, l’AMF oblige les prestataires de services d’investissement à enregistrer les conversations téléphoniques des traders et autres intéressés de façon à permettre le contrôle des opérations. Ces enregistrements doivent être conservés durant six mois au minimum et cinq ans au maximum . Des règles similaires ont été introduites ou sont envisagées par des autorités de contrôle du monde entier.

Bien que les départements informatiques des entreprises réglementées aient adopté des mesures techniques afin de se conformer à ces obligations, leurs systèmes d’examen ont été conçus pour fournir uniquement un échantillon limité des appels d’une personne déterminée sur une courte période, et non une collecte complète et défendable sur une longue période, comme le requièrent habituellement les contentieux ou les enquêtes importantes des autorités de contrôle.

Epiq Systems a commandé une enquête [1] auprès de dirigeants de sociétés de premier rang dans quatre pays européens (le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Suisse et les Pays-Bas) afin d’identifier les grandes tendances existantes au sein du monde de l’entreprise dans le domaine de la divulgation électronique (eDisclosure) et de l’examen des documents.

Les résultats de cette enquête montrent que les défis relativement récents suscités par l’admissibilité des documents audio n’ont pas encore été abordés de manière intégrale par la majorité des entreprises leaders, y compris celles du secteur financier. La gestion des données audio constitue ainsi un « défi majeur » pour plus du tiers (38 %) des grandes sociétés européennes. Plus des deux tiers (69 %) des sondés reconnaissent aussi la nécessité d’améliorer les processus ayant trait à l’admissibilité des documents audio.

La variété des supports sur lesquels les conversations peuvent être enregistrées complexifie l’extraction des preuves audio. La méthode traditionnelle d’examen — où une personne écoute de nombreuses heures de conversation — n’est pas extensible. Les entreprises du secteur financier doivent se tenir au courant des dernières technologies et techniques existantes pour traiter les preuves audio. Un traitement efficient des documents audio, de sorte que les coûts restent proportionnés au coût global de la procédure juridique, n’est pas chose facile. Néanmoins, il devient difficile pour les entreprises d’alléguer que les preuves audio sont trop complexes à traiter.

Comme toujours, si les technologies fournissent une solution, un plan soigneusement conçu et une réflexion sur les différentes options disponibles seront d’un grand secours à ceux qui doivent chercher, examiner et divulguer les documents audio.

Par Deborah Blaxell, consultante juridique, en association avec Martin Bonney, directeur international des services de conseil d’Epiq Systems.

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Notes de l'article:

[1Enquête réalisée par téléphone en novembre 2013. 100 personnes appartenant à de grandes sociétés de premier rang (définies comme réalisant un C.A. annuel superieur à 500 millions de dollars) ont été interrogées au Royaume-Uni, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Suisse. De grandes entreprises européennes des secteurs suivants : industrie et BTP ; commerce de détail ; services financiers ; entreprises de distribution d’énergie ou d’autres services essentiels ; produits pharmaceutiques ; services professionnels et informatique/télécommunications, ont participé. Les personnes interrogées étaient le directeur financier, le responsable de la Conformité ou le directeur du département juridique.

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