L’invocabilité directe du droit de l’Union européenne par les justiciables européens.

Par Pierre-Olivier Koubi-Flotte, Avocat.

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Explorer : # invocabilité directe # droit de l'union européenne # libre établissement # non-discrimination

L’Arrêt REYNERS de la Cour de Justice des Communautés Européennes du 21 juin 1974 a énoncé un principe d’évocabilité directe par les justiciables européens des règles énoncées par le Traité CE - Il apparaît clairement depuis cet Arrêt que le droit européen n’est plus seulement un droit entre Etats mais aussi un droit à destination des ressortissants de ces Etats.

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L’Arrêt REYNERS de la Cour de Justice des Communautés Européennes du 21 juin 1974 (Rec. 197.631) est l’un des Arrêts les plus fondamentaux de la construction juridique communautaire.

L’ancien article 52 du Traité CE prévoyait, comme un moyen essentiel de réalisation du marché intérieur au sein duquel les personnes, les marchandises et les services circuleraient librement, l’interdiction de toute discrimination à raison de la nationalité.

Il s’agissait là d’un principe général.

Pour être plus précisément mis en œuvre secteur d’activité par secteur d’activité, le Traité CE prévoyait aussi, dans ce qui était son article 54, l’adoption de directives par le Conseil de l’Union européenne.

Des directives européennes devaient ainsi -secteur réglementé par secteur règlementé- identifier les règles nationales restrictives qu’il incombait aux Etats membres d’abolir.

Il se trouvait toutefois qu’aux début des années 1970 aucune directive européenne n’était encore intervenue pour libéraliser l’exercice de la profession d’Avocat au sein de l’espace européen.

C’est ainsi qu’un Avocat néerlandais dénommé Me REYNERS s’était vu refuser l’inscription au barreau belge, sa nationalité néerlandaise y faisant obstacle.

Me REYNERS a contesté cette décision devant les juridictions nationales belges, procédure à l’occasion de laquelle il a introduit un recours préjudiciel devant la Cour de Justice de l’Union Européenne -à l’époque dénommée Cour de Justice des Communautés Européennes- pour savoir si l’article 52 du Traité de Rome, qui prévoyait le principe de la prohibition des discriminations au libre établissement, était oui ou non d’applicabilité directe.

Pour une majorité de juristes de l’époque, cet article 52 ne liait que les Etats membres entre eux et à l’égard de la Communauté européen et aucun ressortissant d’aucun Etat membre ne pouvait en sa simple qualité de ressortissant se prévaloir de cette disposition à l’encontre de son propre Etat membre ou à l’encontre d’un autre Etat membre.

Selon cette même majorité de juristes, qui raisonnaient d’ailleurs de manière très logique, seule une directive d’application, qui dans le cas de la profession d’Avocat n’était pas encore intervenue était susceptible de créer des droits qu’un particulier aurait pu directement invoquer.

Dans son Arrêt REYNERS du 21 juin 1974, la Cour de Justice a pourtant jugé le contraire en considérant que les dispositions du Traité qui consacraient le principe d’un droit au libre établissement pouvaient être invoquées de manière directe par un particulier même en l’absence de directive d’application.

On a compris à partir de cet Arrêt REYNERS du 21 juin 1974 que le droit européen allait changer la vie des justiciable ; le droit européen n’était plus simplement le droit des Etats membres et des institutions de l’Union mais allait devenir le droit de tous les citoyens européens.

Maître Pierre-Olivier Koubi-Flotte - Docteur en Droit, Avocat au Barreau de Marseille - http://avocats-koubiflotte.com/
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