Rapport de la DG FISMA de la Commission européenne sur la DeFi : une ébauche de MiCA 2 ? Par Enguerrand Denoual, Elève-Avocat.

Rapport de la DG FISMA de la Commission européenne sur la DeFi : une ébauche de MiCA 2 ?

Par Enguerrand Denoual, Elève-Avocat.

942 lectures 1re Parution: Modifié: 4.97  /5

Explorer : # defi # réglementation # crypto-actifs # innovation financière

Ce que vous allez lire ici :

Ce rapport porte sur le futur règlement "Market in CryptoAssets" (MiCA) de lUnion européenne. Il examine la DeFi et propose une taxonomie des protocoles décentralisés. Le rapport comprend également des propositions de réglementation, telles que l'enregistrement des adresses publiques entités régulées et la création d'un observatoire public pour surveiller les protocoles. De nouvelles réglementations spécifiques à la DeFi et aux NFT sont attendues. L'impact de ces règlements sur l'innovation reste à voir.
Description rédigée par l'IA du Village

En octobre 2022, la DG FISMA (direction générale de la stabilité financière, des services financiers et de l’union des marchés des capitaux) de la Commission européenne a publié un rapport sur la finance décentralisée, communément appelée "DeFi".
A l’heure dans l’entrée en application du règlement MiCA qui concerne les acteurs intermédiaire de l’industrie Crypto, sont déjà anticipés d’autres travaux règlementaires cette fois-ci sur la DeFi. C’est dans ce contexte, que ce genre de rapport peut laisser supposer des pistes pouvant aboutir à de futures dispositions contenues dans un "MiCA 2".

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Contexte.

Ce rapport est à mettre en lumière avec l’accord trouvé suite aux trilogues de la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne, sur le futur règlement "Market in Crypto-Assets", plus connu par son abréviation "MiCA". En effet, les diverses communications desdites institutions laissaient entendre que ce règlement sera une première pierre (avec le Régime Pilote) d’un édifice règlementaire relatif à l’industrie de la Blockchain et des Crypto-actifs [1].

Rappelons que MiCA semble se concentrer sur une première classification de Crypto-actifs (à bien différencier des actifs financiers tokenisés traités par le Régime Pilote dit "DLT"), à savoir : les asset-referenced tokens, e-money tokens et utility tokens.

Egalement sur l’activité des émetteurs de Crypto-actifs ainsi que des prestataires de services sur Crypto-actifs (les PSCA ou CASP pour "Crypto-assets services providers"), semblant reprendre la même structure de mesures imposées aux sociétés françaises souhaitant obtenir non pas l’enregistrement, mais bien l’agrément "PSAN" (le statut de "Prestataire de services sur actifs numériques" créé par la loi PACTE de 2019, permettant notamment et non exhaustivement de proposer des services : d’achat/vente, échanges ou conservation d’actifs numériques pour le compte de tiers).

Toutefois, ce Règlement n’a pas pour vocation de traiter spécifiquement ni des NFT, ni de la finance décentralisée. C’est à ce titre que le Conseil de l’Union européenne, lors de sa communication de l’accord trouvé par les institutions européennes sur MiCA, datant du 30 juin 2022, indique que dans les prochains mois, la Commission sera invitée à travailler sur une évaluation du marché des NFT, et de la finance décentralisée [2].

Il n’est pas de bon ton d’user de corrélations pour en déduire des prédictions, toutefois il ne paraît pas extravagant de supposer que ces travaux à venir de la Commission, seront une ébauche à la rédaction d’un règlement MiCA 2, portant sur ces thèmes. On peut en effet le supposer, lorsque 10 jours avant la communication précitée du Conseil sur MiCA, lors d’une audition à Bruxelles, Madame Christine Lagarde pose la question suivante aux députés en charge de MiCA : "Qu’en est-il d’un MiCA 2 ?".
C’est dans ce contexte qu’il faudrait donc lire et étudier ce rapport, donnant le ton des règlementations qui épauleront le règlement "Market in Crypto-assets".

Concrètement, que dit le rapport ?

Celui-ci porte donc sur les protocoles décentralisés, rendant accessibles des services financiers : incluant non exhaustivement l’échange, la gestion, le lending et borrowing, et les produits dérivés (ces derniers correspondent notamment aux assurances décentralisées).

La Commission semble y reconnaître le caractère innovant de la DeFi, permettant l’accès au public à la finance, estimant que la promesse faite par la DeFi, par sa transparence, est de réduire les abus de marché. Mais l’institution met en balance cette promesse avec un risque accru d’activités illicites (dans le prisme des normes de LCB-FT) et exposants les consommateurs à des instabilités financières (c’est d’ailleurs le même ton ici qui est employé par la Commission, que dans l’exposé des motifs de MiCA 1).

Selon le rapport, en chiffres :

La TVL (« Total value locked ») de la DeFi était de 600 millions $ le 01/01/2020 et a atteint un pic de 315 milliards $ le 26/12/2021, donc une progression très forte malgré la jeunesse de la branche.

La TVL au Q1 2022 était de 250 milliards $. Le rapport mentionne également la crise du stablecoin UST, du crypto-actif Luna, et une volatilité/instabilité constante de la DeFi Q2 2022. Il mentionne surtout que l’investissement massif dans la DeFi ces dernières années ne se fait pas par les banques mais par les Family Offices et Hedge Funds qui investissent pour le compte des banques.

La Commission observe en se basant sur des rapports de Chainalysis de 2021 que le plus gros MarketCap sur la DeFi est localisé dans le Nord Ouest de l’Europe (les institutions françaises et néerlandaises y investiraient d’avantage).

Une taxonomie européenne relative aux protocoles décentralisés.

En outre, vu que la DeFi semble se calquer sur l’économie de la finance européenne, la Commission européenne y légitimise son rôle en réglementant le secteur.

Une taxonomie européenne des différents protocoles décentralisés pourra être établie en fonction de leur structure et des instruments financiers qu’ils proposent (concrètement le rapport ébauche un classement en trois catégories) :

  • les protocoles autarciques (« Autarkic protocols »)
    Ce sont les protocoles qui s’appuient strictement sur des informations vérifiables produites dans le cadre de leur propre activité. Les informations y seraient complètement vérifiables, l’exemple pris par la Commission ici étant le plus connu, en l’espèce Bitcoin.
  • les "Crossing protocols"
    Ceux-ci désigneraient les protocoles décentralisés qui reposeraient strictement sur des informations vérifiables produites par un ensemble de protocoles. La Commission prend en exemple ici les "DEX" (Decentralized Exchanges) comme Uniswap.
  • les "Off-chain protocols"
    Ces derniers désigneraient enfin les protocoles qui s’appuient « faiblement » que sur des informations non vérifiables. La Commission prend en exemple ici les protocoles de lending décentralisés comme Compound.

4 ensembles de propositions de réglementations sont proposés par la commission dans ce rapport :

Ensemble de propositions N° 1 : « réguler les entités déjà régulées » :

Une réglementation pourrait notamment imposer aux entités régulées de permettre l’accès à une liste des adresses publiques qu’elles détiennent sur les différents protocoles.

Les institutions publiques pourraient fournir des services de dernier recours à la gestion des clés des adresses "too big to lose", faisant écho à la notion "Too big to fail" survenue en réponse à la crise des subprimes.

Des exigences de fonds propres ou mesures tampons, spécifiques à l’activité DeFi, deviendraient opposables aux entités régulées.

Enfin, les entités régulées devront être capables de connecter leurs expositions aux crypto-actifs avec d’autres éléments de leur bilan pour surveiller les risques de conséquences externes sur ce que nomme ici la Commission « l’économie réelle ».

Ensemble de propositions N°2 : « Compliance volontaire » via un « NFT ID » public :

Aspect de ce rapport très intéressant par son innovation : les entités régulées voulant opérer sur la DeFi pourront réaliser une procédure d’agrément optionnel qui leur permettra d’obtenir un NFT sur leur(s) adresse(s) publique(s) attestant de leur conformité, telle une licence liée à leur(s) adresse(s) (licence évidemment non échangeable).

Les protocoles pourront par exemple proposer aux clients uniquement des adresses liées à ces NFT.

Ces NFT auront surtout une grande valeur réputationnelle pour les entités qui en bénéficient, ayant réalisé cet agrément. Mais cela aura aussi pour utilité une vision plus précise du régulateur sur les activités réalisées au sein des différents protocoles, notamment imposer que seules les entités ayant ce NFT pourront utiliser un protocole.

Ensemble de propositions N°3 : « Observatoire public » :

Une autorité dédiée surveillera les protocoles pour en déduire des certifications ou à l’inverse des avertissements, jusqu’à appliquer des sanctions.
Cette proposition trouve son inspiration dans le travail du MIT Digital Currency Initiative qui avait, en 2017, alerté de risques de failles de sécurité à l’encontre de IOTA protocol.

Même si il existe déjà des audits sur les protocoles décentralisés, par exemple : Curve ou Anchor Protocol ont chacun été soumis respectivement à 4 et 3 audits, ces derniers sont seulement réalisés par des entités privées [3].

Ensemble de propositions N°4 : « Oracles » :

La proposition ici est de créer des API liées aux protocoles décentralisés pour en analyser, identifier les risques.

Des licences pourront être obtenues, le sujet ici est en fait une proposition de nouvelle activité indirectement liée aux PSAN et futurs CASP, destinée à des acteurs de la tech & finance plus traditionnels pour monitorer l’ensemble du secteur de la DeFi via des API publiques.

Conclusion.

Alors que MiCA va bientôt entrer en application, la machine règlementaire ne cesse d’être en mouvement et les acteurs devront d’ores et déjà se préparer à l’arrivée de nouveaux instruments règlementaires spécifiques à la DeFi, ceux portant sur les NFT étant quant à eux très attendus et tout aussi imminents.

Il est toujours intéressant de constater la dynamique législative de l’Union européenne qui se fait de plus en plus intense, que ce soit sur le droit du numérique (avec récemment le DSA, DMA et DA), ou sur la "finance numérique" contenant le Régime Pilote dit "DLT", MiCA et le règlement DORA.

Toutes les questions se rassemblent alors autour d’une interrogation : cette réglementation, notable par sa célérité, est-elle ou non du côté de l’innovation ?

L’avenir et l’espoir nous le diront.

Enguerrand Denoual, Elève-avocat
Crypto-actifs et nouvelles technologies

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Notes de l'article:

[2Source : communication de l’accord trouvé par les institutions européennes sur MiCA, lien hypertexte : https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2022/06/30/digital-finance-agreement-reached-on-european-crypto-assets-regulation-mica/

[3Sources : audit des deux protocoles : Lien hypertexte pour Curve Finance https://resources.curve.fi
Lien hypertexte pour Anchor Protocol https://docs.anchorprotocol.com/anchor-2/security

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