La France a été dévastée par une tempête dans la nuit du 27 au 28 février. Xynthia a essentiellement touché les régions de l’ouest, notamment la Vendée et la Charente-Maritime. Au total, on dénombre plus d’une cinquantaine de victimes, des disparus et des milliers de sinistrés. Un arrêté du 1er mars 2010 portant reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle a été publié mardi au Journal Officiel. D’un point de vue juridique, la tempête soulève plusieurs questions dont les suivantes :
Quelles sont les conséquences pour les victimes de la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ? Quelles sont les démarches à effectuer lorsque l’on est sinistré ? Pourquoi les digues ont-elles cédé et quelles en sont les conséquences en matière de responsabilité ?
Voici quelques éléments de réponse et des conseils utiles pour les démarches à accomplir.
Une tempête aux lourdes conséquences
La tempête Xynthia a touché la France, notamment l’ouest dans la nuit du samedi 27 au dimanche 28 février. Les vents auraient soufflés jusqu’à 200 kilomètres/heure au Puy de Dôme (63) le 28 au matin. Selon ERDF, au plus fort de la tempête, 1,3 million de foyers ont été privés de courant.
Les départements les plus sinistrés sont à ce jour la Charente-Maritime, le Loir et Cher, la Vendée, l’Indre, la Moselle, le Maine et Loire, le Cher et le Loiret. Les villes de La-Faute-sur-Mer et de l’Aiguillon-sur-mer, les plus meurtries par la tempête, avaient d’ailleurs été classées parmi les « communes à risque » de Vendée en août 2005 notamment en raison du « risque d’inondations terrestres avec enjeu humain » et, pour la première, du « risque d’inondation maritime avec enjeu humain ».
La tempête Xynthia a causé la mort de 53 personnes et on recense encore 6 disparus en ce vendredi 5 mars, victimes auxquelles il faut bien évidemment ajouter les blessés graves. Xynthia est la tempête la plus meurtrière qu’a connue la France depuis celle de 1999. Les obsèques de nombreuses victimes se sont déroulées cette semaine en présence de ministres du gouvernement, notamment le Premier Ministre François Fillon et du Président de la République, Nicolas Sarkozy.
L’état de catastrophe naturelle
L’état de catastrophe naturelle a été reconnu dans un arrêté paru au Journal Officiel le mardi 2 Mars 2010. Il prend en compte l’ensemble des communes de quatre départements (Charente-Maritime, Deux-Sèvres, Vendée, Vienne).
Cette reconnaissance permet une meilleure indemnisation des victimes et un allongement des délais pour effectuer les déclarations et formalités diverses.
L’article 1er de ce texte précise que l’état de catastrophe naturelle est constaté pour les dommages causés par les événements naturels d’intensité anormale non assurables (inondations et coulées de boue, inondations et chocs mécaniques liés à l’action des vagues) qui ne relèvent pas de la garantie tempête, ouragans, cyclones prévue par l’article L. 122-7 (1er alinéa) du code des assurances, survenus à l’occasion des intempéries du 27 février au 1er mars 2010 pour l’ensemble des communes des départements désignés ci dessous.
Il est également prévu que l’état de catastrophe naturelle constaté par arrêté peut ouvrir droit à la garantie des assurés contre les effets des catastrophes naturelles sur les biens faisant l’objet des contrats d’assurance visés au code des assurances, lorsque les dommages matériels directs qui en résultent ont eu pour cause déterminante l’effet de cet agent naturel et que les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises.
Les aides aux entreprises
Les entreprises et travailleurs indépendants sinistrés lors de la tempête ont également jusqu’au 31 mars 2010 pour déclarer auprès de leurs assureurs les sinistres qui seront indemnisés dans le cadre du régime des catastrophes naturelles, le délai de déclaration ayant été allongé de 10 à 30 jours.
Par ailleurs, les entreprises commerciales, artisanales ou de services sinistrées, ayant un chiffre d’affaires inférieur à 1 million d’euros hors taxe, peuvent faire appel aux aides du FISAC (Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce). Hervé Novelli, secrétaire d’Etat au Commerce, à l’Artisanat, aux Petites et Moyennes entreprises, au Tourisme, aux Services et à la Consommation a en effet annoncé la mobilisation de ce fonds dans le cadre de la tempête Xynthia. Les aides pourront aller jusqu’à 8.000 euros pour les dépenses d’investissement liées à la restauration des locaux et de l’outil de travail et 2.000 euros pour l’indemnisation des pertes d’exploitation, soit une enveloppe globale de 10.000 euros maximum par entreprise. Le dossier de demande d’aide devra être déposé en préfecture.
Des mesures fiscales et sociales sont également envisagées pour les entreprises confrontées à des difficultés financières en raison de la tempête.
Comment être indemnisé des dommages matériels ?
Si vous êtes victime de la tempête Xynthia, par exemple, que votre logement a été dévasté ou que votre voiture a été endommagée, vous devez effectuer certaines démarches afin d’obtenir une indemnisation. Quelle indemnisation pour les victimes de la tempête ? Est-elle identique pour les victimes des inondations ?
La Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) rappelle les principales garanties applicables dans le cas d’une tempête. Il faut ainsi savoir que tout contrat habitation contient obligatoirement une garantie tempête qui couvre tous les dommages causés par le vent (chute d’arbre, toit endommagé ou arraché, mobilier détérioré par la pluie suite à un dommage de toiture). Les dommages causés aux véhicules par l’effet du vent sont également pris en charge si le contrat couvrant le véhicule comporte une garantie incendie ou dommages. En matière de déclaration de sinistre, il s’agit de prévenir votre assureur le plus rapidement possible, par lettre recommandée de préférence ou en vous rendant immédiatement à son cabinet.
La déclaration officielle de catastrophe naturelle est en revanche nécessaire pour être indemnisé des dégâts causés en raison d’inondation (débordement de cours d’eau, ruissellements suite à forte pluie, refoulement d’égouts). L’arrêté précité reconnaît l’état de catastrophe naturelle pour inondations, coulées de boue et mouvements de terrain dans 4 départements (Charente-Maritime, Deux-Sèvres, Vendée et Vienne) et pour inondations et chocs mécaniques liés à l’action des vagues dans 2 départements (Charente-Maritime et Vendée). Cet arrêté concerne l’ensemble des communes de ces départements qui ont subi les intempéries du 27 février au 1er mars 2010.
Il appartient donc aux victimes de faire parvenir leur déclaration de sinistre catastrophe naturelle par lettre recommandée, par téléphone ou par rendez-vous chez leur assureur.
Dans le cas présent, les délais de déclaration de sinistres sont prolongés jusqu’au 31 mars, au lieu des 5 ou 10 jours contractuellement ou légalement prévus.
Concernant les documents à fournir à l’appui de la demande de prise en charge par l’assurance, il est conseillé d’adresser à l’assureur, un descriptif précis des dommages subis ainsi qu’une liste chiffrée des objets perdus ou endommagés. Si vous possédez des justificatifs attestant de l’existence de ces objets, n’hésitez pas à les joindre. Par exemple, il vous est possible d’envoyer, une copie des factures ou des photographies des objets en question.
Concernant les biens professionnels, il est préférable de joindre également l’attestation de propriété ou le contrat de location (pour les dommages immobiliers), un extrait du registre de commerce, les bilans et comptes de résultat avec détail des comptes de charges et produits, le chiffre d’affaires de l’exercice en cours et des trois précédents (si vous avez souscrit une garantie perte d’exploitation notamment).
Quelles démarches effectuer en cas de dommage corporel ?
D’après la Fédération française des sociétés d’assurances, suite à la perte d’un proche ou en cas de blessures causées par la tempête, il est nécessaire dans un premier temps de recenser les différentes garanties et contrats pouvant être mis en œuvre.
Ensuite, une déclaration de sinistre devra être rédigée par la victime et adressée aux différents interlocuteurs, notamment les organismes de sécurité sociale telle la CPAM (caisse primaire d’assurance maladie).
La polémique autour des digues
La tempête soulève également en raison de ces nombreux décès et blessés des questions relatives à la construction des digues et aux règles de sécurité notamment dans les zones inondables. La catastrophe aurait-elle pu être évitée ? Les constructions étaient-elles aux normes ? Faut-il construire dans les zones inondables ?
Les digues construites sur les côtes pour protéger les habitations en bordure du littoral, ont cédé à différents endroits, notamment en Vendée et en Charente-Maritime, en raison des rafales de la nuit de samedi à dimanche.
Nicolas Sarkozy qui s’est rendu sur place a annoncé un plan en faveur du renforcement des digues françaises suite à cette catastrophe naturelle. Le problème vient du fait que de nombreuses digues n’ont pas été entretenues en raison des coûts élevés que cela nécessite ou du moins l’ont été mais n’ont pas été aménagées pour tenir compte des risques.
« Beaucoup de digues sont très anciennes et ont besoin d’être consolidées et rehaussées pour tenir compte notamment de l’élévation du niveau de la mer », souligne le directeur de projet d’une société d’ingénierie et de conseil en environnement.
La polémique qui surgit à l’heure actuelle est liée à ces digues. Beaucoup se demandent si l’état de celles-ci a eu une incidence lors de la tempête et si une meilleure prise en charge de ces digues n’aurait pas réduit le nombre de victimes.
« Le morcellement des responsabilités et la question de la compétence et de la capacité des acteurs locaux sont les points les plus importants du dossier », voilà le constat que l’on peut faire aujourd’hui concernant la tempête Xynthia et mis en évidence par le responsable des risques naturels et hydrauliques au ministère de l’écologie, Jean Marc Kahan.
La gestion des digues est compliquée car de nombreuses digues n’appartiennent à personne, aucun propriétaire n’étant connu et l’Etat ne se considérant pas comme tel. Cette situation est liée à l’ancienneté de certaines digues, vieilles de plusieurs siècles et qui de ce fait ne sont pas régies par un acte administratif de propriété. Dans ce cas, qui a la charge de l’entretien ? Est-ce à l’Etat d’en assumer les frais même s’il n’est pas à proprement dit le propriétaire.
Les règles existantes ne semblent pas suffisamment contraignantes. Voici un bref aperçu. Le point de départ du droit en matière de digues résulte d’une loi de 1807 qui précise que la gestion des digues incombe aux propriétaires.
Récemment, la réglementation s’est faite plus contraignante. La loi de 2006 sur « L’eau et les milieux aquatiques » a été suivie d’un décret de décembre 2007, qui établit, notamment, la nécessité de mener pour les digues des études de danger.
Ces audits, à la charge des propriétaires des digues, doivent établir les risques que celles-ci font courir aux personnes proches ou aux installations publiques et industrielles. En fonction des résultats, les propriétaires doivent être capables de surveiller leurs digues, de les entretenir et d’en prévenir les défaillances, cela sous le contrôle des services territoriaux de l’Etat. Le problème vient du fait que les travaux qui en découlent sont souvent hors de portée des associations de riverains ou des petites communes, même si l’Etat peut subventionner certains projets.
La gestion du littoral et les zones inondables
La tempête Xynthia comme toute catastrophe de ce type ravive le débat sur la délivrance de permis de construire en zone inondable.
En 10 ans, 100.000 logements ont été construits dans des zones inondables. Certes, il existe des Plans de prévention des risques naturels (PPRN) depuis 1995 mais ceux-ci ne visent à interdire les constructions que dans les secteurs les plus dangereux, très minoritaires dans les quelque 7.500 communes qui ont de tels dispositifs. De plus, ces plans n’imposent pas la démolition des constructions situées en zone dangereuse si ces dernières datent d’avant 1995. En résumé, les règles en la matière sont insuffisantes car elles ne prennent pas en considération tous les facteurs de risque et toutes les constructions situées en zone sensible.
Pour les secteurs où le risque est plus faible, les constructions peuvent être autorisées par la mairie, mais avec des obligations pour assurer la sécurité des occupants en période d’inondations. Toutefois, en pratique, les élus cèdent souvent à la pression des promoteurs et électeurs qui souhaitent construire en bord de mer, notamment dans les zones touristiques.
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