Les nouvelles infractions boursières.

Par Yanis Mouhou, Juriste.

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Explorer : # manipulation algorithmique # cryptomonnaies # fraude numérique # délit d'initié

Les nouvelles infractions boursières, alimentées par l’innovation technologique et l’internationalisation des marchés, présentent des défis de régulation sans précédent.

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Le marché boursier est un élément clé de l’économie mondiale, offrant une plateforme pour la croissance des entreprises et l’investissement des particuliers. Cependant, avec l’essor des marchés financiers et l’innovation constante dans les instruments financiers, de nouvelles infractions boursières sont apparues. Ces infractions peuvent perturber l’intégrité des marchés, créer une distorsion de la concurrence et nuire aux investisseurs. Dans ce contexte, les législations boursières, notamment européennes et françaises, ont évolué pour répondre à ces nouvelles menaces.

I. Les infractions boursières traditionnelles et leur évolution.

Historiquement, les infractions boursières étaient principalement centrées autour de la manipulation de marché, des abus de marché et des délits d’initiés.

Manipulation de marché : cela concerne les pratiques destinées à fausser l’offre et la demande sur les marchés financiers. Cela inclut des actions telles que la diffusion de fausses informations pour influencer les prix des actions.

Abus de marché : ce terme regroupe les manipulations illégales de prix, comme l’achat ou la vente d’actifs financiers dans le but de fausser leur valeur.

Délit d’initié : cette infraction concerne l’utilisation d’informations privilégiées non publiques pour réaliser des transactions financières avant que ces informations ne deviennent accessibles au public.

Ces infractions étaient bien encadrées par des régulations nationales et internationales. Cependant, avec l’émergence de nouvelles technologies financières et la mondialisation des marchés, de nouvelles formes d’infractions ont pris naissance.

II. Les nouvelles infractions boursières.

Les récentes évolutions technologiques, les changements réglementaires et l’internationalisation des marchés ont généré de nouvelles catégories d’infractions.
Voici un aperçu de ces infractions émergentes.

A. La manipulation algorithmique.

L’usage des algorithmes et des trading à haute fréquence a considérablement modifié la façon dont les marchés boursiers fonctionnent. Ces technologies permettent d’exécuter des milliers de transactions par seconde, influençant ainsi les prix de manière significative.

Les pratiques illégales : l’une des pratiques les plus controversées est le « spoofing », qui consiste à placer de fausses ordres d’achat ou de vente dans le but de tromper les autres acteurs du marché, puis de les annuler avant qu’ils ne soient exécutés. Cette manipulation artificielle des prix peut fausser la perception du marché.

Les risques juridiques : bien que des législations telles que le Règlement européen sur les abus de marché (MAR) aient été mises en place pour limiter ces pratiques, l’implémentation et la détection de telles manipulations sont difficiles. Les régulateurs doivent faire face à un défi croissant pour suivre et sanctionner ces activités.

B. Les cryptomonnaies et la fraude numérique.

Les cryptomonnaies et les actifs numériques représentent un secteur en pleine expansion, mais ils sont également le terrain de nombreuses fraudes et manipulations.

Les fraudes liées aux Initial Coin Offering (ICO) : les ICOs sont des levées de fonds où des entreprises vendent des jetons numériques en échange de cryptomonnaies comme le Bitcoin ou l’Ethereum. Dans de nombreux cas, des escroqueries ont eu lieu où des projets fictifs ou frauduleux ont récolté des fonds auprès des investisseurs.

Les Pump and Dump : cette technique consiste à créer artificiellement un engouement pour une cryptomonnaie ou un actif numérique, puis à vendre massivement ce bien une fois que son prix a été gonflé.

La régulation de ces nouvelles formes de marché reste un défi majeur. Les autorités financières, comme l’ESMA (Autorité européenne des marchés financiers), ont mis en place des lignes directrices pour réglementer le secteur des cryptomonnaies, mais les défis restent énormes, notamment en matière de protection des consommateurs et de prévention de la fraude.

C. Les nouvelles formes de délits d’initiés.

Les délits d’initiés ne sont plus seulement limités à l’utilisation d’informations non publiques sur les actions d’une société cotée. Avec l’essor de l’intelligence artificielle et des données massives (big data), de nouveaux types d’informations peuvent être exploités pour réaliser des bénéfices.

Exploitation des données alternatives : des informations provenant de sources non conventionnelles, comme les médias sociaux ou les mouvements sur des plateformes décentralisées, peuvent être utilisées pour anticiper des variations de prix sur les marchés financiers.

La détection du délit d’initié numérique : le défi consiste ici à déterminer l’origine de l’information et son impact sur le marché, en raison de la rapidité avec laquelle les informations circulent et de la diversité des canaux utilisés.

D. La fraude en matière de reporting financier et ESG.

Avec l’introduction des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), une nouvelle forme de fraude a émergé, notamment liée à la déclaration de performance ESG des entreprises.

Greenwashing : certaines entreprises prétendent adopter des pratiques écologiques ou durables dans le but de séduire des investisseurs soucieux de l’impact environnemental. Ces pratiques frauduleuses consistent à manipuler les informations sur les initiatives « vertes » d’une entreprise.

Manipulation des indices ESG : certaines entreprises manipulent leurs indices ESG en modifiant leurs rapports financiers ou en « blanchissant » leurs activités pour afficher des performances supérieures en matière de durabilité.

Les régulateurs doivent désormais non seulement se concentrer sur les violations financières classiques, mais aussi surveiller la manière dont les entreprises manipulent leurs rapports ESG, un domaine de plus en plus scruté par les investisseurs.

III. Les cadres juridiques et les réponses des régulateurs.

A. Le Règlement européen sur les abus de marché (MAR).

Le MAR a été un tournant important dans la lutte contre les abus de marché au sein de l’UE. Il s’attaque aux pratiques de manipulation de marché et aux délits d’initiés, tout en introduisant des sanctions strictes. Il impose également une obligation de transparence accrue pour les sociétés cotées, afin de prévenir les abus.

Les nouvelles infractions boursières, telles que celles liées à l’utilisation des algorithmes ou aux cryptomonnaies, sont désormais surveillées plus attentivement, mais l’application de la législation se heurte à des difficultés pratiques dues à la vitesse des transactions et à la complexité des technologies utilisées.

B. La régulation des cryptomonnaies et des marchés numériques

Les autorités de régulation sont confrontées à un défi majeur pour encadrer les activités des cryptomonnaies. Des initiatives telles que le Règlement européen sur les crypto-actifs (autrement appelé "Règlement MiCA" pour Markets in Crypto-Assets) ont pour objectif d’établir un cadre juridique pour la réglementation des cryptomonnaies au sein de l’UE. Ce règlement vise à offrir une protection aux investisseurs tout en garantissant la stabilité des marchés.

C. Les sanctions et mesures punitives.

Les régulateurs ont renforcé leurs sanctions pour faire face à ces nouvelles infractions. Outre les amendes financières, les peines de prison et la fermeture de plateformes illégales, les régulateurs prennent désormais des mesures plus ciblées, comme la désactivation des algorithmes frauduleux ou la restriction d’accès aux plateformes de cryptomonnaies.

4. Les défis à venir.

Malgré les efforts de régulation, les défis demeurent nombreux. L’un des principaux obstacles est l’absence d’harmonisation complète des régulations à l’échelle mondiale. Les différentes législations nationales peuvent créer des zones d’ombre, permettant à certaines pratiques illégales de prospérer dans des juridictions moins strictes.

De plus, l’évolution technologique rapide –notamment l’intelligence artificielle et les contrats intelligents dans la blockchain– rend difficile l’adaptation des régulations existantes. Les régulateurs devront s’appuyer sur une coopération internationale accrue, des outils d’intelligence artificielle et une meilleure traçabilité des transactions pour faire face à ces nouvelles infractions.

Yanis Mouhou, Juriste
Master 2 contentieux et Master 2 droit public, Université de Rouen

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