Introduction.
L’intelligence artificielle (IA), perçue dès 1955 par John McCarthy comme « la science et l’ingénierie de la création de machines intelligentes » et définie par le dictionnaire français Le Robert comme « l’ensemble des théories et des techniques développant des programmes informatiques complexes capables de simuler certains traits de l’intelligence humaine », est en passe de transformer le Monde. Son intégration profonde dans d’innombrables aspects de la vie quotidienne, modifie de manière saisissante les méthodes de travail, de communication et de coexistence. Aucun secteur d’activité n’échappe à cette révolution y compris la médecine, un domaine profondément bouleversé par cet exploit technologique.
En effet, les technologies d’IA imprègnent désormais l’ensemble des composantes de la médecine moderne, qu’il s’agisse de la pratique clinique, des soins à domicile, de la gestion administrative, la santé publique ou encore de la recherche scientifique.
L’implémentation de l’IA dans le domaine médical marque à bien des égards, une véritable évolution voire une révolution, tant sur le plan de la précision des diagnostics, d’efficacité thérapeutiques que l’optimisation de la gestion des soins. Ces systèmes d’IA à l’aune de leur développement, laisse présager une personnalisation des traitements, adaptée aux besoins spécifiques des patients. L’IA est désormais mise à profit pour assister les professionnels de santé dans des interventions complexes telles que la chirurgie de pointe et la prise en charge des personnes âgées. Certains la considèrent déjà comme une solution à la pénurie de personnel soignant et à l’augmentation des coûts des services de santé.
Cependant, si l’innovation suppose l’introduction de faits ou d’éléments nouveaux dans un système donné, celle-ci devrait aussi et davantage être appréciée sous l’angle du renforcement de l’existant de manière à le rendre aussi irréprochable que possible. De ce point de vue, le caractère novateur attribué à l’IA médicale devrait également être mesuré à l’aune de l’affermissement de la pratique médicale aussi bien dans sa dimension strictement technique que dans ses implications éthique et juridique. Or, à observer de près le système de l’algorithme médical, il est évident que ce dernier est à des lieux d’avoir solidifié l’approche éthique et juridique de la médecine.
L’éthique médicale qui désigne l’ensemble de règles de conduite des professionnels de santé vis-à-vis de leurs patients est indispensable dans la pratique de la médecine, car elle constitue la garantie de la qualité des soins et de la liberté du malade. « Il ne saurait y avoir de soin sans éthique, ni d’éthique sans philosophie du soin, dans l’intérêt, du patient et de la société ». En outre, l’éthique est étroitement liée au droit, puisque la violation de certains principes éthiques est ipso facto sanctionnée par la loi et c’est très souvent les lois spécifiques qui déterminent la manière dont les médecins doivent traiter les questions éthiques relatives aux soins des patients. À ce propos, Véronique Lefebvre des Noettes souligne que l’exercice de la médecine doit pouvoir se déployer dans un cadre juridique et normatif l’exposant à des dilemmes éthiques.
Les dilemmes éthiques et juridiques liés à l’IA en médecine découlent à la fois des caractéristiques intrinsèques à la technologie et de son application dans le domaine complexe de la santé humaine. Du point de vue technologique, trois principales zones de préoccupation émergent : la collecte et la conservation des données nécessaires à l’entraînement et au fonctionnement des algorithmes d’apprentissage automatique, la programmation de ces algorithmes qui peut introduire des biais et l’intégration de ces dispositifs dans les structures de santé. En ce qui concerne la santé, l’IA s’introduit comme un nouvel acteur aux intentions incertaines, perturbant la relation de confiance entre le soignant et le patient, déjà fragilisée par la maladie. Au Cameroun, comme dans d’autres pays africains, ces défis sont encore exacerbés par des inégalités d’accès aux technologies et des lacunes dans les régulations locales.
Ainsi, l’IA en médecine remet en question les cadres de protection traditionnels et suscite de nombreuses interrogations éthiques et normatives. On peut principalement se demander si les principes éthiques et l’arsenal juridique actuels sont suffisants pour répondre aux bouleversements induits par l’IA au Cameroun. Ensuite, doit-on considérer que l’IA accélère et exacerbe les tensions éthiques préexistantes dans le domaine de la santé ? Enfin, faut-il créer de nouvelles normes, adapter celles existantes, ou continuer à étendre le cadre juridique en l’intégrant directement dans le code des algorithmes ?
C’est sur ce triptyque cher à Vincent Couture et Hazar Haidar, que la présente communication s’aligne pour examiner l’impact de l’IA sur les soins médicaux et les préoccupations d’ordre éthique et juridique qu’elle engendre. Elle s’appuie sur une méthode essentiellement juridique, à travers une analyse critique des normes en vigueur et une évaluation des doctrines existantes. En complément, une approche sociologique est intégrée pour examiner les implications pratiques de l’IA en médecine au Cameroun, afin de comprendre l’impact réel sur les pratiques médicales et les défis éthiques associés. C’est dans cette perspective que sont analysés d’une part les dilemmes éthiques (I) et d’autre part les défis juridiques (II) de l’implémentation de l’IA dans la médecine au Cameroun.
Sommaire.
I. L’IA en médecine : un progrès technologique bousculant les fondements de l’éthique médicale.
II. Une avancée technologique surpassant le cadre juridique actuel.
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