Durant la Restauration, le ministre des Finances Jean-Dominique Louis établit la règle "des quatre temps alternés", structurant encore aujourd’hui le processus budgétaire. Les deux premiers temps sont essentiels : la préparation gouvernementale du budget et sa discussion/vote par le Parlement.
La prééminence de l’exécutif est cependant manifeste : neuf mois de préparation contre trois mois d’examen parlementaire, créant un déséquilibre structurel partiellement compensé par les pouvoirs d’amendement reconnus aux parlementaires.
Ce travail préparatoire débute, depuis la révision constitutionnelle de 2008 modifiant l’organisation des travaux parlementaires, par l’examen du projet de loi de finance par la commission des finances.
Cette dernière élabore des amendements modifiant les articles du projet de loi de finance et prépare ainsi la séance publique, au cours de laquelle chaque article du projet sera discuté puis soumis au vote des parlementaires.
Le pouvoir d’amendement des députés, reconnu par le Conseil constitutionnel comme illimité en principe, représente une prérogative essentielle du Parlement pour infléchir les orientations budgétaires gouvernementales. Ces orientations budgétaires et gouvernementales seront détaillées dans des documents annexes au projet de loi de finance préparé par le gouvernement permettant aux parlementaires de comprendre ces orientations.
Ainsi, ces documents annexes sont : les bleus budgétaires qui sont des documents obligatoires détaillant les points essentiels du projet de loi de finance ; les jaunes budgétaires exposant la relation financières entre la France et l’Union européenne. Il existe aussi les oranges budgétaires expliquant les politiques interministérielles et enfin les verts budgétaires récapitulant les crédits votés.
Ces documents permettent de compenser partiellement le déséquilibre temporel entre les neuf mois de préparation gouvernementale et les 70 jours accordés au Parlement par l’article 47 de la Constitution pour se prononcer.
La commission des finances a également pour rôle de sélectionner les amendements en rejetant ceux sans lien avec le sujet ou perturbant l’équilibre budgétaire.
L’article 47 de la loi organique relative à la loi de finance pose le principe du pouvoir d’amendement parlementaire en matière de répartition des crédits. Les parlementaires peuvent ainsi modifier la répartition entre programmes d’une même mission comme par exemple réallouer des crédits entre "enseignement primaire/secondaire" et "dépenses de personnel" au sein la mission "enseignement scolaire".
Ils peuvent également ajuster les crédits d’une mission sans dépasser les plafonds fixés, régulant ainsi les dépenses et évitant l’engagement de ressources indisponibles.
Ce pouvoir d’amendement est toutefois limité par plusieurs dispositions. L’article 30 de la Loi organique relative à la loi de finance impose que l’utilisation des crédits corresponde strictement aux objectifs initiaux, détaillé dans les bleus budgétaires, garantissant transparence et bonne gestion des finances publiques.
Des irrecevabilités procédurales restreignent également ce pouvoir : l’article 40-3 de la Constitution appelé mécanisme du vote bloqué permet au gouvernement de faire voter en bloc sa version du texte en mettant fin aux débats parlementaires.
Egalement, l’article 49.3 de la Constitution permet au gouvernement, après délibération en Conseil des ministres, d’engager sa responsabilité du gouvernement sur un texte et de l’adopter sans vote par les parlementaires.
Face à ces mécanismes, seule une motion de censure votée à la majorité absolue peut contrer leur usage, entraînant toutefois la démission du gouvernement dans le cas du 49.3. Ce contre-pouvoir est cependant très restreint par l’opposition vive existant entre les deux bords politique rendant presque intenable cet objectif de majorité.
Ces mécanismes restrictifs, bien que parfois perçus comme peu démocratiques, peuvent s’avérer nécessaires pour le bon déroulement de la procédure, comme l’illustre la réforme des retraites de 2023 avec le dépôt de 36 000 amendements où l’usage excessif du droit d’amendement paralysait le débat parlementaire. L’article 49.3 apparaît alors comme un moyen de sortir de l’impasse, malgré son coût politique élevé.