Depuis un accord national professionnel du 9 juillet 1970 et la loi du 16 juillet 1971, les textes se sont succédés jusqu’à la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004. Aujourd’hui, chaque salarié doit être en mesure, pendant toute sa carrière professionnelle, de développer, compléter ou renouveler sa qualification, ses connaissances, ses compétences et ses aptitudes professionnelles. Cela passe par la formation en dehors du temps de travail, le droit individuel à la formation, les contrats et périodes de professionnalisation et la redéfinition des actions de formation menées dans le cadre du plan de formation.
Pour ce dernier cas, l’article L930-1 du Code du travail énonce très précisément que « l’employeur a l’obligation d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences ». Ce plan de formation doit toutefois être distingué du congé de formation qui est, quant à lui, une autorisation d’absence donnée au salarié ayant pris seul l’initiative de se former, pas nécessairement d’ailleurs dans le domaine d’activité de son emploi.
Dans l’affaire qui a donné lieu au prononcé de l’arrêt du 23 octobre 2007, plusieurs salariés avaient fait l’objet d’un licenciement économique. Contestant leur licenciement et réclamant en conséquence des dommages et intérêts du fait de la perte d’emploi, ils ont chacun ajouté une réclamation indemnitaire tirée d’un manque de formation professionnelle au cours de l’exécution de leur contrat. La Cour d’appel saisie du dossier ayant fait droit à l’ensemble des demandes des salariés, l’employeur, en l’occurrence une organisation syndicale professionnelle, considérait impossible le cumul entre l’indemnité pour perte d’emploi et celle pour manquement à l’obligation de formation, ajoutant qu’en toute hypothèse il n’était pas expliqué en quoi il aurait manqué à son obligation d’adaptation à l’emploi.
Rappelant l’ancienneté des salariés (24 et 12 années) et le bénéfice d’un unique stage de formation pendant toute la durée d’exécution du contrat, la Cour de cassation a jugé qu’au regard de l’obligation pour l’employeur d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, le manquement de l’employeur dans l’exécution du contrat était établi et entraînait un préjudice distinct de celui résultant de la rupture du contrat.
L’on peut tirer quatre enseignements de cette décision importante ;
l’employeur est tenu d’adapter les salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, et ce tout au long de l’exécution du contrat,
le juge apprécie le respect par l’employeur de son obligation d’adaptation au regard de l’ancienneté du salarié et du nombre de stages effectués depuis son embauche,
le salarié est en droit de demander au juge la condamnation de l’employeur au paiement de dommages et intérêts en cas de manquement,
le manquement par l’employeur à son obligation d’adaptation n’invalide pour autant pas le licenciement.
Bien évidemment, pour prétendre à une indemnisation, il appartiendra au salarié de justifier du préjudice subi du fait de l’absence de formation au cours du contrat. Pour cela, il devra disposer d’une ancienneté certaine et prouver les difficultés de réinsertion consécutives à son licenciement en démontrant que ces difficultés sont dues, notamment, à l’absence de formation et d’adaptation pendant les quelques années écoulées dans l’emploi occupé.
Soc. 23 octobre 2007 pourvoi n° 06-40950
Jean-Philippe SCHMITT,
Avocat à DIJON
Spécialiste en Droit du Travail