1) Gravité de la faute et nature du licenciement.
Il existe plusieurs degrés de fautes selon leur gravité, ce qui impacte le type de licenciement :
Faute « simple » : le licenciement sera notifié pour cause réelle et sérieuse, le salarié voit son contrat rompu mais bénéficiera des indemnités de rupture de son contrat (indemnité compensatrice de préavis et indemnité de licenciement).
Faute grave et faute lourde : le licenciement sera notifié pour faute grave ou faute lourde ; le salarié est privé de ses indemnités de rupture.
Il n’existe pas de définitions légales à ces différents motifs de licenciement disciplinaire mais la jurisprudence a apporté des précisions :
La faute simple est celle qui justifie que le salarié ne puisse poursuivre l’exécution de son contrat de travail en raison d’agissements fautifs qui lui sont imputables.
La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et nécessite la rupture, sans délai, de son contrat de travail (Cass. soc. 27-9-2007 n° 06-43.867 ; Cass. soc. 6-12-2007 n° 06-41.491).
La faute lourde est caractérisée par l’intention de nuire à l’employeur ; elle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif (Cass. soc. 3-10-1990 n° 88-42.334).
2) La contestation du motif du licenciement.
Le salarié peut contester :
La réalité des faits
Le degré de gravité donné aux faits fautifs et donc la qualification de la faute.
Ainsi, dans l’exercice du contrôle du motif du licenciement, le juge doit vérifier : en premier lieu que le motif allégué constitue une faute et, si c’est le cas, que la qualification retenue par l’employeur est justifiée.
Le juge peut requalifier la faute alléguée en une faute de moindre gravité.
Ainsi, il recherche si les faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu’il écarte la faute grave invoquée par l’employeur (Cass. soc. 22-2-2005 n° 03-41.474).
De même, il recherche si les faits constituent une faute grave lorsqu’il écarte la faute lourde (Cass. soc. 16-9-2020 n° 18-25.943).
Toutefois, le juge ne peut aggraver la qualification de la faute retenue par l’employeur (Cass. soc. 26-6-2013 n° 11-27.413).
Ainsi, il ne peut requalifier en faute grave une cause réelle et sérieuse de licenciement (Cass. soc. 20-12-2017 n° 16-17.199).
Enfin, si les faits invoqués, sont établis, mais ne sont pas fautifs, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc. 26-10-1999 n° 97-41.679 ; 23-1-2001 n° 98-44.843).
Précisons que lorsque le licenciement est subordonné à l’avis d’un conseil de discipline, cet avis ne lie pas le juge (Cass. soc. 23-5-1995 n° 93-46.618).
La charge de la preuve.
La charge de la preuve est différente selon le degré de faute et la nature du licenciement.
Ainsi, dans le cadre d’un licenciement pour cause réelle et sérieuse, en vertu de l’article L1235-1, la charge de la preuve n’incombe pas spécialement à l’une des deux parties ; ainsi, la charge de la preuve est partagée (Cass. soc. 26-6-2008 n° 07-40.514).
Dans le cadre d’un licenciement pour faute grave ou lourde, la charge de la preuve pèse exclusivement sur l’employeur (Cass. soc. 28-3-2012 n° 10-27.779).
3) Les délais à respecter dans le cadre d’une procédure de licenciement disciplinaire.
Le délai pour engager la procédure :
Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance (article L1332-4 du Code du travail).
Passé ce délai, ledit fait fautif ne peut plus donner lieu à une sanction.
Ainsi, l’employeur, dès lors qu’il a connaissance de faits qu’il considère comme fautifs et qu’il entend sanctionner le salarié, est tenu par un délai de deux mois à compter du jour où il en a eu connaissance.
C’est la date de convocation à l’entretien préalable qui marque l’engagement des poursuites et interrompt le délai de prescription des faits fautifs de deux mois (Cass., Soc., 5 février 1997, N° 94-44.538).
Le point de départ du délai de deux mois est le jour où l’employeur a eu connaissance des faits fautifs. Cette notion doit s’entendre d’une information précise et complète des événements. Ainsi, lorsque des vérifications et investigations sont nécessaires pour établir avec certitude les faits, le point de départ du délai de deux mois peut se trouver reporté jusqu’au jour où l’employeur dispose de l’ensemble des informations (Cass., Soc., 7 déc. 2016, N° 15-24.420).
Le délai de deux mois s’entend donc du jour où l’employeur a connaissance des faits au jour d’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable.
En cas de contestation, c’est à l’employeur de rapporter la preuve qu’il a eu connaissance des faits dans les deux mois ayant précédés l’engagement de la procédure disciplinaire (Cass., Soc., 10 avril 2019, n°17-24.093).
A défaut de rapporter une telle preuve, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le délai de deux mois est suspendu si le fait fautif donne lieu à des poursuites pénales ; il ne court à nouveau qu’une fois la décision définitive rendue par la juridiction pénale, si l’employeur est parti au procès pénal, et dans le cas contraire, à compter du jour où il a été informé de l’issue définitive de la procédure pénale (Cass., Soc., 15 juin 2010, 08-45.243).
Le délai pour notifier le licenciement.
A compter de la date de l’entretien préalable, la lettre de licenciement doit être notifiée au salarié dans un délai minimum deux jours ouvrables (article L1232-6), et dans un délai maximum d’un mois (article L1332-2).
Ainsi, si la lettre de licenciement pour motif disciplinaire est notifiée au salarié plus d’un mois à compter de l’entretien préalable, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass., Soc., 15 oct. 1997, N° 95-43.389).
Qu’en est-il lorsque la date de l’entretien préalable a été reportée ?
Il faut différencier la situation dans laquelle le salarié a fait la demande et celle dans laquelle où c’est une initiative de l’employeur.
Ainsi, si l’employeur prend l’initiative de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable parce que ce dernier ne s’était pas présenter au premier, le point de départ du délai d’un mois pour notifier le licenciement est la date du premier entretien (Cass., Soc., 17 janv. 1990, N° 86-45.212 ; 17 avril 2019, N° 17-31.228).
En revanche, si l’entretien est reporté sur demande du salarié, le délai d’un mois court à compter de la date du second entretien (Cass. Soc. 7 juin 2006 n° 04-43819).
Les causes de suspension du délai.
Si des garanties conventionnelles de procédure sont prévues, telles que la saisine d’une commission, alors le délai d’un mois est suspendu.
Ainsi, le licenciement notifié dans le délai d’un mois à compter de l’avis rendu par une Commission de discipline est conforme à l’exigence de l’article L1332-2 (Cass., Soc., 23 juin 2004, N° 02-41.877).
Précisons également que lorsqu’il existe une procédure particulière prévue par la convention collective, celle-ci constitue une garantie de fond pour le salarié ; ainsi, le non-respect prive le licenciement de cause réelle et sérieuse et justifie l’allocation au salarié de dommages-intérêts à ce titre (Cass., Soc. 23 mars 1999, N° 97-40.412).
Plusieurs moyens de contestation s’ouvrent donc aux salariés privés d’emploi, qui ne doivent pas hésiter à faire valoir leurs droits.